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DOOMJAZZ / DARK AMBIENT  |  STUDIO

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- Style : Bohren Und Der Club Of Gore, Senketsu No Night Club
- Membre : Bong-ra, Mansur
- Style + Membre : The Mount Fuji Doomjazz Corp.
 

 The Lovecraft Sextet Bandcamp (166)

The LOVECRAFT SEXTET - Miserere (2022)
Par STREETCLEANER le 7 Mai 2023          Consultée 1276 fois

Se laisser porter par ce Miserere revient à explorer notre part la plus sombre, à la questionner, à la méditer. C’est se pencher sur la peine de l’âme humaine, la repentance, la pénitence, le deuil et l’humiliation selon les termes de son auteur, Jason Köhnen, inspiré par le psaume 51* et le compositeur italien Gregorio ALLEGRI, auteur du célèbre Miserere ou Miserere mei, Deus, œuvre de musique sacrée (motet - ou chant d’église à plusieurs voix) composée vers 1638.

Selon le site de Radio France, ce motet qui incarne toute la souffrance mais aussi l’espoir des croyants et la majesté de la foi était jalousement gardé par le chœur et les autorités de la Chapelle Sixtine. En d’autres termes, le motet d’ALLEGRI n’avait pas vocation à être chanté ailleurs que dans ce lieu saint pour lequel il avait été écrit. Pour l’écouter, il fallait assister aux offices des matines de la Semaine Sainte. Cette œuvre serait sans doute restée romaine si un jeune Autrichien de 14 ans et doté de l’oreille absolue [Mozart] ne s’était pas rendu à Rome pendant la Semaine Sainte de l’année 1770.

Le psaume 51.3 donne le ton : Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam (Dieu, aie pitié de moi dans ta grande miséricorde) ; si la vision de Köhnen est sombre, très sombre même, elle ne doit pas être abordée comme une œuvre maléfique ou une quelconque forme d’adoration des Ténèbres. Elle vise, au contraire, la repentance de l’âme, conservant en partie le caractère religieux de la musique originelle.

Toutefois, on connaît les penchants de Köhnen pour les musiques sombres et il n’est pas peu dire ici que la souffrance dont il est question dans l’œuvre va être montrée, portée et exposée à tous dans sa pire noirceur. L’Homme est marqué du sceau du péché et ce fardeau va peser sur nous tout du long de cette adaptation de Miserere. Rien n’est joyeux ici, il n’y a aucune raison de nous épargner ; et trouver l’espérance ne pourra - peut-être - se faire qu’après une longue, très longue introspection.

"Miserere [Opus I] – Occulta" porte bien son nom : darkjazz, doomjazz, ou dark ambient imprégnés des hurlements lointains de Dimitris Gkaltsidis, vocaux très typés black metal ; l’entrée en matière pourrait être sous-titrée Under the Sign of the Black Mark. La cadence est donnée ; nous cheminons lentement, très lentement. Nous gravissons péniblement ce chemin de croix. Telle l’épreuve de la Montagne du Destin. Vision d’un monde dévasté, recouvert de cendres et de flammes. La vérité finit par jaillir des flammes, dit-on. La vérité est ici cruelle et nous soumet, implacable : Toi qui entres ici, abandonne tout espoir.

"Miserere [Opus II] – Domine" et "Miserere [Opus V] – Humiliatum" sont des longues errances de plus de sept minutes dans les mondes souterrains infernaux. C’est le darkjazz de Bohren Und Der Club Of Gore poussé dans ses retranchements les plus désespérés. Les grognements ou hurlements de vieille sorcière de Gkaltsidis, parfois soutenus par les cris du saxophone, sont portés par les roches de ces corridors maudits.

Filets de lumière sur "Miserere [Opus III] – Sanctum" et "Miserere [Opus IV] – Sacrificium". La soprano Lilian Tong est la voix céleste qui nous guide et nous redonne confiance. Le chemin n’en n’est certes pas rendu plus léger mais on sait déjà que tout n’est pas encore envahi par les ténèbres. Qu’un espoir subsiste. C’est une épreuve, on peut être guidé mais c’est à nous qu’il revient de gravir le chemin. Suivre la lumière certes, mais le Mal ne lâche pas sa proie aussi facilement ; à ce titre la césure lumière / ombre de "Miserere [Opus IV] – Sacrificium" est très révélatrice du manichéisme qui imprègne l’esprit humain. C’est avant tout un combat contre soi-même.
Le final "Miserere [Opus VI] – Libera" s’oppose au premier opus "Occulta". C’est la libération, le salut face à l’occulte, au caché, à la dissimulation.

Miserere est une œuvre qui doit être prise dans son ensemble. Son manichéisme forme un tout. Il n’y a pas de Bien sans le Mal. De Mal sans le Bien. De résignation sans l’espérance. D’ombre sans la lumière. De sacré sans le profane. Miserere est l’occasion qui nous est donnée de cheminer sur ces différents sentiers. Il s’agit à la fois d’une musique religieuse et impie, certainement difficile à appréhender pour la plupart. Elle est à la fois belle et repoussante. Jason Köhnen n'en finit pas de nous surprendre : le travail qu’il nous propose est guidé par ses propres recherches sur la condition de l’âme, sur sa souffrance et son salut.

* 50 dans la numérotation grecque

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   STREETCLEANER

 
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- Jason Köhnen (piano/basse/guitare/orgue/électronique)
- Colin Webster (saxophone)
- Lilian Tong (soprano)
- Dimitris Gkaltsidis (hurlements)
- Eugene Bodenstaff (violoncelle)


1. Miserere [opus I]-occulta
2. Miserere [opus Ii]-domine
3. Miserere [opus Iii]-sanctum
4. Miserere [opus Iv]-sacrificium
5. Miserere [opus V]-humiliatum
6. Miserere [opus Vi]-libera



             



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