En 2007, à peine sorti d'une période de marasme, Simon COLLINS se rapproche à nouveau de son père indirectement puisqu'il publie une reprise de "Keep It Dark", extraite de l'album Abacab (1981) de GENESIS. Version fidèle mais plus grasse, on s'en doute, plutôt plaisante, réalisée avec son ami claviériste Dave Kerzner. C'est à ce moment-là qu'il rencontre Kevin Churko, Canadien producteur du groupe de metal DISTURBED mais également d'Ozzy OSBOURNE, PAPA ROACH. Bref, un spécialiste de l'emballage rock dur et plus si affinités.

Ensemble, avec Kerzner et le guitariste Kelly Nordstrom que nous avons déjà croisé sur un titre du deuxième album de COLLINS en 2005, ils sont les principaux responsables de son number three, nommé U-Catastrophe et publié en 2008. Pour ce disque écrit majoritairement seul ou avec Churko, le chanteur-batteur s'inspire de la période noire qu'il a traversée au niveau sentimental. Le résultat veut que les morceaux prennent une allure de guerre faisant rage avec quelques accalmies, parfois carrément de conflit intergalactique.

Rien que le début du titre éponyme en atteste, avec sa production de toute évidence sur-mixée (mais pour le plus grand bonheur de ceux qui ont encore de nos jours des enceintes hi-fi à faire chauffer). Elle fait se superposer et succéder les vagues de synthés et guitares massives, un effet oriental dérangé, une rythmique hard lorgnant bien vers le (thrash) metal et le chant de Simon qui s'est endurci. Un titre rageur et excellent suivi de près par "All I've Left to Loose", plus lent mais pas moins fort en la matière, avec un son de basse metallique et un refrain pop heavy.

"Disappearing" enchaîne en toute logique avec un slow tempo dérangé qui se contient difficilement, une hargne qui ressort sur les refrains mais également une identité cosmique renforcée dans les ambiances. On peut lui adjoindre le plus lointain "Between I & E" qui montre lui aussi un goût pour les refrains bien faits, d'essence pop ciselée sous leur conditionnement gras, avec un caractère épique qui fait tout le sel de l'album. Alors que "Eco" passe pour un hommage moderne au LED ZEPPELIN de "Kashmir", rien que par son jeu sur les rythmiques, on ne peut résister au plaisir de planer sur "The Good Son", promenade viscérale écorchée mais aussi interstellaire, de se prendre dans la figure le up-tempo "Go (Only One I Know)" des plus mordants, efficace avec cela.

U-Catastrophe n'obtiendra peut-être pas la grâce des hardos-metalleux en raison d'une présence de la pop toujours forte, et notamment lors de ces fameuses accalmies. "Powerless" et son ton 'à la U2' demeurent très bons dans le genre, mais le disque sombre connaît il est vrai une première césure avec "Unconditional", sucrerie sautillante et légère. Pour refaire un parallèle avec GENESIS, c'est un peu le "That's All" de Simon COLLINS, son équivalent mais après quatre ou cinq "Mama" d'affilée. Le grand public américain la favorise plus que toute autre sur ce disque (classée top 30), et elle pourrait donner une image biaisée, tout comme la non moins estimable ballade r'n'b suave "Us (Love Transcends)", à la fois simplement belle et parcourue de sons 'dark' tout de même.

Allez, maintenant que nous avons fait le tour et mentionné suffisamment le groupe qui a révélé un musicien incroyable dont 'fiston' Simon a vraiment de qui tenir, ainsi que le révèle à lui seul le slow mentionné dans la phrase précédente, parlons des deux 'clous' de l'opus. "The Big Bang", un instrumental qui porte bien son nom, use d'un début en rimshot (coups sur les bords des fûts) de batterie rapide, laisse paraître une nappe de Mellotron dans le maelstrom sonore puis cela déferle grâce au martèlement tribal plus que généreux de Phil COLLINS en personne (quoique souffrant déjà bien des mains en ces années-là) et que seconde son propre fils à la batterie. Un vrai 'drum duet' comme GENESIS en proposait durant les concerts et qui n'oublie pas (merci !) la présence des autres instruments, des programmations qui donnent à ce tour de force explosif, non dénué de groove, un mélange de metal et de rock progressif classique. Après tout, la partie pont-relâche au milieu, avec ses nappes et sa voix robotique, n'est pas sans rappeler certains titres de fin des 70's de Steve HACKETT en solo.

Puisqu'on n'en est pas à un parallèle près, qui trouve-t-on d'ailleurs, après cette confrontation percussive de l'espace qui interpellerait même un fan de SLIPKNOT ? Master HACKETT himself, invité pour un magnifique solo de guitare 'violon' et garni de tapping comme de feedbacks, tout ce qu'il maîtrise et qui pousse à le reconnaître sans mal, au milieu de "Fast Forward the Future". Simon COLLINS, dont c'est le titre sans doute le plus proche de ses premières productions mais avec les meilleurs éléments de U-Catastrophe, a réussi à réunir, même indirectement, deux membres du GENESIS classique sur son album. Ce n'est pas rien, avant la qualité musicale indéniable.

Le voyage ultime, hanté, épique bien sûr termine donc ce disque formidable avec dignité. Cela mérite la note maximale, chose contestable sûrement à cause des moments pop 'légers' qui équilibrent à leur façon les plus 'heavy', mais c'est justement la bonne force ici, plus que pour les expériences prog plus intègres (et donc attendues) à venir.