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PUNK/COLD WAVE/ELECTRO  |  STUDIO

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- Membre : Alan Vega

SUICIDE - Suicide (1977)
Par ONCLE VIANDE le 21 Février 2008          Consultée 6840 fois

SUICIDE reste l’ovni de l’année 1977. Un cri venu des entrailles new-yorkaises, un souffle vital et morbide, un requiem à la vie. Rien ne préparait à une telle formule, tellement dans son temps, tellement en dehors. SUICIDE est le premier à fabriquer un rock décadent exclusivement électronique, faisant l’économie de tout ce qui jusque là en constituait les fondamentaux : une basse, une batterie et une guitare. Ce que les groupes garage surent créer par l’électricité, Vega et Rev le transposent à une autre lutherie ; une boîte à rythmes et un vieux Farfisa, de quoi scandaliser les gardiens du temple.

Le contexte prédispose certes à peindre des miniatures urbaines aussi crues, mais sa musique se heurtera à l’incompréhension. Avec SUICIDE, on touche à autre chose. SUICIDE dérange, SUICIDE fait peur. Cet électronique bon marché était en fait plus perturbant que perturbateur, et la vision abyssale qu’il portait en fit bien plus qu’un simple manifeste punk.
La musique de SUICIDE est imprégnée d’une révolte et d’une mélancolie adolescentes qui ne peuvent laisser indifférent. L’album célèbre les années cinquante et transpire la nostalgie. Les filles ("Girl", "Cheree"), le rockabilly ("Johnny"), un mimétisme appuyé (Vega en Elvis punk), vie et mort intimement liés, "La fureur de vivre" version 77. La musique possède une évidence effrayante. Des phrases simplistes répétées naïvement, débarrassées de toute poétique, de tout effet de style. Un art brut et régressif, sans arrangements, mélodies ni variations. Deux notes pivots pour une répétition obsédée, close, autiste, sans passé, sans avenir. Une sorte de musique modulaire qui décline tous ses thèmes à partir du même son ; héroïque ("Ghost Rider"), urgente ("Rocket U.S.A"), lascive ("Girl"), sentimentale ("Cheree") ou désuète ("Johnny"), puis on change de face. "Frankie Teardrop" transfigure un disque qui n’aura jamais su cacher son malaise, et met en son l’innommable. La dépression, la folie puis l’horreur. Une marche funèbre ("Che") et le silence reprend ses droits. Malgré leur qualité ("I remember, Keep your dreams"), les bonus ne s’intégreront jamais au bloc originel, trop compact, trop abouti.

Ce disque apparaît aujourd’hui d’une modernité vertigineuse, et son influence sur la new wave et les musiques électroniques est incalculable. Le dernier disque rock pour certains, le point zéro de la cold wave pour d’autres. Ce qui est certain, c’est que la techno prend davantage sa source ici que chez KRAFTWERK, comme on peut fréquemment l’affirmer. SUICIDE porte en lui le beat primaire, la pulsion minimale que le gang de Düsseldorf manqua par une approche trop pop. Le son enfin, dur, froid, tellement allemand (l’électronique sale de CLUSTER, les boîtes à rythmes de CAN), tellement américain (la liturgie des DOORS, les tics de GENE VINCENT). Un son malade, à la source duquel on revient s’abreuver, par fascination ou pulsion autodestructrice. Un disque pour lequel la stéréo est presque un luxe, une concession.

Le livret contient une interview des deux membres réalisée par Marty Thau, fondateur du label Red Star qui permit l’accouchement du disque, et nous renseigne sur les influences du duo. Les trios pour piano de MOZART, THELONIOUS MONK, Cecil TAYLOR ou John COLTRANE. Autant de références qui peuvent sembler incongrues mais qui expriment un rejet du rock tel qu’il évolua depuis dix ans, et inscrit cette musique dans une démarche constructive totale, un acte d’assainissement.
SUICIDE reste une lumière pour plusieurs générations de musiciens car il a su être le dénominateur commun de tous les courants rock révoltés. Son histoire le rattache à la scène punk qu’il contribua à façonner depuis 1970. Son nihilisme et sa dépression en font un fondateur de la cold wave, telle qu’elle s’exprima entre 1977 et 1982. Ses influences perpétuent la tradition du rock’n roll originel. Quant au son, c’est toute la gamme électro et indus qu'il expose déjà en une demi-heure et sept petits titres. Majeur, incontournable, et séminal.

L’édition de 1998 contient les deux faces B sorties avec "Cheree" ainsi qu’une version remixée de celui-ci. Le second volume propose des inédits de haut niveau ("Mr Ray", "Las Vegas Man", "96 Tears"), mais a surtout valeur de document. On y trouve la fameuse prestation de Bruxelles où le duo fut hué et injurié. Ce concert témoigne de l’hostilité que SUICIDE devait affronter sur scène devant le public punk, venu écouter (!) une toute autre musique. SUICIDE était aussi un visuel d’une grande évocation symbolique ; Vega en était la face visible, consciente, extravertie, show man possédé et provocant, vivant ses histoires jusqu’à la démence, Rev la face cachée, inconsciente, introverti et secret, costume classe et lunettes improbables, statique derrière ses engins, aux aguets du moindre projectile. Toute une époque.

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   (2 chroniques)



- Alan Vega (voix)
- Martin Rev (électronique)


1. Ghost Rider
2. Rocket Usa
3. Cheree
4. Johnny
5. Girl
6. Frankie Teardrop
7. Che
- bonus
8. Cheree (remix)
9. I Remember
10. Keep Your Dreams

1. Mr Ray (live At Cbgb’s 1977)
2. Las Vegas Man (live At Cbgb’s 1977)
3. 96 Tears (live At Cbgb’s 1977)
4. Keep Your Dreams (live At Cbgb’s 1977)
5. I Remember (live At Cbgb’s 1977)
6. Harlem (live At Cbgb’s 1977)
7. 23 Minutes Over Brussels



             



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