Ce n’est rien de dire combien l’arrivée de Gavin Harrison, prodigieux batteur en provenance de PORCUPINE TREE, a apporté un coup de boost bienvenu à THE PINEAPPLE THIEF. Simple musicien invité à l’époque, Gavin avait déjà posé sa patte classieuse sur l’excellent Your Wilderness sorti en 2016. Cette fois, c’est en tant que membre à part entière qu’il participe deux ans plus tard à ce Dissolution qui réussit l’exploit de maintenir l’excellent niveau atteint par l’opus précédent. L’association avec Bruce Soord fonctionne en effet à merveille, tant dans l’interprétation des titres qu’au niveau de la composition, puisque sept des neuf titres de l’opus sont composés par les deux hommes, souvent au cours de longues jam sessions qui rappellent la méthode de travail utilisée avec Steven WILSON chez les porcs-épics.

Et le résultat est somptueux : le groupe réussit la parfaite alliance entre la séduction pop immédiate et la richesse du rock-progressif, tout en conservant sa classe naturelle et l’émotion générée par le chant habité et intense de son leader. L’inspiration générale est toutefois plus noire que sur l’opus précédent : la désagrégation des relations humaines dans un monde hyper connecté est au coeur des thèmes abordés, comme l’illustre la jolie pochette en noir et blanc.
Sur les neuf titres qui nous sont proposés, deux sont très courts et chantés quasi a capella par Bruce : il s’agit de l’intro "Not Naming Any name", où seul le piano et quelques chœurs viennent appuyer le chant mélancolique, et de "Pilar Of Salt" sur lequel la guitare folk soutient la voix de Bruce rêveuse et nostalgique qui s’impose superbement. Ces deux bijoux mélodiques sont parfaitement prolongés par des titres comme "Try As I Might", qui installe une atmosphère un peu martiale avant de distiller un superbe refrain et une belle ampleur instrumentale, ou "Uncovering Your Tracks" qui possède un peu les mêmes qualités et un refrain une nouvelle fois bien addictif. "All That You’ve Got" est un peu plus pêchu à la base, avec quelques passages légèrement prog-metal que n’aurait pas renié PORCUPINE TREE, le tout avec une qualité mélodique imparable. "Far Below" s’inscrit un peu dans le même registre avec une intro assez forte et marquée rythmiquement avant de superbes développements qui emportent le titre vers de belles intensités et hauteurs. Sur "Shed A Light", Bruce nous offre une intro intime avec sa guitare, nous permettant de profiter de sa jolie voix, avant d’être superbement rejoint par le groupe et les magnifiques sonorités de toms de Gavin, avant une montée en puissance très progressive et floydienne.
Il nous reste à commenter les deux meilleurs titres d’un album qui n’en manque pas. "Threatening War" est une merveille avec son intro intime gorgée d’émotion et une forte montée d'intensité qui nous accompagne vers un refrain splendide et de magnifiques développements, guitare en avant, pour un rendu authentiquement progressif. "White Mist" enfin est la pièce de résistance de l’album. Le long de ses 11’05, cet authentique titre progressif nous plonge dans une ambiance d’abord mélancolique et sombre, puis de plus en plus lumineuse portée par une nouvelle masterclass de l’incontournable Gavin Harrison derrière sa batterie, parfaitement rejoint par la basse de John Sykes, et la classe de tous leurs compères.

Pas la peine d’enfoncer davantage le clou : cet album est superbe, gorgé de classe, de subtilité et porté par des mélodies imparables brillamment interprétées par des musiciens d’un niveau et d’une musicalité sans faille. THE PINAPPLE THIEF semble porter le bon goût en étendard tant sa démarche et ses réalisations sont irréprochables. Pourvu que ça dure !

Note réelle 4,5 portée à 5 pour la beauté de l’ensemble.