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The SWEET INSPIRATIONS - The Sweet Inspirations (1967)
Par LE KINGBEE le 11 Avril 2021          Consultée 1030 fois

Sans exagération, depuis plus d’un demi-siècle, les SWEET INSPIRATIONS font figure de véritable institution dans le monde de la Soul et de la Pop. En réalité, la formation remonte encore à plus loin, au début des fifties, époque de la genèse de cette troupe de choristes.
Benjamine d’une famille de huit enfants, Emily Cissy Drinkard prend les rennes des Drinkard Singers, la chorale de la New Hope Baptist Church of Newark, une congrégation du New Jersey. Derrière Cissy, de nombreuses jeunes filles se succèdent : la frangine Lee Warwick, deux nièces Dionne et Delia « Dee Dee » Warrick, Judy Guions, une copine d’école (future Judy Clay), Marie Epps, Emily Garland, Ann Moss et Myrna Smith, chanteuse au sein des Gospelaires, sans oublier deux frangins Larry et Nicky. Au fil des ans et des occupations familiales et professionnelles, de nouvelles têtes font leur apparition, succédant parfois temporairement aux chanteuses d’origine : Doris TROY, Sylvia Guions-Shemwell, Estelle Brown et Gloria Brown.
Les Drinkard Singers qui se produisent dans de multiples programmes religieux dans la région de New York, deviennent l’un des ensembles attitrés de l’Apollo Theater à Harlem dont la scène dominicale est réservée à la musique religieuse. En 1954, la troupe enregistre un premier 45-tours pour Savoy, une discographie qui s’enrichit avec quatre albums édités par Verve, RCA et Choise Records, un petit indépendant basé à Newark.
A l’orée des sixties, Si l’ensemble se produit le week-end à la gloire du Seigneur, Cissy Drinkard ose franchir le Rubicon en endossant en semaine une tenue de choriste pour un répertoire séculier. Entre la musique de Dieu et celle du Diable, la frontière est parfois des plus tenues. Désormais mère de trois enfants avec la naissance de Whitney durant l’été 63, Cissy doit faire bouillir la marmite. C’est ainsi qu’on la voit de plus en plus souvent prendre le chemin des studios. La choriste va épauler tour à tour Maxine Brown, Ronnie HAWKINS, Garnet Mimms, The DRIFTERS, Solomon BURKE. Rejointe par Myrna Smith, Sylvia Guions-Shemwell (la sœur de Judy parie faire une carrière solo) et Estelle Brown. Cissy Drinkard change de nom suite à son mariage avec John Houston tandis que la troupe de choristes devient vite la plus recherchée de tout New-York.

Suite à une séance d’enregistrement avec Wilson PICKETT, Jerry Wexler, l’un des big boss de la firme Atlantic, décide de leur proposer un contrat. Une démarche sage et stratégique, le producteur ne veut pas perdre ses choristes préférées ni les voir se disperser dans des projets solo sans queue ni tête. Malin comme un singe, le producteur prend soin de faire figurer un disque de Gospel dans le contrat de ses nouvelles pouliches. La rumeur prétend que Chuck JACKSON aurait glissé à l’oreille de Jerry Wexler le nom de SWEET INSPIRATIONS.

