Kali UCHIS est bel et bien une artiste de son temps et elle le prouve encore une fois, fin 2020, avec la sortie de son deuxième album studio Sin Miedo (Del Amor y Otros Demonios) dans lequel elle continue d’explorer toutes les facettes de sa créativité en y mélangeant r'n'b et musique latine, mais surtout en convaincant son label de la laisser sortir ce disque principalement chanté en espagnol, un pari passionné et réussi quand on connaît la popularité que rencontrent aujourd’hui les artistes hispanophones comme ROSALIA ou Bad BUNNY.

Pas besoin de chercher très loin les thèmes de cet opus puisque la chanteuse continue de raconter l’amour sous toutes ses formes de la façon honnête et vulnérable qu’on lui connaît. "La Luna Enamorada", morceau d’ouverture aux airs de poème, annonce la couleur de l’album et de son atmosphère contemplative et romanesque. Le rythme en est doux comme un rêve, la production luxuriante et la voix de la chanteuse suave et exquise, pas de doute, on est bien chez Kali ! Le duo avec le chanteur canadien PARTYNEXTDOOR sur "Fue Mejor" fonctionne mais n’est pas autant marquant que d’autres pistes comme "Aguardiente Y Limón", vibrante et sensuelle (I’m your favorite flavor, más dulce que la miel) ou la fabuleuse ballade "Vaya Con Dios", obsédante de profondeur et d’émotions, où la chanteuse brille par son étendue vocale dans un registre soul sur une instrumentation subtile et des paroles divines (Me duelen los oídos de escuchar mentiras/En un mundo tan falso/Digo tu nombre rezando/Tú mi ángel y mi santo).

Les vocalises voluptueuses de Kali glissent sans effort sur la reprise du titre jazzy "Que Te Pedi", de la chanteuse cubaine La LUPE, nous offrant ainsi l’une de ses meilleures performances. Les synthés de "Quiero Sentirme Bien" sont sensuels, puis on bascule au son d'influences dance du titre au rythme tropical "De Nadie", avant de retrouver le beat entre musique latine et trap de "No Eres Tú (Soy Yo)". On a droit encore à l'association ingénieuse de r'n'b, reggaeton et trap latine fusionnée à des éléments hiphop, du single "Aquí Yo Mando" en collaboration avec la rappeuse américaine Rico NASTY, puis au groove ardent de "Te Pongo Mal (Prendelo)" en featuring avec le duo reggaeton portoricain JOWELL & RANDY.

Le tube "Telepatía" fait la part belle au mélange des langues et styles musicaux, du r'n'b à de la pop scintillante sur un rythme latino, en témoignage du talent de Kali dont la voix est tellement bonne qu’elle n’a clairement pas besoin de grosses productions. Ici, une instrumentation simple et relax, un rythme décontracté, un refrain romantique et un groove addictif, un vrai petit trésor à presque 900 millions d’écoutes sur Spotify seulement. Le titre "La Luz (Fin)" utilise des notions plus urbaines mêlées au reggaeton sensuel et à la trap hypnotique du duo sensuel qu'elle forme avec le rappeur portoricain Jhay CORTEZ. Le titre de fin "Ángel Sin Cielo" dévoile encore une fois le style unique de la chanteuse qui livre une interprétation vulnérable et chargée d’émotions (Ángel sin cielo/Hay que hacerlo sin miedo/La vida es una y a nadie le debo).

Franchement, le seul défaut qu’on peut trouver à cet album, c’est sa trop courte durée : 34 minutes, un peu léger alors que c’est si bon ! Sinon, c’est toujours un mix subtil de genres qui défie parfois la catégorisation et une performance vocale d’une délicatesse angélique et d’un niveau toujours plus élevé. On ne peut que saluer la participation de la chanteuse à l’émergence nouvelle de la musique latine dans le paysage musical contemporain, surtout quand c’est fait de manière si unique, pleine de douceur et d’âme. C’est donc sans surprise que le projet est largement acclamé par les critiques et mérite un vrai 4,5.