Les conflits politiques et sociaux s'apaisant à l'aube du siècle nouveau, les groupes de folk et punk irlandais voient leurs paroles doucement migrer d'une critique acerbe de la société vers des sujets plus légers, les chansons "à boire" ne s'étant jamais faites aussi nombreuses qu'au tournant du 21è siècle. Les STANFIELDS, Canadiens qui proposent en 2010 leur premier album, n'échappent pas à cet état de fait. Déjà musicalement affirmé, le punk-rock du groupe, qui lorgne ostensiblement du côté du folk et de la country, ne fait pas montre de textes particulièrement fins ou conscientisés. Un exemple ? "The dirtiest drunk", portrait désespérant d'un poivrot désœuvré. Si le groupe a depuis travaillé cet aspect de sa musique, proposant des textes plus profonds, il est évident que ce premier témoignage du combo ne s'écoute pas pour ses qualités littéraires.

Et tant pis pour les textes. Car il y a là un coup de maître, messieurs-dames, qui vaudra au groupe de nombreuses récompenses dans son pays natal, parmi lesquelles le "meilleur groupe", le "groupe le plus prometteur", et le "meilleur groupe pour se bourrer la gueule", selon les lecteurs du quotidien The Coast d'Halifax. En effet, le punk énergique et survitaminé du quintet ne souffre quasiment d'aucune faiblesse. Axé sur le mariage heureux entre guitare acoustique et mandoline, le tout porté par la voix au papier de verre de Jon Landry, Vanguard of the Young & Reckless regorge de titres tout bonnement impeccables, mêlant maîtrise instrumentale, concision et sens exceptionnel de la mélodie. D'entrée, "Dagger Woods" nous prouve que les STANFIELDS sont déjà bien affirmés. Quel pied à l'écoute de ce rock punk à la fois virevoltant et très carré, qui force l'admiration. "Ship to shore" et l'enragé "Moneychangers", proche dans les ambiances de l'univers de Motörhead, sont autant de coups de pied au cul qui illustrent tout le potentiel des Canadiens.

Le tempo plus mesuré de "Jimmy No More", à la fois entraînant et pesant, évoque un paysage de western, tandis que "Federal Hall", punk jusqu'au bout des cordes, est prétexte à de superbes envolées de la mandoline. Déjà, les velléités acoustiques du groupe transparaissent, par le biais d'un "Don't make me walk away", qui s'habille finalement de distorsion pour renforcer son sympathique côté country. Relativement long pour le style pratique (près de 50 minutes), ce premier album des STANFIELDS est ainsi un premier coup de maître, qui en appellera naturellement d'autres. Le digne héritier des Flogging Molly, la variété des styles en prime.

Le clip de "Ship To Shore" : http://www.youtube.com/watch?v=JQaUtizFSaI