Ah ben ça! En voilà un disque incongru, et mal classé qui plus est.

D’abord, le nom KONGAS ne fait absolument plus sens. L’afro-rock du véritable KONGAS, qui subsistait sous forme de traces sur Africanism (1977), disparaît pour de bon. Ensuite et surtout: il n’y a pas la moindre composition originale sur ce disque ! Ce second album sans titre est tout bonnement une collection d’auto-reprises, raison pour laquelle il faut le classer parmi les 'remixes / arrangements'. Cependant, cet album est fondamentalement différent du Anikana-O de 1978 qui consistait en un simple remix de morceaux issus du premier album de 1974. "Rocket In The Pocket" (The Golden Touch, 1978) et "Tattoo Woman" (Africanism, 1977) sont intégralement réenregistrés. Et attention au piège : "The Fun Cry" n’est pas un inédit contrairement à ce que son titre le suggère, mais une réorchestration de "Look For Love" (The Golden Touch, 1978). Quant à "The Time Is Right", on peut allègrement s’en passer puisqu’il s’agit du copié-collé d’un morceau du second album de REVELACIÓN, Don’t Give A Damn (1979).

On peut légitimement se poser la question de l’intérêt de ces réenregistrements policés, gommant les fantaisies de synthétiseurs et de percussions qui sont une part essentielle de la musique de CERRONE. Sur "Rocket In The Pocket", l’introduction excentrique, le séquençage électronique et les délires de Jimmy Page ont été troqués pour des soli de saxophone et de piano et un chant plus forcé mais qui ne manque pas de charisme. De même, "The Fun Cry" se distingue de son modèle "Look For Love" de par une révision des pistes de synthétiseurs (de très belles séquences en introduction, et des soli supplémentaires). Quant à "Tattoo Woman", il s’en trouve véritablement transformé. Le rythme est profondément remanié, plus rapide et complètement débarrassé des percussions en dehors de la batterie, ce qui est contradictoire avec la conception même du morceau d’origine qui misait sur le groove et non sur la seule pulsation disco. L’orchestration est chamboulée : on ne peut pas rater l’ajout des cordes, absentes de la première version, et la modification de la partition des cuivres. Globalement, on peut constater un son d’ensemble plus rond que sur Don’t Give A Damn et Angelina.

Il reste enfin "Why Can’t We Live Together", publié en maxi-single en 1982 sous le nom KONGAS avec "The Fun Cry" en face B. Il s’agit de la reprise d’une composition du chanteur de blue-eyed soul Timmy THOMAS, mais on n’en retrouve pas moins la patte musicale de CERRONE. Un morceau sympathique, mélangeant les styles de KONGAS (pour l’orgue électrique) et du CERRONE du début des années 1980 (pour les boîtes à rythmes), mais trop redondant; il n‘y a aucune évolution le long de ces huit minutes. Si vous voulez vous procurer ce morceau en format physique, mieux vaut rechercher la réédition CD d’Africanism, qui propose ces deux morceaux en bonus, plutôt que le maxi original à la pochette vraiment abominable. Oui alors d’habitude j’abuse souvent d’hyperboles pour décrier certaines pochettes kitsch, mais là je suis sérieux. Évitez cette édition, ou alors jetez la pochette.

Enregistré de juillet à septembre 1979 à la suite de Angelina, ce dernier album estampillé KONGAS est donc bien plus intéressant qu’il n’en a l’air. L’absence de compositions inédites est compensée par des versions vraiment retravaillées de morceaux préexistants, tout comme pour le double album In Concert de CERRONE, d’ailleurs. Ce disque n’a été réédité que partiellement, via la compilation The Best Of Kongas de 2014 éditée par Because Music, qu’il vaut mieux éviter puisque mélangeant abruptement et sans cohérence des directions musicales n’ayant rien à voir les unes avec les autres. Et ce machin est sorti en double vinyle en plus, quelle blague!