Adam Grahn. Ce mec a le charisme naturel d'Elvis (et la coupe de cheveux, aussi), la décontraction belliqueuse de Danko Jones et le flegme de Pierce Brosnan. Tout cela en étant tête de gondole du plus grand groupe de rock que la Suède nous ait offert depuis le début des années 2010. Mais tout cela n'est pas un exploit. Pour Adam Grahn, c'est une journée normale. Pourquoi s'étaler ainsi sur le chanteur de ROYAL REPUBLIC ? Car il est plus facile de vous parler de l'espièglerie fantasmagorique du bonhomme que de vous décrire la musique de son groupe. Après tout, ROYAL REPUBLIC fait du rock, un point c'est tout.

Allez, la musique du quartet mérite bien quelques digressions. We Are The Royal, publié en 2011, posait les bases d'un rock énergique, agrémenté ici et là de touches hard, punk, pop et de quelques éléments disco que le groupe développera plus assidument à partir de la deuxième moitié des années 2010. Save The Nation, publié un an après l'acte de naissance précité, poursuit dans une veine similaire, tout en renforçant le côté immédiat et punchy de la musique du groupe. C'est par un riff aux allures d'alarme deux-tons que démarre ce deuxième album. Les guitares sont un crochet du droit, le chant un uppercut. Celui-ci, toujours puissant et mélodique, et par moments presque craché, porté par une envie évidente de proposer une musique classe autant que crasse, aux coins anguleux et aux contours rugueux. La combinaison guitare/basse constitue la colonne vertébrale de cette musique à haute teneur en adrénaline.

C'est ce côté authentique, sans concessions, qui donne à Save The Nation toute sa saveur. Le groupe brode, exacerbe un riff minimaliste, lui adjoint un groove, une tension, des changements de rythme et fait tout un monde d'un rien ("Be My Baby"). La plupart des morceaux, dont la durée est inférieure à trois minutes, dégage ainsi un sentiment d'urgence, comme si la vie du groupe dépendait de sa capacité à nous balancer au visage ces brûlots fulgurants et ravageurs. "Molotov" et sa guitare épileptique, "Punch Drunk Love", plus hédoniste dans l'esprit, le destructeur "This Means War", quasiment thrash/death metal dans son interprétation, qui achève l'album sur un chaos maîtrisé parfaitement savoureux.

A côté de cette folie bariolée, le groupe propose quelques morceaux plus 'construits' et accrocheurs, à l'image de "Everybody Wants to Be an Astronaut" dont les sifflements introduisent un titre hard-rock carré au refrain savoureux et immédiat, qui hisse ce morceau au niveau du tube "Full Steam Spacemachine" du premier album. Plus loin, "Sailing Man" est un autre grand moment plus élaboré, dont les ambiances sombres et changements de rythme font une pièce-maîtresse de cet album varié. Et il serait de bon ton de mentionner le grivois "Addictive," mid-tempo à l'humour grivois contagieux.

Tout cela débouche ainsi sur un deuxième album dont l'audace n'a d'égale que l'inventivité et la décontraction communicative dont font preuve les quatre Suédois. Les guitares, telles un caméléon, se baladent entre les styles et créent une musique rock, au sens très large, qui nous donne l'impression que ces amis d'enfance étaient nés pour dégourdir et enchanter nos oreilles. Un excellent album, dont je ne saurais assez chaudement vous recommander l'acquisition dans sa version limitée, agrémentée de deux bonus particulièrement savoureux, "Vicious" et "I Don't Wanna Go Out".