CORELEONI semble enfin avoir achevé sa mue. En effet, la sortie de l'album III courant 2022 nous avait rendus témoins de plusieurs évolutions importantes au sein de la formation helvétique : le départ du chanteur-mercenaire Ronnie Romero tout d'abord, (conclusion naturelle à la multiplication jusqu'à la nausée des projets auxquels participe le Colombien) et son remplacement par un inconnu d'origine albanaise, Eugent Bushpepa. Un changement de répertoire ensuite, puisqu'après deux albums consacrés à une révision des titres issus du vieux répertoire de GOTTHARD, la formation a décidé de proposer des compositions originales, ce matériel neuf ne parvenant malgré tout pas à se hisser au niveau du hard rock à la fois percutant et toujours mélodique du groupe principal de Leo Leoni.

La sortie de ce live est finalement la meilleure idée que pouvoir avoir CORELEONI pour prolonger le plaisir, puisque c'est bien dans cet environnement en public que Leoni, désireux de donner une vie nouvelle à certains titres oubliés ou mésestimés issus du répertoire de GOTTHARD, parvient à donner une véritable raison d'être à son projet. Capté en mars 2022 à l'occasion de la tournée Rock Generation Tour, le concert ici présenté n'a en effet pas grand-chose à voir avec les prestations plus contrôlées, finalement moins foncièrement hard rock, données par GOTTHARD depuis plusieurs années. Des 13 morceaux ici présentés (excluons une courte introduction reprenant le thème du film Le Parrain, 12 sont en effet issus du répertoire de GOTTHARD et se réfèrent à l'époque glorieuse du regretté chanteur Steve Lee. Pour la plupart revisités en studio sur les deux premiers albums de CORELEONI, ces titres nous donnent à redécouvrir ces pépites hard rock qui ont permis au groupe de bâtir sa belle réputation. Eugent Bushpepa, loin d'être un simple faire-valoir, habite ces morceaux et les interprètes à la perfection, modulant à l'envi sa voix puissante, et n'hésite pas à partir dans des envolées qui laisseraient admiratif le Steve Lee. Ce chanteur propose une prestation impeccable, et le reste du groupe est à l'avenant. Leo Leoni, espiègle, dégaine sa talk-box à plusieurs reprises et notamment sur "Mountain Mama", jusqu'ici passé à travers le tamis des morceaux revisités sous le label CORELEONI. "All We Are", tiré du plus récent et indispensable Lipservice (2005), fait également figure de "nouveauté" relative dans la setlist, au milieu de classiques interprétés avec un savoir-faire particulièrement remarquable ("Firedance", "Higher", la ballade "Angel").

Comme pour donner autre chose à CORELEONI qu'un air uniquement passéiste, le groupe décide de balancer deux compositions originales dans la setlist, la mélodique "Let Life Begin Tonight" au refrain savoureux et le résolument rock'n'roll "Purple Dynamite" qui trouvent leur place aux forceps dans ce programme qui nous donne à goûter, par procuration, à la flamboyance d'une époque révolue. Il y a néanmoins ici de la vie et du plaisir. Plutôt que de désavouer le répertoire récent de GOTTHARD en réenregistrant sans ses camarades les vieux morceaux de son répertoire, Leo Leoni aurait du faire de son projet annexe un groupe live uniquement, puisque c'est de la scène qu'il tire sa raison d'être. Une belle idée donc que ce live qui nous permet de savourer la beauté de ces titres emblématiques ou plus confidentiels du GOTTHARD première période. Les originaux gardent, néanmoins, naturellement notre préférence.

3,5/5