THE ESSENCE comme THE CURE. Voici le sentiment tenace qui colle comme un chewing-gum sous le pied des Néerlandais. Il est en effet bien difficile à l'écoute de toute la discographie de ce projet emmené depuis toujours par Hans Diener de ne pas penser aux Anglais. Purity, le premier album sorti en 1985, ne fait pas exception. Il est même celui qui se rapproche le plus des ambiances cold wave chères à Robert SMITH. Soyons honnêtes et n'y allons pas par quatre chemins. Ce trio même en 2020 demeure toujours un mystère. Si un ersatz même plus ou moins digne d’intérêt vous laisse froid, vous pouvez passer votre chemin. Si les notions de curiosité et de plaisir ne vous sont pas étrangères, Purity mérite sans doute que vous vous y attardiez.

Faire un pas dans l'univers des ESSENCE, c'est à coup sûr essayer de relever un défi de tous les instants. Et quel défi de taille ! En effet, le but de ce jeu musical est de ne pas être tenté de comptabiliser les similitudes ou différences existant, c'est selon, entre le Batave et le banlieusard londonien. C'est loin d'être évident, même avec une profonde bonne volonté. Il y a d'abord cette voix. Objectivement, on croirait entendre des inédits de SMITH. Diener possède ce même timbre adolescent, si caractéristique, comme autant de sanglots naissants qui restent coincés au fond de la gorge. Ici comme pour les autres albums d'ailleurs, il n'est pas question de lointains échos mais d'une persistante similitude des plus troublantes. Un exemple parfois suffit. L'excellemment pop et efficace « The Cat » retranscrit à merveille cette sensation. Les chats amoureux ne viendront pas cette fois-ci à notre rencontre, mais ces trois minutes enlevées rappellent sans conteste les prestigieux aînés d'outre-Manche.

Faire abstraction, encore et toujours. Les Néerlandais, et il faut bien leur reconnaître ceci, sont loin cependant d'être manchots pour élaborer de belles ambiances mélodiques qui baignent dans les eaux tourmentées d'une pop froide. Ces vagues légèrement noires se teintent volontiers d'une douce lumière, cette dernière donnant à l'ensemble une atmosphère moins lourde et crépusculaire qui est la marque d'une cold wave classique. Les coutumiers des CURE pourront parfois évoquer les ombres de Faith s'ils recherchent la petite bébête. Ce n'est pas l'introductif « The Last Preach » ou le très bon « The Waving Girl » qui leur donneront tort d'ailleurs. Diener expose des tourments intérieurs identiques sur fond de guitare cristalline et rythmique robotique trempée dans un bain d'éther, smithiennes en diable.

Le reste, même s'il demeure ancré dans son époque so 80's, n'est pas pour autant sans saveur. C'est lorsque les ESSENCE décident de moins s'inspirer (qui a dit plagié?) de qui-vous-savez qu'ils se dévoilent comme un projet nettement plus crédible. Les Néerlandais se font alors les dépositaires d'ambiances aux textures quasiment pop du plus bel effet. C'est la guitare qui ici se taille sans conteste la part du lion. En mettant de côté une mélancolie qu'on pourrait ressentir comme téléphonée, le combo distille avec pertinence tourbillons carillonnants à l'image des légers « A Reflected Dream » et « Endless Lake » ou plus incisifs comme le souligne « Never Mine » et sa batterie de fer. Purity ne craint pas les échos à tout va et la basse sourde qui lui conférent une attraction moins puérile que de prime abord. L'écoute sans œillères assurément.

Purity pourrait définitivement souffrir de ces incessants va et vient entre son monde et celui des CURE. Avec un peu de bonne foi, on passe outre et s'offre alors à nous un album de bonne facture irriguée par une belle pop mélodiquement glacée.