Une fois entré dans le nouveau millénaire, The Legend of Zelda passe de l'antique cartouche au CD-Rom, de la Nintendo 64 à la Game Cube, non sans un détour (et même deux) par la Game Boy Color, console portative. Les ventes de Majora's Mask (2000) ont été moitié moins importantes que celles d'Ocarina of Time (1998), son prédécesseur. The Wind Waker, sorti en 2002 au Japon, 2003 ailleurs, se vend à son tour un peu moins bien que Majora's Mask.

Le jeu est critiqué pour son changement d'esthétique. Les Zelda de Nintendo 64 étaient appréciés en partie pour leur aspect "réaliste", alors que The Wind Waker est en "cell-shading", ou "ombrage de celluloïd". La palette de couleurs est réduite, les contours sont ainsi mieux marqués, on parle d'image "cartoon". Certains reprochent à Nintendo d'avoir voulu conquérir le jeune public, les enfants en priorité, alors que Miyamoto, le directeur, avait précisé "pour tous les âges".

Bref, ce Legend of Zelda mal-aimé a aussi ses défenseurs farouches, qui le préfèrent même à ceux de Nintendo 64 et avant. Je me situe entre les deux catégories, côté positif. Ce jeu est très beau, très agréable en accord avec les qualités de la console Game Cube (manette plus facilement maniable que celle de la N64), même s'il requiert une certaine aptitude : la patience.

Le monde d'Hyrule a été englouti, et The Wind Waker, ou "la baguette des vents", est un Zelda au doux parfum marin. Link (enfant dans ce volet, une nouvelle fois) vit sur une île avec sa grand-mère et sa soeur. Cette dernière se fait enlever le jour de son anniversaire à lui par un oiseau géant, et est enfermée avec d'autres jeunes filles sur une île lointaine de méchants pirates. Link doit aller la sauver, aidé par un mystérieux bateau-animal parlant qui se fait appeler Lion Rouge.

Le nouveau monde est constitué de petites îles très espacées les unes des autres, le joueur doit manier la baguette des vents et le Lion Rouge, sur lequel vogue Link, par le biais de musiques qu'il apprend. La navigation d'un point à l'autre requiert cette patience que tout gamer/habitué de jeux vidéos n'a pas, lorsqu'il aime l'action, les combats. Comme dans Majora's Mask, il peut être facilement déçu face à cet aspect prépondérant et devant le peu de donjons proposés.

La musique n'est pas le point fort de ce jeu dans le domaine interactif. Les rares chants que Link apprend requièrent un peu plus de doigté, puisque l'instrument n'est plus un ocarina mais une baguette magique. Le joueur doit bouger un levier/joystick en rythme et non appuyer sur des boutons à vitesse aléatoire cette fois. Les thèmes sont courts, simples à défaut d'être marquants et souvent repris tels quels par une autre instrumentation, sans rien de plus. Il n'y a que les chants des deux temples, la terre et l'air, qui sont mieux développés, dans une veine celtique vraiment jolie d'ailleurs.

Les personnages comme Médolie, l'oiseau-femelle qui joue de la harpe, ainsi que Dumoria, être des arbres minuscule avec son violon pour une jig gaélique, sont adorables. Il y a Tetra la drôle de pirate et d'autres, gentils ou non, que l'on connait bien. The Wind Waker exploite bien les canons de la série, tout en créant son propre univers. Certaines "grandes" musiques détournent les anciennes avec réussite, comme "Ocean" qui accompagne Link sur les flots entre les îles, à renfort de cordes, trompettes et percussions programmées, comme les thèmes de la plaine d'Hyrule en 98 et celle de Termina en 2000.

Il y a beaucoup de détournements et de copiés-collés en fait, ce qui peut plaire autant que déplaire selon les moments. La forêt qui reprend le thème des Kokiris dans Ocarina of Time en version irlandaise, c'est très chouette par exemple. Idem pour les influences latino-péruviennes de l'île du dragon. Chaque boss/créature maîtresse à abattre possède sa propre musique, un autre bon point. Néanmoins, en dehors de quelques éléments notables, la musique dans Wind Waker sonne plus fidèle à l'idée d'accompagnement ou "parce qu'il en faut". Peut-être aussi parce qu'on commence à être habitué à l'emploi de variations par le maestro Kōji KONDŌ, la surprise est moins forte.

N'en reste pas moins que c'est un nouveau jeu magnifique, plaisant pour les oreilles, les yeux et l'adrénaline. L'idée de la mer, des îles, des pirates etc, c'est une aubaine pour, dans un autre style de jeu, un grand amateur de la saga Monkey Island, découverte au même moment. Reste cependant la difficulté globale, assez élevée. Un Legend of Zelda n'est certes déjà pas un jeu que l'on peut finir en quelques heures, mais là, waouh ! Vous l'auriez trouvée toute seule, la Grande Fée, vous ? Et puis l'île du dragon, pour un premier donjon, c'est quand même déconcertant non ? Pensez aux enfants, quoi ! Et puis cette transformation "folle" du méchant (on ne dira pas qui !) durant l'avant-dernier combat du jeu, sans offrir un viseur correct pour le toucher, c'est simplement inhumain !...