Grande figure du blues-rock de la dernière décennie, Derek Trucks occupe tous les fronts : d’abord guitariste de l’Allman Brothers Band à partir de 1999, il fait rapidement cavalier seul. Très fréquemment, il glisse un petit solo sur les albums de ses nombreux amis. Le jeune trentenaire admiré de tous décide de créer un groupe en duo avec sa femme Susan Tedeschi. Née en 1970, elle perce comme chanteuse de blues à la fin des années quatre-vingt dix, tout comme son mari Derek. Le couple avait déjà fondé ensemble la formation Soul Strew Revival ; celle-ci est désormais rebaptisée sobrement le TEDESCHI TRUCKS BAND. Comme l’illustre la pochette, ce groupe ne comprend pas moins de onze membres, certains faisant également partis du Derek Trucks Band : les deux leaders sont en effet accompagnés d’une petite armée de bassistes, batteurs, choristes, saxophoniste, trompettiste, tromboniste et organiste.

Revelator propose une heure de musique foncièrement américaine, entre blues et soul. Les douze titres ont tous été composés par le groupe. Plutôt inspiré et bien produit dans l’ensemble, le résultat reste très classique, sans grande surprise. On peut tout de même admirer la maîtrise exemplaire de cette formation soudée. Comme d’habitude, la guitare de Derek ne fait pas dans l’esbroufe, et le chant de sa compagne, à défaut d’être particulièrement brillant, s’écoute agréablement.

S’il n’y pas de titres faiblards qui plombent le disque, aucune composition forte ne sort du lot. Avec « Come See About Me », le groupe essaie d’imposer son style : les cuivres, les chœurs et l’orgue apportent une touche soul, la guitare de notre blondinet à queue de cheval un peu de blues-rock, et la basse expressive une goutte de funk. La voix de Susan Tedeshi navigue quant-à-elle en des eaux country-folk. Ce mélange de style se fait de la plus agréable des manières. Les quelques ballades douces nous transportent dans une Amérique mythique et hors du temps, à l’image de « Midnight Harlem ». Parfois, un parfum de soul semble venir tout droit de Memphis : l’orgue de « Bound For Glory » pourrait être joué par Booker T. Jones.

Dans l’ensemble, les refrains mélodiques sont efficaces, notamment celui de l’émouvant « Simple Things ». Le chant chaleureux de Susan Tedeschi fait alors des merveilles. Le groupe excelle particulièrement dans les tempi lents. Mais les chœurs sur « Ball and Chain », une composition pourtant très séduisante, ont tendance à alourdir le propos.

Le ton se durcit en fin d’album. Sur « Learn How to Love », la basse se fait plus athlétique. Mais en injectant une trop forte dose de funk, le groupe se fourvoie un peu, en témoigne « Love Has Something Else To Say » : bien trop tendre, Susan Tedeshi n’a pas une voix qui se prête à ce style. Elle est en effet plus à son aise sur la ballade finale « Shelter » qui conclut de manière convaincante le disque.

Revelator est donc un album honnête et bien exécuté. On a tout de même connu plus transcendant. Ce disque s’avère aussi un peu trop long. Cependant, on ne boude pas son plaisir à l’écoute de cette œuvre tout à fait sympathique.