Avec Post, BJÖRK franchit une étape importante dans sa carrière. Partie d’une musique plus connotée house, elle entame une mue avec ce deuxième album qui lui permettra de s’exprimer avec tout son potentiel sur son chef d’œuvre : Homogenic.
Mais si Post est plus abouti que Debut, il possède les mêmes intentions. L’artiste islandaise a toujours ce souci de maitriser les contrastes et de synthétiser plusieurs courants.
« Army of Me » est une introduction parfaite et surprenante. La voix de BJÖRK se pose sur ce morceau apocalyptique tandis un synthé gras et pesant l’accompagne tout le long. Le contraste entre ce titre et « Hyperballad » est important mais il ne choque pas. Elle a l’art de puiser sa force dans diverses influences sans que ses disques ne tombent dans le cliché de l’album catalogue.

Les ingrédients de Debut sont donc plus ou moins les mêmes, mais s’ils sont utilisés différemment. La musique laisse tomber les vertus dansantes du premier album et prend des tournures plus pop sans que l’électronique ne soit abandonné, au contraire, elle reste encore une force non négligeable de sa musique. L’équilibre entre sons synthétiques et acoustiques existe toujours. Il permet encore d’accomplir de beaux mélanges entre envolées mélodiques impressionnantes et ambiance quasi-cybernétique (« The Modern Things »). Les violons de « Isobel » ou la trompette de « I Miss You » apporte de l’humanité dans cet univers robotique et pourtant, chargé d’émotion, grâce à la voix charismatique et unique de BJÖRK.

Post n’est pas seulement une transition entre son enfance et sa phase plus adulte (théorie qui n’est pas de moi, mais qui me semble tellement juste que je la reprends à mon compte sans scrupules), elle expose déjà une des visions futures de sa carrière. Avec cette volonté de s’orienter vers une musique de plus en plus lente et introspective comme sur le trip hop de « Possibly Maybe ». « Headphones » est sûrement la pièce la plus ambitieuse du lot, puisqu’elle explore une voie qu’on retrouvera sur Vespertine, c’est-à-dire une musique plus abstraite et ambiancée. C’est aussi hélas, le seul titre dispensable, car malgré la participation de TRICKY à la production, ce morceau est trop long et finit par être monotone. La démarche est appréciable, mais le résultat est décevant.

Malgré cette outro, Post ne possède aucune faute de goût, ni même de longueurs. Même les morceaux les plus dépouillés tels que « You've Been Flirting Again » (sorte d’introduction pour le grand « Isobel ») et « Cover Me » ne semble pas déplacés et renforce l’idée que BJÖRK est bien une artiste à part.
Il reste à parler de « It's Oh So Quiet », parfaite carte de visite pour faire découvrir cette femme aux oreilles du plus grand nombre, mais insuffisante pour se faire une idée de son univers. Une très bonne reprise mais qui est trop en décalage avec le reste du disque même si elle permet de constater encore une fois, l’envie de cette artiste à toucher à tout.

La démarche de Debut trouve donc son apogée ici. BJÖRK pose encore sa voix sur des instrumentaux même si la musique commence à être un peu plus écrite qu’auparavant. On connait la suite, elle s’appelle Homogenic et Post est un magnifique tremplin pour ce sommet artistique.