Producteur prudent et fin stratège, Jerry Wexler édite entre mai 67 et février 68 pas moins de cinq singles dans lesquels figurent huit des douze titres. Une manière de prendre la température, de voir si les ventes correspondent aux attentes et surtout de promouvoir le premier disque.
Enregistré lors de trois sessions (25 avril -7 juin - 24 aout la plus fournie avec 9 titres à la clé) dans les studios d’Atlantic à New York, ce premier disque éponyme permet de faire le pont entre Gospel et Soul, une transition pleine de discernement. Coproduit par Tom Dowd et Tommy Cogbill mais supervisé par Wexler en personne, cette première galette bénéficie de l’apport d’auteurs excellents pour les originaux et de choix judicieux pour les reprises.
Parmi les covers, "Blues Stay Away From Me", standard White Blues des Delmore Brothers enregistré après guerre, impressionne par sa douceur. Comme l’annonce un slogan publicitaire, les Sweet Inspirations nous confortent vers une sorte de force tranquille. Si Gene Vincent et les Frères BURNETTE en avaient délivré de bonnes souches, le titre échappait jusqu’alors au registre Soul. Clyde McPhatter avait certes collé la chanson à son répertoire, mais celle-ci dégoulinait de sucreries et d’édulcorants peu goûteux. Là, on n’est pas sur la même planète. Petite visite chez Aretha FRANKLIN, tante honoraire de Whitney HOUSTON, avec "Don't Let Me Lose This Dream" composé et enregistré en début d’année par Lady Soul. Pour un peu, on préfèrerait la présente version plus groovy et moelleuse que l’originale. Second emprunt dans la disco de FRANKLIN avec "Do Right Woman - Do Right Man", une petite pépite de Soul Sudiste qui fera également la joie d’artistes Country. Là encore la formation nous assène du cousu main, tant au niveau de l’accompagnement que des arrangements. On se croirait entre les studios FAME et une église baptiste d’Alabama. Immense succès d’Eddie FLOYD, "Knock On Wood" fera l’objet d’excellentes reprises (Wilson PICKETT, le duo Carla THOMAS/Otis REDDING, ou plus récemment Sammy Kershaw) mais aussi d’essais à la limite du massacre (David Bowie et Amii Stewart en version Disco). Encore une fois, la formation nous glisse une bonne interprétation, si l’accompagnement est peut être moins clinquant que les précités, la richesse des harmonies fait la différence. D’une sonorité Stax, les quatre choristes s’imposent comme si elles terminaient un show Gospel du samedi soir. Petite escapade dans l’univers de PICKETT, qu’elles ont accompagné, avec "Don’t Fight It". Mais contrairement à certains repreneurs qui probablement par complexe d’infériorité ou problème d’égo ou hormonal en rajoutaient des couches (Tom JONES, Ike & Tina TURNER), le groupe nous offre une interprétation sans surenchère, les cuivres viennent épicer le contenu juste ce qu’il faut alors que les voix sont toujours au top.
Ceux qui ont l’habitude de lire certaines chroniques auront remarqué qu’il m’arrive de railler certaines adaptations françaises de titres anglais ou américains. Bien souvent quand le texte en français colle péniblement à la mélodie, l’orchestration et les arrangements se révèlent affligeants; le plus généralement les paroles et l’accompagnement se battent pour décrocher le prix de la Pauvreté, c’est comme cela. Et bien il arrive parfois que les artistes Outre Atlantique reprennent des morceaux de chez nous. C’est le cas avec "Je t’appartiens" de la paire Delanoë/ Gilbert Bécaud, devenu "Let It Be Me". La chanson a été cuisinée à toutes les sauces, de PRESLEY aux EVERLY BROTHERS en passant par Nancy SINATRA, DYLAN et les POINTER SISTERS, sans parler de nombreux duos aujourd’hui plus risibles que mauvais (sauf que souvent, l’un n’empêche pas l’autre). La production parvient à gommer une partie de l’aspect sirupeux et mélodramatique du morceau par l’entremise d’une grosse ligne de basse bien ronde, d’un chant d’orientation churchy. Bref encore un bon point ! Le bonnet d’âne est attribué à "Reach Out For Me", une création du prolifique tandem Bacharach/David enregistrée quelques années plus tôt par Dionne Warwick (la nièce et ancienne équipière). Si la qualité des harmonies vocales permet de situer la version dans le haut du panier par rapport aux essais de Nancy Wilson, Roy Hamilton ou Jerry Buttler, le titre n’en demeure pas moins le titre le plus faible de l’album. En guise de fermeture ou d’offrande, la formation propose "Why (Am I Treated So Bad)" un Gospel de Pop Staples. Si James BROWN en délivra une version dantesque de Soul Gospel bien éloignée de toute influence Funk, celle des Sweet Inspirations est capable d’envoyer n’importe quel païen à l’église afin de quémander hostie et vin de messe.

Si elles ont peu composé, les quatre dames chantent sur de nouveaux morceaux. Le tandem Spooner Oldham/ Dan Penn leur offre: "Sweet Inspiration", une ballade mid-tempo dans laquelle la qualité des harmonies vocales frappe encore les esprits. Il suffit d’écouter les reprises de Barbra STREISAND, Vonda Shepard ou de Diana ROSS & The TEMPTATIONS pour se convaincre de la différence entre une purge et une pièce de choix. Classé à la 5ème place des charts R&B et 18ème dans ceux de la Pop, ce titre sera la meilleure vente du disque. Très bonne trouvaille avec "I’m Blue", un inusité d’Ike TURNER, enregistré en 61 par les Ikettes pour Atco. On pourrait croire que Wexler nous refourgue un vieux titre oublié sur une étagère poussiéreuse, si ce n’est que les Sweet Inspirations se réapproprient carrément le morceau. Quel dommage qu’il ne dépasse pas les 130 secondes. Compo d’Isaac Hayes et David Porter, "Here I Am (Take Me)" se déguste comme une ballade Deep Soul issue du meilleur tonneau. On se croit encore une fois à Muscle Shoals.

Hormis "Reach Out For Me", certains croiront que je pinaille et ils n’auront pas forcément tord, il n’y a pas grand-chose à jeter ici. L’essence même des harmonies vocales ingurgitées sur les bancs d’une église, l’étoffe des arrangements, un accompagnement millimétré, une production soignée et sans surenchère et un choix de titres aussi pertinent que cohérent mêlant reprises et nouveautés constituent des atouts forts en bouche. Si l’ensemble a subi d’inévitables changements de line-up, on le retrouve en backing derrière une foule de vedettes (Van MORRISON, ELVIS, Aretha FRANKLIN, George BENSON, Dusty SPRINGFIELD ou Yusef Lateef).

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   LE KINGBEE

 
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- Cissy Houston (chant)
- Myrna Smith (chant)
- Sylvia Guions-shemwell (chant)
- Estelle Brown (chant)


1. Oh! What A Fool I've Been
2. Blues Stay Away From Me
3. Don't Let Me Lose This Dream
4. Knock On Wood
5. Do Right Woman - Do Right Man
6. Don't Fight It
7. Sweet Inspiration
8. Let It Be Me
9. I'm Blue
10. Reach Out For Me
11. Here I Am (take Me)
12. Why (am I Treated So Bad)



             



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