1983 marque une rupture évidente dans la carrière de The SOUND. Warner a fini par les virer, ce qui a rendu leur situation précaire mais les a également soulagés. Il faut dire que le label Korova avait tout misé sur ECHO and the BUNNYMEN et n’avait déjà pas fait de From the lion’s mouth la promotion qu’il aurait méritée. D’où l’attitude négative du groupe sur le suivant All fall down et le résultat de 83. Qu’allaient-ils faire maintenant ? Ils aimaient toujours autant donner des concerts, surtout dans certains pays européens comme les Pays-Bas ou le Portugal où ils avaient quand même réussi à se faire un petit nom, mais ils avaient besoin d’un label pour publier leurs nouvelles compositions.

Le salut est venu de Statik, une filiale de Virgin qui avait publié cette année-là le fantastique premier album des CHAMELEONS. Apparemment, le manager avait décidé de miser assez gros sur The SOUND, mais le résultat commercial en Angleterre n’allait toujours pas être au rendez-vous. Ce nouvel échec allait mener (une histoire compliquée) à la perte malencontreuse des masters de cette époque Statik, ce qui explique malheureusement quelques défauts sonores sur les versions actuelles, retapées tant bien que mal à partir de vinyles de l’époque.

Avant de trouver un label, ils avaient accumulé un paquet de démos, à peu près suffisantes, en nombre et en durée, pour constituer un album complet cohérent. Je n’ai aucune preuve de ce fait, mais il semble qu’ils aient dû renoncer à cet album et commencer leur nouveau contrat plus prudemment, par un long EP. C’est un choix regrettable à mon avis, mais au moins celui-ci est-il bien compact et très réussi. Le dénommé Shock of Daylight est en effet manifestement la troisième meilleure publication de leur catalogue. Il présente une ambiance plus chaude, une énergie qui rappelle plus Jeopardy que les deux autres albums, un son plus abrasif qui nous rapproche du rock alternatif et de l’indie pop naissants, tout en opérant une convergence notable avec les SIMPLE MINDS (une comparaison qui sera encore plus vraie avec l’album suivant, d’ailleurs).

Shock of Daylight comporte six chansons pour vingt-cinq minutes de musique, un vrai mini-album donc. Cinq d’entre elles sont chatoyantes, colorées, et aussi un peu romantiques. On y sent toute l’émotion habituelle de la voix de Borland, mais bien moins à découvert que sur From the lion’s mouth et All fall down. La basse n’a jamais été aussi présente et les claviers servent surtout à arrondir les angles. On peut aussi remercier le producteur Pat Collier pour la belle pâte instrumentale, le groupe a d’ailleurs affirmé que c’est avec lui qu’ils ont eu la meilleure expérience en studio. La seule exception à ce schéma est la mélancolique « Winter », qui n’en est pas moins réussie pour autant, il est même très intéressant d’avoir ainsi brisé un début de monotonie.

À mon goût, seule « Counting the Days » est un peu au-dessous du lot sur le plan de la composition. Entre les belles dissonances de « Golden Soldiers », l’inspiration de « Longest days », le calme de « Winter », on est triste que la fin arrive aussi vite quand débute la délicate « Dreams then plans ». Une fois de plus, ils auraient dû remporter un grand succès avec ce disque facile d’accès et bien ancré dans son époque, un mystère et une injustice de plus. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une belle porte d’entrée dans leur discographie, qui montre en peu de temps ce groupe si talentueux sous son meilleur jour.