Parfois, il suffit seulement de quelques secondes pour qu'un morceau vous parle quasi instantanément. Vous savez dès lors sans vraiment l'expliquer que ces notes et ces mots vous accompagneront incontestablement durant un certain temps, si ce n'est plus. C'est l'évidente force de BLANKENBERGE et de "No Sense", le nouveau single des Russes annonciateur de l'album à venir. Le quintet désormais quatuor est devenu rapidement l'une des références shoegaze de son pays, ce dernier exposant avec parcimonie et ce même à l'heure d'internet des projets qui ont souvent pour point commun la qualité et la transmission discrète de belles émotions.

C'est un fait. Dans le petit cercle des adeptes qui aiment à la fois se lover dans un cocon d'éther et être assaillis par des zébrures électriques mélodiques, le combo originaire de Saint-Pétersbourg est dorénavant attendu au tournant. Fort de Radiogaze (2017) et More (2019) ses deux solides premiers albums qui combinaient avec aisance shoegaze, dream pop et effluves post-rock, BLANKENBERGE s'est fait sa place au soleil, sans opportunisme aucun. Dans ce conséquent revival lucratif ou redécouverte d'ambiances so 90's à la sauce 2020 (selon le placement de votre curseur), le combo a en effet vraiment son mot à dire et le moins que l'on puisse constater, c'est qu'il le fait depuis ses débuts avec une insolente réussite.

A peine quatre minutes sont donc suffisantes pour installer le genre de petite rengaine qui va durablement trotter dans la tête. C'est un modèle du genre ce "No Sense". Sous des aspects pop qui ne désirent pas dire leur nom, le quatuor réussit avec subtilité à allier le confort d'une mélodie serre-cœur à l’incandescence finale d'un mur de son de toute beauté. Des premières notes de guitare où l'ombre de SLOWDIVE plane avec respect à celles finales dignes des heures les plus glorieuses du mouvement, BLANKENBERGE remue sans problème les petits êtres sensibles. La voix de la douce Yana Guselnikova qui flotte littéralement dans les airs nous rend indubitablement tout chose. Elle offre encore une fois un contrepoint bienvenu à la guitare tour à tour cristalline ou acérée de Daniil Levshin et à la frappe métronomique de Sergey Vorontsov tandis que le bassiste Dmitriy Marakov insuffle un délicat tempo mélancolique . On a dit souvent du shoegaze qu'il est l'osmose réussie entre une certaine forme de torpeur et d'un dynamise plus marqué. Les Russes à travers ce morceau le confirment haut la main.

On se croirait donc revenu comme il y a près de trente ans où l'on croisait fébrilement les doigts pour qu'un album dont le premier single était prometteur, excitant soit du même acabit. "No Sense" est de cette trempe. Si vous aimez le style musical auquel appartient BLANKENBERGE, vous ne pourrez assurément qu'y succomber. Vivement la suite !