Dans la famille Corr je demande les trois sœurs et le frère : Sharon, Caroline, Andrea et Jim. De leur Irlande natale ils gardent le goût de la musique celtique, des ballades et de la bière. Mais les Corrs sont pop avant tout et très rarement rock, contrairement à leurs compatriotes de U2 (écartons donc une comparaison de succès et de talent qui n'a pas lieu d'être). En 1995 sort Forgiven Not Forgotten, leur premier album, gros succès en Europe et en Australie. La recette pop mâtinée de musique celtique a bien pris, que le matraquage commence. Forgiven Not Forgotten, Runaway, Love To Love You, Leave Me Alone, vous les avez sûrement entendues à la radio à l'époque, et peut-être encore aujourd'hui. Le fait est qu'à haute dose, la musique des Corrs devient franchement très lourde, même pour de grands amateurs de Pop.

Mais n'allez pas croire que la tambouille est à ce point indigeste, loin s'en faut. Cet album mérite qu'on y jette une oreille, ne serait-ce que pour les instrumentaux traditionnels qui le parsèment. Même si Along With The Girls et The Ministrel Boy pêchent par leur faible durée, Toss The Feathers et Erin Shore (qui fait office à la fois d'Intro et d'Outro) possèdent ce supplément d'âme qui manque souvent aux disques de pop grand public. Sharon au violon et Andrea au piano et à la flûte irlandaise interprètent ces passages instrumentaux impeccablement, passages que l'on retrouve le temps d'un pont sur les chansons de l'album.
Celles-ci justement, fonctionnent toutes à peu près sur le même modèle (hormis Closer), et c'est sans doute le plus gros reproche que l'on peut faire au disque : les Corrs usent et abusent de la même recette sur Heaven Knows, Runaway, The Right Time et Leave Me Alone. Runaway et The Right Time me semblent d'ailleurs n'être qu'une seule et même chanson tant la ressemblance est frappante, tandis que Leave Me Alone résume à elle seule la structure employée par le groupe : intro celtique, couplet accompagné du piano et des guitares puis refrain simple et redondant.
Someday et Secret Life bénéficient d'une intro plus rock (tout juste), sans pour autant surprendre l'auditeur. Pour résumer cet aspect des choses, je dirais que trop de tubes tuent le tube et que des compositions plus complexes et/ou originales auraient été les bienvenues. Autre point noir de l'album : le chant d'Andrea Corr. Le chant, et non la voix, car comme toutes les chanteuses pop, la petite dernière de la famille Corr possède un timbre agréable à écouter, mais le chant est si peu varié (notamment au niveau des refrains) qu'il contribue au sentiment de trop grande homogénéité qui se dégage de l'album. Et puis l'amour est un thème récurrent chez les Corrs, et encore, récurrent est un euphémisme. Les quelques titres présents dans la chronique vous donneront un assez bon aperçu du contenu des paroles, insensibles s'abstenir. Les autres, chantez Leave Me Alone à votre banquier.

Alors finalement, il vaut quoi cet album ? C'est sûr, la maison de disque est ravie, mais moi je râle. Et grognons en cœur, parce que cet album aurait pu être bon voire très bon. Moins de tubes, des parties instrumentales plus variées, un chant et des refrains retravaillés et le tir faisait mouche. Premier album en demi-teinte pour un groupe que j'affectionne quand même, rien que pour son dernier album.