Les Irlando-Suédois de SIR REG avaient tellement fait parler la poudre sur leur précédent opus, mordant et politisé comme jamais, que l'on pouvait craindre que le groupe ait tiré ses meilleures cartouches. Troisième album, celui de la confirmation, 21st Century Loser voyait la bande à Brendan Sheehy transcender son rock celtique pour proposer des compositions d'une limpidité, d'une richesse ainsi que d'une rugosité tout bonnement bluffantes. Comment décemment pouvoir espérer faire mieux ? Et c'est vrai, SIR REG ne surpasse pas cet album-référence sur sa nouvelle offrande, baptisée Modern Day Disgrace. Pour s'en sortir, et après avoir pris le temps de recharger ses accus, le groupe effectue un surprenant retour aux sources, qui le voit réaffirmer ses racines folks sur un album certes moins engagé que son prédécesseur, mais résolument inspiré.

Un peu plus calme, ce quatrième album du groupe n'est pas pour autant dénué de brulôts ravageurs, à l'image de l'introductif "End of The Line" qui reprend les choses là où le précédent opus les avaient laissées. La base musicale rock, quasi-punk (banjo et violon adoucissent néanmoins le propos) est toujours là, mais elle sert un propos cette fois moins politisé, moins rageur à l'encontre de ces pantins qui nous servent de dirigeant. La conscience sociale de Brendan Sheehy se retrouve toujours sur certains morceaux (le titre introductif précité, ou encore "Fake Hero"), mais l'ambiance générale se fait plus légère et détendue. Il est de nouveau question d'alcool et de chansons à boire sur "The Wrong Bar" ou "Drinkin' Like a Dane", qui s'impose comme un des meilleurs titres de l'album, porté par une partie finale instrumentale dont la mélodie évoque de manière surprenante celle de "The Kids Aren't Allright" (The Offspring).

Alternant les tempi, SIR REG n'hésite pas à mettre parfois de côté son rock celtique pour proposer des ambiances plus modernes (les couplets de Johnny) ou traditionnelles (la splendeur folk de "All Saint's Day"). Varié, l'album ne connaît que peu de temps faibles, se faisant tour à tour calme et énergique, et parvient malgré sa courte durée (36 minutes) à mettre en valeur l'ensemble des différentes facettes du talent du groupe. Le rythme endiablé de "Call It A Day" ou celui, plus mesuré, de la tendre ballade "Won't Let You Cry" sont quelques-uns des éléments qui montrent que, sept ans après ses débuts, le groupe n'a rien perdu de ses aspirations énergico-mélodiques.

Sans égaler son prédécesseur direct, Modern Day Disgrace se fait un album foisonnant de bonnes idées, qui permet aux SIR REG de relâcher doucement la pression sans pour autant rogner sur la qualité de leurs compositions toujours marquantes et percutantes. L'album est abouti et peut servir d'introduction à l'univers unique et bariolé du groupe. Une indéniable réussite.