Une spécificité de NOIR DESIR, c’est qu’il s’agit d’un groupe qui s’est formé au lycée et n’a que très peu varié par la suite. Etudier sa discographie, c’est voir avec ses oreilles une poignée d’hommes vivre, évoluer, grandir et vieillir. Cet E.P, première de leurs parutions, témoigne de la plus verte des jeunesses, bien que collectivement le groupe ait déjà bien vécu puisqu’il a connu une préhistoire de plus de six ans. Ce vécu explique sans doute la qualité de chaque titre, la jeunesse justifiant sans doute la faiblesse de la production (cette phrase forme à mon avis un résumé tout à fait valable du disque).

L’attachement de NOIR DESIR à ces morceaux se révèle en étudiant ses setlists desquelles ils n’ont jamais complètement disparu. Quel que fut son cheminement par la suite, il a toujours trouvé un lien avec ces six titres ainsi qu’une place pour l’un d’entre eux au fil des soirs. Les versions ultérieures ont gagné en volume et sont sans doute plus marquantes. Il n’en reste pas moins que ce disque bénéficie d'une certaine cohérence sonore, développant un rock un peu malade, quasi new-wave mais avec du relief. L’harmonica est assez essentiel à la coloration des morceaux, à ce côté malsain. Mais, en tendant l’oreille, on peut aussi entendre quelques accords de piano et surtout des passages anxiogènes à la guitare qui en rajoutent encore.

Ces six chansons valent pour l’ambiance collective qu’elles partagent. Mais chacune a aussi quelque chose pour elle.
Cantat aligne des textes déjà très intéressants, malgré une interprétation des plus sages. Je retiens en particulier "Toujours être ailleurs", celle qui me parle le plus. Le côté enlevé de "Danse sur le feu Maria" annonce le premier L.P, "La rage" est une avant-première de l’ambiance de Tostaky, l’ardeur de Du ciment sous les plaines est déjà dans "Pyromane" (tiens, déjà deux chansons qui évoquent le feu) et "Lola", imparable dans son approche plus folk, connaîtra plusieurs répliques dans les albums suivants. S’il n’est sans doute pas nécessaire de connaître ce prélude à l’œuvre de NOIR DESIR pour l’appréciation de celle-ci, il n’en reste pas moins un brouillon d’une qualité fort rare.