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Glen HANSARD - This Wild Willing (2019)
Par GEGERS le 9 Avril 2019          Consultée 1285 fois

Dans un univers infini, en constante expansion, l’être humain est un grain de poussière. De la poussière d’étoiles, certes, mais de la poussière tout de même. L’Homme ? Un amas d’atomes, du vide à 99%. Et pourtant, que de douleurs, que de tracas, que de nombrilisme tandis que, loin derrière l’univers observable, la course des étoiles se poursuit. Glen HANSARD est comme tout le monde. Beaucoup de vide, un peu de matière (essentiellement de l’eau) et une propension à la fermentation naturelle qui voit les taux de méthane augmenter dans l’atmosphère.

Mais le chanteur irlandais n’est pas qu’un petit amas. Il a un destin. Ses cellules portent le poids du monde, sa voix se fait le chant de l’univers. Glen HANSARD crie, s’époumone, fait de son folk épidermique une splendeur nouvelle autant qu’un hommage à Bob Dylan, Woody Guthrie ou Shane McGowan. Son quatrième album, l’artiste n’avait pas prévu qu’il prenne ainsi cette allure de Grand Tout. Dans le cadre d’une résidence à Paris, au Centre Culturel Irlandais, pour un mois en juillet 2017, l’éternel interprète de chef-d’œuvre Once prépare alors un album folk simple et direct, acoustique et sans fioritures, en compagnie de ses fidèles acolytes Joe Doyle (basse), ROMY (piano) et Javier Mas (guitare espagnole). Mais Paris et le destin en décideront autrement. Par accident, puisque les grands bouleversements dans l’univers se font toujours par accident, Glen fait la connaissance des frères Khoshravesh, musiciens iraniens installés dans la capitale, avec lesquels l’alchimie est immédiate. S’ajoute à cela une infection pulmonaire tenace, qui ne permet pas à l’artiste de faire appel à toutes ses capacités vocales. Aux Black Box Studios, l’atmosphère change radicalement, et ce qui devait être un album simple et direct devient un opus alambiqué, à l’issue incertaine, et dont la construction audacieuse s’effectue au jour le jour. Comme lors du Big Bang, la matière s’entrechoque, et les musiciens se succèdent et se côtoient en studio. On y croise notamment la joueuse de daf et chanteuse iranienne Aida Shahghasemi, le joueur de banjo Eamon O’Leary, le violoniste Brían Mac Gloinn (de l’excellent groupe YE VAGABONDS) et son ancienne compagne avec laquelle Glen a écrit quelques une de ses plus belles pages musicales, Marketa IRGLOVA.

This Wild Willing, qui résulte de ces échanges gravitationnels, est un opus d’une froideur résolue autant que délicate. Glen chante, c’est naturel, mais il murmure et ne crie que très peu. Pourtant, il est à bout de souffle. "A Fool’s Game", titre-monde de plus de six minutes, est le désespoir mis en musique, et constitue sans doute la plus belle offrande de ce nouvel album. Le piano, instrument habituellement très important sur les albums de l’Irlandais, sert ici de support, de mise en bouche discrète l’explosion d’une supernova, maelstrom d’instruments qui rend le désespoir explosif. Les sentiments connaissent de brutales montées et descentes en intensité, et finalement, alors que le morceau s’achève sur quelques vers déclamés en vieux Perse par Aida Shaghasemi, on se dit que c’est bien le piano, seul instrument restant, qui a gagné la bataille.

Malgré le foisonnement des instruments, il y a beaucoup d’humilité. Les cuivres de "Race To The Bottom" renforcent la délicatesse du morceau, de même que le chant murmuré de Glen. L’artiste propose ici une sorte de journal de son mois parisien, mais entre les lignes transpercent une profonde tristesse et un humanisme désabusé. Les influences moyen-orientales, qui surgissent en fin de morceau, font de ce folk mortuaire une splendide déclaration d’effondrement. Il y a beaucoup d’espace sur cet album malgré le foisonnement des instruments, de même qu’on y trouve une certaine lenteur salvatrice. Certains morceaux, à l’image de "Weight of The World", qui s’étend sur plus de sept minutes, donnent l’impression d’être de simples recherches en studio, des expérimentations inabouties. L’auditeur navigue ainsi entre la contemplation et un ennui riche en enseignements. L’ennui, né en partie de la faiblesse vocale de Glen, contrebalance les moments d’intensité extrême, à l’image de ceux que l’on retrouve sur "Don’t Settle", cri d’une beauté rare où un piano (de nouveau lui) envahit l’espace et porte la construction d’un titre qui, comme la marée, alterne retraits et reflux, tandis que cuivres, violon et section rythmique entremêlés construisent se font porteur d’un foisonnement musical dont le climax survient en toute fin de morceau. Pris à la gorge, l’auditeur n’a d’autre choix que de contempler la beauté pure d’une telle déflagration. A la manière de "Bird Of Sorrow" sur l’album Rhythm and Repose (2012), Glen n’a nul autre pareil au moment de créer un morceau doté d’une montée en intensité déstabilisante tout autant que splendide.

This Wild Willing s’achève sur "Leave A Light", une ballade irlandaise aux fortes intonations celtiques. Nul doute que ce morceau était l’intention originelle de Glen sur cet album : proposer une beauté pure et intimiste. Au lieu de cela, la beauté se cache. Elle se fait alambiquée, et se dissimule sous une complexité des ambiances et un désespoir enveloppant qui, si ce n’était pour ce dernier titre, laisserait à penser que l’artiste a finalement décidé de proposer un album sombre et désabusé. Se laissant guider par les circonstances et ses fréquentations, Glen HANSARD propose son album le plus audacieux à ce jour, mais pas nécessairement le plus difficile d’accès. L’auditeur persévérant saura s’accrocher à des mélodies, faire résonner des ambiances, qui lui permettront d’apprécier sur la durée ce qui est à n’en pas douter l’album à la fois le plus ouvert et le plus personnel de l’Irlandais.

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- Glen Hansard (chant, guitare, claviers)
- Joseph Doyle (basse)
- Ruth O’mahony Brady (claviers, piano)
- Earl Harvin (batterie)
- Dunk Murphy (claviers)
- David Odlum (guitare, moog, batterie)
- Una O’kane (violon)
- Paula Hughes (violoncelle)
- Katie O’connor (viole)
- Rosie Mackenzie (violon)
- Breanndán Ó Beaglaoich (accordéon)
- David Odlum (moog)
- Curtis Fowlkes (trombone)
- Michael Buckley (saxophone)
- David Smith (trompette)
- Pouyã Khoshravesh (chant)
- Mãni Khoshravesh: (chant)
- Nimã Khoshravesh (chant)
- Aida Shahghasemi (chant, percussions)
- Eamon O’leary (bouzouki)
- Javier Mas (guitare espagnole)
- Michael Buckley (flûte)


1. I'll Be You, Be Me
2. Don't Settle
3. Fool's Game
4. Race To The Bottom
5. The Closing Door
6. Brother's Keeper
7. Mary
8. Threading Water
9. Weight Of The World
10. Who's Gonna Be Your Baby Now
11. Good Life Of Song
12. Leave A Light



             



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