Je me suis maintes fois demandé ce qui pouvait bien trotter dans la chère petite tête blonde de Hans Diener le leader de ce projet néerlandais. En effet, était-ce si simple pour lui de voir constamment THE ESSENCE comparé à THE CURE ? Naturellement, seul Diener a la réponse mais que ceci a du être fatiguant et frustrant. C'est assurément une situation délicate que de ne vivre artistiquement qu'à travers l'ombre d'un Autre, et quel Autre. Et pourtant, pour peu que ceci est un quelconque intérêt, les choses ne sont pourtant pas si évidentes, si nettes. Les Néerlandais ne sont pas que des ersatz ou des suiveurs opportunistes.

Les Bataves à travers leur discrète discographie de cinq albums s'inscrivent instinctivement dans le courant new-wave à tendance froide. Avec le recul, là encore, on se rend pourtant compte que Nothing Lasts Forever par exemple ne sonne quasiment comme rien d'autre. Le trio comme un enfant boudeur fait ses petites choses dans son coin sans ne devoir rien à personne et ceci lui réussit souvent assez bien. Pour un album sorti en 1991, il ne se rattache à rien et apparaît dès lors comme hors du temps. Ce n'est ni un bien, ni un mal. Le groupe transporte l'auditeur vers des espaces où la mode n'a pas droit de cité.

Je ne vais pas m'inscrire en faux contre moi-même, mais je dois toutefois concéder qu'ici et là des effluves qui ne seraient pas reniés par Robert SMITH se présentent à nous. Ce sont incontestablement les claviers très présents qui donnent cette patine (le pesant «"Separation") et, c'est vrai, Disintegration n'est en effet pas si loin. Il en résulte un album atmosphérique où les ambiances cotonneuses avancent en douceur ("September"). Elles se font aussi lumineuses à l'instar du très beau "All is Empty", un titre qui malgré ses sept minutes passe comme une lettre à la poste notamment grâce à la voix toujours émouvante de son leader. Les sanglots contenus ne sont jamais bien éloignés.

Nothing Lasts Forever ne porte pas de nez rouge, c'est certain, mais cette mélancolie initiale s'est faite avec le temps moins réfrigérante et moins évidente. Elle esquisse dès lors volontiers des contours Pop plus marqués comme le souligne "Never Let Go" et ses claviers entraînants ou "Irresistible" qui se voit conforté par une guitare bien bavarde pour le genre abordé. Les Néerlandais enchaînent donc des titres qui ont pour seul fil conducteur le dictionnaire des sentiments contrariés ("Out Of Grace"). Le naturel revient parfois au galop. Ainsi avec le glacé "Thirtysecondsong" et sa guitare triste, l'auditeur se drape de givre mais le trio est passé à autre chose. Les années 80 sont dorénavant dans son dos.

Nothing Lasts Forever est un bon album de Pop. Ces climats s'ils ne sont pas diablement changeants ne sont pas pour autant sans saveur. Avec THE ESSENCE, vous contemplez un paysage calme aux teintes pastel, calme comme un jour qui s'étire en douceur sans susciter toutefois d'ennui.

Note réelle: 3,5/5