Pas facile à trouver, celui-ci, et pour cause ! En plein creux de carrière pour SOLDAT LOUIS, Renaud DETRESSAN, dit Gary Wicknam, reprend son premier nom et, pour la première fois depuis 1985, un bout de route en solo. La Couleur du Vent (2005) est plus ou moins bien distribué par une coalition de différents labels, et cette production finira par se perdre dans les couloirs du temps, comme le suivant Airs de Famille (2009) où l'intéressé reprend son aïeul Théodore BOTREL.

Pochette assez classe pour notre ami qui range son béret de marin et ses cordages pour un moment, et en accord quelque part avec le choix de réalisation, plutôt intimiste et à dominante acoustique. DETRESSAN signe la totalité des titres seul ou proche de l'être. L'album a été enregistré à l'hôtel-auberge du Cheval Blanc, à Priziac, aux confins du pays lorientais d'où SOLDAT LOUIS tient ses origines. D'ailleurs, un certain Serge Danet tient ici quelques guitares.

De toute manière, avec Christophe Sonniec à la batterie, Hervé Le Guillou aux basses et Jean-Paul Barrière aux claviers, on dirait vraiment presque un album qui aurait éclos en même temps que Bienvenue à Bord (1999), vu que c'est pratiquement la même équipe. Seul le guitariste Sylvère Morisson ajoute sa partition, arrangeant même un titre, et foin de cornemuses ici ; en revanche, la clarinette de Bernard Le Dréau (plutôt saxophoniste ailleurs) résonne sur "Lamartine".

Nous nous laissons surprendre par cette folk jazzy toute en poésie habile dédiée à un maître qui s'est situé en proue de l'impressionnisme, à une époque où les jeunes filles se baignaient "jusqu'aux genoux et pas plus haut", des cartes postales de "vacances anglaises dinardaises". Une suite de belles images dans un quotidien morne, celui du narrateur.

Dans la même veine, lui-même propose "Que la Vie Me Pardonne", lézardant à un comptoir de café sur une mélodie monotone, avec un fond pop country et un très beau piano électrique. "Scott Joplin", bien dosé en séduction, retient également l'attention, avec un texte un peu plus osé, souligné comme il se doit pas un piano bastringue tout ce qu'il y a de plus traditionnel cette fois.

Avec "Si la Réponse Est Dans le Céleste", DETRESSAN nous donne son point de vue sur la religion, le pouvoir déjà, avec plus de finesse que chez SOLDAT LOUIS mais également un résultat moins mémorable ma lgré une belle pop-folk aérienne, la mélodie étant plus tarabiscotée. Avec "La Couleur du Vent" et "Qu'Avons-Nous Fait ?", chansons de séparation amoureuse, usent d'un registre bien éloigné du reste avec leurs nappes de synthé et leurs vagues programmées, mais elles demeurent appréciables. "Libre Avant Tout" est pétrie de road-movie à la pedal-steel guitare et aux références à la contreculture américaine, autour d'une jeunesse et d'illusions perdues. Question nostalgie, le réarrangement de "On Est Comme On Est" se pose là même si bien peu profond ni inoubliable, pourtant résultant d'un duo sympa avec Patricia Meignan.

La perle cachée du disque est "Cette Fille Qu'on Aimait Bien", avec son picking délicat et crépusculaire, cet amour dense entre artistes-peintres/musiciens et là encore, un air impressionniste. Une parenthèse qui transporte, tout comme le pourtant répétitif "Six Pieds Sous Terre", racontée du point de vue d'un cadavre qu'on vient d'enterrer et qui observe, attendant qu'on vienne le chercher pour l'amener à une deuxième voie (montant ou descendant). Déjà que le texte est bien tourné, comme à l'accoutumée, il y a en plus cette envie de surexploiter le mode lydicn aka 'diabolus'. L'album s'écoute donc avec un certain plaisir, sans donner envie d'y revenir trop souvent ; la faute à des mélodies et interprétations de DETRESSAN parfois plus compensées que réelles, à un son chaud oui mais approximatif, au manque de titres forts quand d'aucuns ici peuvent tourner en rond, une certaine disparité au sein des chansons même... Mais rien que pour les histoires qu'il raconte, le second de SOLDAT LOUIS, on'a pas fini (heureusement) de nous abreuver de ces idées !