Après une pause de trois ans, BANKS revient sur le devant de la scène en 2019 avec son troisième album modestement intitulé III et continue de nous enchanter par son univers sombre et chaotique. Discrète, on ne sait pas grand chose de la californienne qui ne met pas trop en avant sa vie perso et préfère laisser sa musique à l’univers intriguant parler d’elle même.

III s’ouvre doucement sur les synthés de "Till Now", une chanson imprévisible et puissante où BANKS fait passer sa rage par des vocalises pleines d’émotions avant de continuer par la claque ultra lourde au beat pulsant "Gimme" et sa mélodie entraînante.

La suite est plus douce mais pas moins perturbante sur les percussions et la guitare de "Contaminated", une chanson plus lente à la production moins fournie qui parle d’un amour toxique. La voix de la chanteuse est de plus en plus distordue sur le beat électro de "Stroke" puis se fait plus aérienne et désillusionnée sur "Godless" et ses synthés ruminants.

La ballade introspective "Sawzall" et ses claviers scintillants laissent assez de place pour que la voix de BANKS s’exprime avec émotion. Le duo "Look What You’re Doing To Me" avec le musicien américain Francis AND THE LIGHTS monte en flèche sur l’envolée des refrains. C’est plein de textures mais la mélodie est presque un peu générique, dommage… Inspirée par un voyage sur l’île aux fleurs d’hibiscus, la chanteuse prolonge l’ambiance rêveuse grâce aux sections de cordes de "Hawaiian Mazes" où on a vite la sensation d’être perdu dans un océan d’émotions.

Trippant et groovy, "Alaska" mixe batterie, piano et basse aux éléments électroniques sur une production qui contraste un peu du reste de l’album, il faudra donc peut-être un peu de temps pour savoir l’apprécier. On retrouve le style si reconnaissable de la chanteuse encore une fois avec les synthés et l’atmosphère un peu morne de "Propaganda".

Les sections de cordes seront plus présentes sur la fin du disque puisqu’on entend la guitare acoustique sur "The Fall", une piste poignante et mélodieuse sur les contrecoups d’une relation. Plus vaporeux, léger et cinématographique, "If We Were Made Of Water" laisse finalement place au titre final "What About Love", ballade où la voix de la chanteuse devient rauque aux côtés des violons.

Si on ne peut jamais deviner ce que ça va donner avec BANKS, on peut bien sûr imaginer à quoi s’attendre : du rnb alternatif parsemé de pop-électro à l’instrumentation presque dérangeante - dans le bon sens. Pas une chanson n’est mauvaise et les harmonies sont tout aussi bonnes que sur ses derniers albums. Avec autant d’intensité, on soupçonne bien que les textes de la chanteuse sont personnels et si ce n’est pas le cas, elle sait s’en approprier les émotions et les livrer avec la vulnérabilité et la force qu’on lui connait. Encore trop méconnue, BANKS n’a clairement pas peur de prendre de risque et son style, un espèce de confessionnal brut, expérimental et chaotique, est toujours au rendez-vous sur III pour nous raconter une fois encore les complexités de l’amour - une réussite.