Le deuxième album de la chanteuse MARIPOL nécessite une gestation légèrement étirée pour permettre finalement une publication dans le courant de l’année 1973. La bardesse puise dans les éléments qui ont fait sa renommée au début, sans essayer de prouver quelque chose obligatoirement. Par opposition à d’autres grandes figures du renouveau de la culture bretonne, son œuvre demeure modeste en termes de quantité et plutôt espacée dans le temps, brouillant les pistes et ôtant les repères, comme la beauté des chansons qu’elle écrit...

Désormais mariée au guitariste, choriste et arrangeur Jean-Paul Graffard, MARIPOL propose, avec Le Pays d’où Je Viens, son album le plus folk au sens épuré. Les arrangements de cordes imposés par Barclay semblent loin derrière, et la musique n’a pas encore revêtu les couleurs psyché-prog des deux prochains disques. Ici, on ne trouve pratiquement que des instruments à cordes comme la guitare, le banjo et la harpe, quelques percussions... Cela suffit pour orner une voix aussi belle !

MARIPOL a toujours dans le cœur cette envie de porter la Bretagne, sa nature et ses légendes sur disque afin qu’elle soit racontée aux auditeurs, qu’ils soient compatriotes ou profanes. Qui dit folk-song, si l’on remonte à l’étymologie des années 60, à Joan Baez et Bob Dylan, dit contestation. La chanteuse y met de l’accent sur "Et On Nous Dit" et de manière plus subtile sur "Le Pays d’où Je Viens", chanson à l’aura mystique dont elle a le secret et message d’amour pour la Bretagne, grande et belle, celle qui refuse de capituler et se laisser absorber...

Le Bretagne, entourée de mer, la mer qui vous enivre et vous emporte, comme une femme dont vous tombez amoureux éperdument ("Etreintes Océanes")… Laissez-vous porter, surtout si vous croisez Melygan, l’hippocampe des légendes. Sur cette chanson de la seconde face, MARIPOL est accompagnée non par une guitare, mais par la harpe d’Alan STIVELL, comme pour les plus beaux morceaux du disque précédent. Voici donc encore une perle, une interprétation vocale à fleur de peau. On retrouve la harpe plus discrètement sur "Messagers d’Opale", plus étonnante à cause du son d’orgue Farfisa utilisé par Jean-Paul Graffard, un peu moins adapté cela dit, et bien trop isolé par rapport au reste des arrangements de ce disque.

La poétesse dont, on s’en souvient, la vie de citadine fut difficile, continue d’écrire des odes à la nature sur fond de guitares acoustiques qui jouent en mode picking ("Enfant des Villes", dont la musique est empruntée à l’air traditionnel "Amazing Grace"), tout en s’adressant aux laissés pour compte face à l’urbanisation de la société ("Paysan").

Le Pays d’où Je Viens est, pour tout cela, un bel album, contenant quelques-unes des plus grandes réussites de MARIPOL : "Avec Melygan", "L’oiseau espoir", "Etreintes Océanes" en priorité. C’est peut-être sur le plan musical qu’il est moins convaincant, et pas seulement parce que les arrangements paraissent "secs". Heureusement, les deux efforts suivants ne seront pas concernés par une telle réserve, loin s’en faut !