Mais peut-on proposer pochette plus laide et plus cliché ? En 1994, les Américains de MEPHISTO WALZ ont choisi avec un goût très personnel de ne pas faire dans la demi-mesure. Le Goth est forcément triste et il aime se promener avec une tête d'enterrement dans les cimetières. C'est sans aucun doute l'idée que se fait le grand public de ce mouvement et cette illustration ne rend pas vraiment hommage à son contenu et à la qualité de ce groupe. Il faut encore une fois aller au-delà de ces caricatures qui semblent épouser à jamais cette sphère. Le projet emmené par le talentueux Bari-Bari vaut assurément mieux que ces couleurs disgracieuses qui piquent la rétine. The Eternal Deep le prouve globalement sans difficulté majeure.

MEPHISTO WALZ nous présente une compilation-album. Une compilation-album, kezaco ? C'est propre au Goth qui aurait bu un peu trop d'absinthe ? Non, en fait, c'est tout simple. La quasi totalité des titres exposés ici existaient déjà avant The Eternal Deep. Ils sont en effet issus soit du premier E.P Mephisto Walz* (1986) lorsque l'Allemand Jörg Westermann était derrière le micro, soit de la compilation Crocosomia ** (1992) qui a vu l'heureuse arrivée de la géniale Christianna au chant. Mais il y a quand même une petite nouveauté. On ne connaît pas la raison de cette démarche mais la totalité de ces titres ont été complètement retravaillés et réinterprétés. Le résultat, c'est cette galette noire de death rock américain de belle tenue.

Il en résulte dès lors un caractère quelque peu hétérogène car MEPHISTO WALZ propose des titres composés entre 1986 et 1994. Ce sentiment est encore plus accentué par la présence de trois reprises inégales. Si celles correctes de "I Wanna Be Your Dog" des STOOGES et "Painted Black" des STONES n'apportent pas grand-chose sous le soleil noir de Californie, celle de "Silent Thunder" de CHRISTIAN DEATH a une autre saveur. C'est ici que l'on se rend compte de la place centrale tenue par Christianna. Son timbre très particulier, moins désespéré que celui initial de Westermann, offre un salutaire contrepoint aux ambiances plombantes et grinçantes développées avec délectation par le patient Bari-Bari.

C'est l'occasion aussi de (re) découvrir certains titres qui sont devenus des classiques du groupe et plus généralement de la scène gothique. En effet sont présents ici le définitif "Drowning, Like the Garden" et l'étouffant "Alle In Asche" avec le charmant accent de Christianna qui n'a assurément pas fait Allemand première langue. Tout l'esprit death rock de la côte ouest réside dans ces quelques minutes. Une basse lourde, des guitares tranchantes et incisives à souhait, une batterie étouffée et la voix de l'Américaine qui enveloppe le tout de sa sensualité vénéneuse. Il est bien difficile d'y résister ! MEPHISTO WALZ se distingue de ses petits camarades par ce sens mélodique toujours bien marqué comme le soulignent les pourtant sombres "Tangia" et "Dear Familiar Phantoms".

The Eternal Deep ne fait pas exception à la première partie de la discographie du projet (2004) qui est la plus intéressante. Les mélodies sont diablement efficaces. Écoutez-moi plutôt la rythmique obsédante de "Der Sack", même si Christianna n'a définitivement pas fait Allemand première langue. Même si les ambiances sont moins poisseuses que celles pratiquées par le culte CHRISTIAN DEATH, certains titres baignent bien dans ces mêmes remous boueux. L'éponyme et "Porcelain God" sont bien de cette trempe. La sueur froide vous colle à la peau. La basse rampante accompagne ces ambiances malsaines à souhait et il faut bien avouer que ces atmosphères bien qu'inquiétantes sont des plus attirantes (le superbe "Aborigine Requiem").

Même si le caractère quelque peu décousu de l'ensemble peut naturellement dérouter, il n'en demeure pas moins que The Eternal Deep est une pertinente porte d'entrée pour découvrir le monde si particulier de MEPHISTO WALZ. Un univers sombrement lumineux qui n'attend en définitive que vous !

Note réelle : 3,5/5