Les Ramoneurs de Menhirs – Dans an Diaoul

Un lecteur du site me reprochait, il y a quelques temps, de ne pas reconnaître l’existence d’une quelconque continuité culturelle celtique. Restant sur mes positions, je le répète : si nous sommes tous des descendants des peuples celtiques qui se sont établis en Europe il y a de ça quelques centaines de siècles, aucun élément concret ne nous permet de connaître leurs rites, leurs coutumes, leurs instruments, etc. Loin d’être une critique, il s’agit simplement d’un constat : comment un groupe, un artiste, peut-il se revendiquer d’une mouvance musicale celtique alors que nous ne connaissons strictement rien des musiques pratiquées par ces peuples !

Ceci étant dit, la définition du « rock celtique » est très claire pour la majorité de nos contemporains : une guitare électrique, une batterie, une basse, un chanteur, et quelques instruments traditionnels (cornemuse, bombarde, etc) jouant la plupart du temps un simple rôle décoratif, mais constituant parfois l’essence-même et la structure des morceaux.

Les instruments traditionnels utilisés par les RAMONEURS DE MENHIRS (bombarde et biniou) sont à ranger dans la deuxième catégorie. Auteurs de deux albums, le guitariste ancien BERURIER NOIR LORN, le chanteur MAURICE JOUANNO, le joueur de biniou RICHARD BEVILLON et de bombarde ERIC GORCE ont trouvé leur voie dans la pratique d’un punk rock breton et bretonnant, constitué majoritairement de reprises de morceaux traditionnels de la péninsule armoricaine.

La guitare reléguée à un « simple » rôle rythmique, l’ossature des morceaux est soutenue par les deux instruments traditionnels cités plus haut, qui donnent il est vrai au groupe une teinte celtique bien plus prononcée que celle de ses contemporains (les BOOZE BROTHERS en tête). Et si la voix de MAURICE JOUANNO, monocorde et irritante, est sans doute un des points faibles majeurs du combo, il faut bien avouer qu’elle sert à merveille des traditionnels bretons qui retrouvent ici une seconde jeunesse (et après tout, peut-on considérer les SŒURS GOADEC comme des chanteuses ou plutôt des incantatrices, pour lesquels la voix ne constituait pas un but mais un moyen ?). Toujours est-il que l’on prend grand plaisir a redécouvrir un patrimoine ainsi rénové, et donc la relecture punk fait fureur en concert (les RAMONEURS DE MENHIRS sont un groupe très actif scéniquement).

Mais si les reprises constituent la majorité de l’opus, il ne faudrait pas taire pour autant la présence de quelques compositions originales (BellARB, Nomades, Captain Kirk). Des titres punk sans prétention aucune mais d’une efficacité redoutable, servis magnifiquement par les instrumentistes de talent que sont GORCE et BEVILLON. L’énervé Nomades en tête, les RAMONEURS DE MENHIRS perpétuent l’existence d’un punk à la française qui ne s’est pas éteint après la disparition des BERURIERS NOIRS et LUDWIG VON 88. En témoigne cette reprise actualisée de Vive le Feu des Bérus, avant-dernier titre d’un album surprenant.

Si les mélanges rock/musique celtique sont légions depuis maintenant une décennie, ils faut reconnaître que les RAMONEURS DE MENHIRS sortent véritablement du lot. Expérimentés et motivés, les quatre membres du groupe nous proposent un album dont tout fan de punk rock bien fait et tout amateur de musique traditionnelle bretonne se délectera. Un album ambivalent pour un groupe très convaincant !