Nevermind de NIRVANA, ce bébé concentré baignant dans le chlore, fondant sur son dollar comme la mule sur sa carotte. Et puis c’est quoi d’abord ce disque ? Un monument ? Un chef d’œuvre ? De la bouillie ? Du bruit ? En tout cas, quinze ans après, on ergote toujours dans les cafés : il y a ceux qui ont élevé Kurt Cobain au rang de divinité du rock, et puis en face, ceux qui défèquent régulièrement sur l’œuvre du grand blond dépressif, parce que c’était mieux avant, fuck le Grunge.

Pourtant il y avait bien quelque chose dans ce disque en particulier qui parlait à ses admirateurs, des titres efficaces et décomplexés comme on n’en avait pas vus depuis le Punk, une voix éraillée, une production « crade fait exprès » comme ces jeans que l’on délave en usine pour éviter d’aller l’user soi-même sur l’asphalte. Tant qu’on parle de fringues, y’avait aussi ces chemises à carreaux bicolores, légèrement entrouvertes pour laisser paraître un T-Shirt crasseux. La grande époque, l’effet d’anesthésie procuré par la chute de l’URSS commençait déjà à se dissiper, alors fuck la vie et la conspiration mondiale orchestrée par la CIA et Elvis dans sa soucoupe.

Hors de son époque, de tous ces petits facteurs de mode qui font sourire après coup, Nevermind garde pourtant un certain charme. On prend plaisir à découvrir ou à réécouter des hymnes inusables comme « Smells Like Teen Spirit », « Come As You Are », « Breed » ou « Lithium ». D’autres titres, peut-être moins connus mais tout aussi efficaces, comme « Territorial Pissings » ou « Lounge Act », font de cet album un condensé de tubes qui n’est pas bouleversant de technique, qui ne restera peut-être qu’un album bourré d’énergie parmi tant d’autres, mais qui a eu au moins le mérite de mettre une bonne claque à quelques dinosaures bien trop sûrs d’eux.