Ce support n'existe pas, mis à part pour les besoins de la chronique (et les caprices du chroniqueur).

En ce jour de vendredi 1er décembre 2023, The CORRS, sacro-sainte famille irlandaise musicienne, 'so young' pour toujours, quand bien même la plupart des frère-soeurs a dépassé la cinquantaine (Andrea, petite dernière, l'atteint en 2024), qui s'est déjà reformée et tourne depuis quelques mois avec leurs fidèles Keith Duffy et Anthony Drennan (quelle stabilité incroyable, comme si vingt-cinq années ne s'étaient guère écoulées!), republie sa compilation ultime.

On se souvient de l'émoi causé en 2001 par cette publication, au bout d'à peine trois albums mais bourrés de tubes (surtout les deux derniers), juste à point après le carton d'In Blue et de "Breathless", avec des CORRS au sommet de leur popularité. Outre les versions normales, beaucoup d'alternatives (dont "What Can I Do" meilleure ainsi), du live unplugged et deux inédits ouvrant et fermant le tout : "Make You Mine", abandonnée pour Talk on Corners (1997), et surtout "Would You Be Happier?", une des meilleures chansons du groupe en ces années-là.

En 2023 maintenant, la nouvelle version du Best-Of The Corrs contient deux CDs (ou deux vinyles, pour la première fois sur ce support d'ailleurs) qui, très curieusement, ne laissent pas la place aux singles ultérieurs de Borrowed Heaven (2004), Home (2005), White Light (2015) voire Jupiter Calling (2017). Tout reste tel quel. En revanche, et pour se situer proche de leur reprise bien connue de "Dreams" de FLEETWOOD MAC datant de 1997, elles et il ajoutent trois reprises, pas n'importe lesquelles.
"Dreams" était la chanson-tube emblématique de Stevie Nicks, vocaliste principale du groupe à travers l'album Rumours, en 1977, resté le neuvième album le plus vendu de tous les temps. Par la suite, durant la tournée 98, les CORRS ont invité Mick Fleetwood à jouer sur deux ou trois titres dont "Dreams" naturellement, comme on le voit sur le DVD du concert au Royal Albert Hall. Le batteur mythique et enthousiaste les adoube avec ferveur face à leur propre public ; émotion pure.

Le temps passe (trop), et Christine McVie, deuxième chanteuse pour les fans du MAC qui jurent d'abord par Nicks, mais première pour ceux qui connaissent l'histoire vraiment et savent son importance aux claviers comme à l'écriture des chansons, dame Christine donc, décède fin 2022. Une des plus grandes figures féminines pop-rock au charme discret mais à la plume sans égale (pas même celle de Nicks), tout simplement. Et à travers cette ressortie de best-of, The CORRS ont voulu lui rendre hommage, plutôt trois fois qu'une.

Après "Dreams" re-donc, c'est "Songbird" que nos chères et cher Irlandais ont retenu de Rumours pour titre collant à la peau de sa génitrice, en lieu et place de son plus léger et facile méga-tube "Don't Stop". Rien que pour cela, merci. Chanson voix-piano à l'origine, avec un soupçon de guitare acoustique, d'une beauté féminine mélancolique et désarmante, elle passe ici dans l'organe enfantin et doucereux d'Andrea Corr, d'une production feutrée milieu de 70's à quelque chose de plus actuel, propret mais aussi ample.

Avec une tierce mineure d'écart entre les deux tonalités, plus grave ici, toujours autour du piano mais comme propice au recueillement, la version des CORRS est simplement plus 'comme eux peuvent la faire', avec guitare acoustique arpégée par Jim plutôt qu'en accords, résonances de guitare électrique par Anto Drennan. Plus celtique-irlandaise aussi, forcément, avec le bodhrán de Caroline et le violon de Sharon par la suite, exceptionnellement belle à sa façon. Merci, merci.

Et ce n'est pas fini. La chronique non-coutumière vous propose donc un faux single/E.P, ne serait-ce que pour garder une belle image inédite plutôt que la pochette du best-of (dont l'achat se justifie, de fait), et qui, après "Songbird", révèle deux titres de feue-dame Christine pour le deuxième album de FLEETWOOD MAC ayant le mieux marché, Tango in the Night (1987), également huitième meilleure vente de la décennie concernée, en général.

"Little Lies", titre pop-rock élancé moins eighties qu'à l'origine, permet de retrouver les harmonies des trois soeurs pour notre plus grand bonheur, et l'accompagnement adéquat. La basse de Duffy chaleureuse, la guitare de Drennan rendant grâce à Lindsey Buckingham en remplacement du synthé cristallin d'origine, la ligne 'orientale' jouée au violon et au tin whistle groupés, comme on pouvait s'y attendre, tous ne sont là que pour renforcer le plaisir, sans se situer loin de l'original, qualitativement.

Idem d'"Everywhere", tout simplement l'une des plus belles ballades de dame Christine, avec ce ton chaloupé à travers le riff, 'irrésistible' pour reprendre un mot cher aux CORRS. Et cette mélodie qu'Andrea chante avec féérie et une touche d'enfance qu'elle mesure mieux qu'ailleurs, mélodie toujours merveilleuse dans la chaleur feutrée du son parfaitement respectée, les effets de Caroline à la batterie dans le canal gauche, etc ! Toujours un peu d'Irlande en lieu et place du synthétiseur conclusif, et les frère-soeurs à nouveau unis par ces onomatopées légères et groupées qui font toujours tant de bien.

Rien d'original certes (surtout dans l'attente d'un vrai nouvel album), mais guère plus de dénaturé. Que de beautés, avec ce qu'il faut d'identité. Ai-je pensé à les remercier ?

2/5 pour la réédition de base, mais 5/5 pour les reprises.