La fin des années 80 est sans doute la période la plus faste pour Paul CARRACK en tant qu'artiste interprète vocal. Après avoir connu un certain succès avec l'album One Good Reason en 1987 et le single "Don't Shed a Tear", puis de nouveau en compagnie de MIKE & THE MECHANICS et leur Living Years l'année suivante, le chanteur se remet au travail pour lui-même, non sans prendre le temps d'un nouveau duo remarqué, « Romance » (la chanteuse étant Terri Nunn, ex-BERLIN).

Le quatrième album sous son nom, Groove Approved, suit la même voie que son prédécesseur, de la soul blanche façon west-coast à forte base de synthétiseurs. Le son est simplement moins 80's et agressif que sur One Good Reason. Il serait même ici optimal si CARRACK n'avait pas décidé d'avoir recours aux cuivres digitaux du DX7 de Yamaha sur la plupart des morceaux, le préposé n'étant plus Wix Wickens mais un certain T-Bone Wolk. Celui-ci est un proche collaborateur d'Elvis COSTELLO et de Daryl HALL qui participe aux choeurs de l'album, ainsi que Paul Young de MIKE & THE MECHANICS et même Joe Lynn Turner, le chanteur de RAINBOW et bientôt DEEP PURPLE...

Il serait injuste de réduire cette oeuvre à une production contestable par ses synth-brass systématiques : à bien d'autres aspects, elle est franchement réussie, sur des morceaux plus aérés, grâce à l'emploi du piano digital et parfois même d'instruments acoustiques ou tout simplement marquants comme la 12 cordes électrique du premier morceau, "Only My Heart Can Tell". Ce qui ressort également comme un point plus ou moins positif, c'est la durée des chansons, cinq minutes en moyenne, comme pour leur donner plus de consistance et de profondeur.

C'est que dans l'ensemble, elles sont franchement réussies, ces chansons ! Il y a cette facette propre à mister CARRACK, soul et Motown, adaptée aux moyens du bord sans que le groove mis en exergue dans le titre de l'album ne s'en trouve dénaturé. À écouter particulièrement, "I'm On Your Tail", dans une ambiance live fiévreuse et notamment grâce au saxophone de Dick Morrissey. Le chanteur et les choeurs font des étincelles sur les autres morceaux de ce style. "I Live By the Groove" sera cependant le seul extrait à remporter quelques faveurs auprès du public.

Paul CARRACK propose ici certaines de ses meilleures chansons, à l'image de "Love Can Break Your Heart", "Only My Heart Can Tell" et "Loveless" (au moins, les titres sont révélateurs de la marque des textes !), cette dernière possédant l'attitude cool par excellence et propre à la west-coast. La fin de l'album mérite la mention bien en termes de réussite, grâce à un "Tip of My Tongue" très habité, tout autant que le slow "Dedicated". Quant à "Bad News (at the End of Times)", avec ses violons et accordéons folk, elle remporte la plus haute distinction, preuve que l'artiste gagne à diversifier son empreinte... Et ce chant, quelle classe !

Dommage que cela ne suffise pas à le conforter dans son choix de voler de ses propres ailes. Après des débuts difficiles, One Good Reason lui avait apporté confiance, mais le succès n'est pas renouvelé. L'année suivante, CARRACK rejoint Mike Rutherford et les autres pour d'autres aventures "mécaniques". Il lui faudra un certain temps avant de quitter la phase déception...