Entre ses albums de prêche et ses opus progressifs qui se suivent et se ressemblent, on avait un peu oublié que Neal Morse était aussi un songwriter de pop tout à fait crédible. "On" ? Pas votre serviteur, qui a toujours adoré son premier album solo. Alors il est clair que Morse fonctionne par cycles et re-cycles, mais il était hautement improbable qu'il revienne au son et au style de son album éponyme. Quelle joie donc d'entendre les deux premiers morceaux de ce Life & Times, album à part totalement axé pop sucrée et folk intimiste !

Car Living Lightly reprend in extenso les codes de Living Out Loud (rien que le titre) et Lost Cause : c'est pop, guilleret, simple, efficace, frais. Un chanteur, des musiciens appliqués qui n'en font pas trop, des paroles rigolotes, et roule ma poule, au pays des Chansons qui Restent dans la Tête ! Et Good Love Is On The Way enfonce le clou avec un refrain entêtant, une chanson qui mériterait très largement de passer sur les ondes tant elle est accessible. Joanna elle va chercher du côté de Landslide : pour l'instant, nous avons une copie carbone du premier album... que l'on accepte avec grand plaisir tant la bonne humeur et le talent sont de mise.

Les fans de la seconde heure du Révérend Morse seront peut-être interloqués de l'entendre sur un terrain aussi commercial, mais le garçon a toujours écrit ce genre de chansons, même bien avant de former Spock's Beard. Et il y est à l'aise. Un peu trop d'ailleurs : si vous vous posez la question fatale, à savoir "alors cet album sera aussi génial que l'éponyme ?", la réponse est non, de peu. Car le gars ne sait pas s'arrêter, boulimique de composition, et le dernier tiers du disque aurait mérité un sérieux dégraissage. Malgré l'apport d'un duo féminin sur Old Alabama, le disque commence à s'essoufler à partir du très drôle Manchester (not) By The Sea, presque Renaud de la grande époque dans les paroles.

Un autre titre empêche ce disque d'atteindre l'excellence : le single He Died At Home. Une chanson poignante qui traite d'un problème passé sous silence aux USA : le suicide de jeunes soldats traumatisés. Une chanson réaliste, intimiste, minimaliste, mais qui flirte un peu trop avec la larmoyance. C'est très bien écrit, rien à redire, mais ça casse le disque en deux et il règne au-dessus de ces cinq minutes comme un flottement. Morse est sûrement sincère dans sa démarche mais l'auditeur peut ne pas l'entendre de cette oreille.

Mais tous ces défauts ne doivent pas vous empêcher d'apprécier quelques titres qui ont tous pour point commun une démarche débonnaire et bon enfant : Selfie in the Square ouvertement nunuche, She's Changed Her Mind qui se rapproche presque de Vianney et consorts (l'envie d'étrangler le chanteur à mains nues en moins), il tâte même du reggae avec un chaloupé Wave On The Ocean très Eddy Grant, solo groovy et arrangements comiques inclus.

Une pause fraîcheur bienvenue qui devrait plaire au plus grand nombre, voire vous ravir, qui aurait juste eu besoin d'un petit coup derrière la nuque. C'est l'inconvénient de l'été.

Note finale : 3,5 et le demi-point pour le manque total de prise de tête