Il semble que de gros changements s’amorcent pour LA FEMME en cette année 2022. Matez donc les titres de ce quatrième opus, nous voici en terrain hispanique ma parole ? Mais ou sont passés les aspects francophones du groupe ? L’influence de la proximité de l’Espagne dans la culture de Marlon et Sacha, qui dirigent le groupe depuis ses débuts ? Les gars de Biarritz sont en tout cas pétris de culture basque et espagnole, on va beaucoup l’entendre tout au long de cet album. Peu à peu, le groupe se batit une discographie de belle qualité, chose rare dans l’hexagone ou les faux pas sont souvent nombreux. Je reste pour ma part sur le single « Paradigme », d’une qualité évidente même si on considère leur troisième album comme légèrement moins bon.

Nous avons donc deux instrumentaux en guise d’introduction et de conclusion pour ce quatrième album : la "Fugue italienne" est une entrée en matière particulière, un instru de belle allure, au ton martial et à l’ambiance très BO, avec des cuivres rebondis, et ou l’orgue finit par prendre le pouvoir. On reconnaît la patte du groupe sur la légèreté de la composition, avec quelques bribes d’Ennio MORRICONNE de ci de là. Ce début italien débouche finalement - assez inexplicablement - sur une "Ballade arabo-andalouse", qui paraît beaucoup plus à propos pour cet opus, mais dont la qualité est similaire.

L’espagnol prend le pouvoir immédiatement sur "Cha-cha", les voix féminines régnant sur ce titre synth pop de tradition, les beat de batterie sont eighties et on se croirait presque revenu au temps du groupe BANDOLERO avec leur "Paris Latino", sans déconner. Les guitares sixties embrayent "Contaminado", le chant de est superbe de célérité et de justesse. L’espagnol passe magnifiquement sur la musique du groupe. Une petite course échevelée contre le temps qui passe, une vraie petite merveille de morceau qui rassemble pèle méle toutes les influences du groupe, carrément adorable, le must de l’album. L’éponyme "Teatro lucido" joue sur les sonorités en employant l’autotune de manière originale., c’est à remarquer. On est au carrefour des éléments électro et de la culture hispanique du groupe avec une vibration psychédélique qui part dans tous les sens.

Et puis c’est une plongée dans la culture espagnole : une guitare andalouse débute "Y tu te vas" avec Maracas de rigueur, le traitement habituel de LA FEMME est bien présent, avec ces espèces de vagues ondoyantes si originales qui ont fait le succès du groupe. puis on se croirait dans une plaza de toros en écoutant "Maialen", les cuivres dominent sur un doumbadoum enjoué et fringant. Et hop on y entend la seule réminiscence dans la langue de Molière un "Je t’aime". Ambiance tapas a trois heures du mat pour "El conque-duque",à chanter quand on est défoncé. Un chant traditionnel avec l’accent français ça nous donne "El tio des padul" qui accélère tout du long dans un espère d’élan rèminiscent des NEGRESSES VERTES.

Nous repartons sur un titre aux consonances pop avec "No pasa nada", la grande chanteuse a belle allure dans la vidéo a la gloire de l vie nocturne. On replonge en pleine new wave avec "Resaca", tout sonne eighties la dedans ! Ce groupe a toujours le don de me bluffer avec ce son si spécifique. Le chant monocorde colle bien avec le genre et les synthés sont superbes, tout ceci évoque ELI et JACNO. La petite samba qu’est "Sacatella" se perd parfois dans des circonvolutions élégantes, avec une vibe brésilienne irréfutable nonobstant l’emploi de l’espagnol, très étrange mais finalement à l’endroit quand on considère l’évolution du groupe. Enfin "Tran de la vida" sonne a nouveau traditionnel, petite folk song a la guitare agile.

L’ensemble est évidemment surprenant de prime abord, mais il se laisse bien apprivoiser au bout de quelques écoutes. Quelques titres surnagent parmi lesquels "Contaminado" est celui qui a ma préférence, on y retrouve les ingrédients habituels du groupe, qui oscille entre guitares surf et beat new wave. L’adjonction exclusive de la langue de Cervantès est toutefois une évolution drastique qui risque fort de coûter au groupe une partie de son public français. Je suis globalement moins touché par ce disque aux intonations hispaniques que je ne l’étais à l’accent franchouillard des premiers. Je reste cependant sur un trois équilibré.