Dans la série des disques « Je me suis déjà fait avoir mais j’y retourne au galop », « Flying Dreams » pourrait figurer en bonne place dans une discothèque. Soyons honnête, malgré son titre et un Commander qui saute d’un avion, il n’y a rien de bien planant là-dedans ni de folichon. Un disque qu'on ne peut se vanter de voir figurer dans sa discothèque.

Toujours sous contrat avec Arista, Commander Cody leur doit un second disque. On s’empresse de renvoyer le pianiste en studio. Cette fois, on a décidé de sévir : on confie le Commander à John Leslie Hug, un jeune producteur guitariste. Hug n’est pas totalement inconnu. C’est un petit requin de studio ayant accompagné les outlaws Jessi Colter et son mari Waylon Jennings, joué avec Juice Newton, New Riders Of The Purple Sage, Maria Muldaur. Mais le gars s’est aussi retrouvé plusieurs fois avec Gregg ALLMAN pour des disques largement dispensables, tel « Two The Hard Way » une purge regroupant Gregg et la chanteuse CHER. A première vue, le nom de John Hug, également présent à la guitare sur deux titres, n’a rien de bien réconfortant, mais ça on ne le savait pas à l’époque.

En parlant de requins, John Hug en a attrapé plus d’un dans son filet : la choriste chanteuse Jennifer Warnes (ex Leonard COHEN, POLNAREFF, SAM & DAVE), les bassistes Scott Edwards, entendu dans 10% des productions Soul du moment (de Tavares à Hall & Oates, en passant par Aretha FRANKLIN, Patrick JUVET ou Ben E KING), et Abraham Laboriel (ex Al JARREAU, Pointer Sisters, Lee Ritenour), le guitariste de session Jeff Baxter (ex STEELY DAN, DOOBIE BROTHERS, Glenn HUGUES, Dolly PARTON, KISS ou Elton JOHN), Danny Gatton (futur Robert Gordon, Tom PRINCIPATO ou Chris ISAAK), Buzz Feiten (ex LOVE et Paul BUTTERFIELD BLUES BAND), le claviériste Neil Larsen (ex Don McLean, Gregg ALLMAN, Roy BUCHANAN et futur Rickie LEE JONES), le batteur Joe English (ex WINGS ou Sea Level) et enfin le saxophoniste Ernie Watts déjà vu auprès d’artistes aussi variés que Cannonball ADERLEY, Jean-Luc PONTY, ZAPPA, Albert et Carol KING. Une sacrée pléiade de sessionmen agrémentée par la choriste Nicolette Larson et Bobby Black à la steel présents dans l’opus précédent. Vu les différents curriculums, certains de ces requins ont accompagné la même vague, œuvrant ainsi sur les mêmes disques, on se dit que la sauce peut prendre.

George Frayne n’est pas venu les mains vides : il a apporté six nouvelles chansons et décide de ne pas reprendre un seul titre de l’époque Lost Planet Airmen. Les premières mesures de « Thank You Lone Ranger » s’avèrent entraînantes avec un texte humoristique portant sur le célèbre personnage de Western, hélas orienté vers une salade dans laquelle se mêleraient STEELY DAN, FOREIGNER, 10 CC et les Commodores. « He’s in Love, He’s in Trouble » permet de souffler. Le piano prend en charge les rênes pour un Country Rock FM qui se veut un bon calque des productions du moment (1/3 de Randy NEWMAN, 1/3 de Little River Band et une dose de DOOBIE BROTHERS). « Talent Night at the Nashville Inn », un Country Rock avec steel guitare, est ampoulé par une production en surcharge, une mélodie vite oubliée et une sonorité annonciatrice des eighties. « Dreams of Barbarella » s’annonçait croustillant d’après son titre. Malheureusement, la ligne mélodique ne parvient pas à accrocher l’oreille. On oublie le titre à peine fini. Bien que plus rythmé, « Vampira » ne retient pas plus l’attention que Barbarella, un comble pour des chansons mettant en son de tels personnages. En fermeture, « My Day », un rag boogie piano, évoque presque l’ambiance qu’on retrouvait dans les premiers disques.
Pour les reprises, le Commander pioche large avec un résultat somme tout peu réussi. « Cry Baby Cry », titre des BEATLES figurant dans le double blanc, est plombé par le sax, des chœurs intempestifs et définitivement coulé par l’arrangement des cordes. Si de nombreux auditeurs restent certainement attachés à la version des quatre gars de Liverpool, le groupe FREEDOM avait repris le morceau avec justesse, idem pour Katie MELUA, mais là l’essai est bien raté. Grand morceau de The BAND, « Life Is a Carnival » laissait présager le pire, mais l’harmonica de Norton Buffalo parvient à maintenir un rythme honorable malgré l’orgue et les guitares qui auraient pour un peu transformé la ballade en une Country pleine de barbe à papa. Le bon John Hug a réussi à refourguer un titre variant entre Space Country et Folk expérimental. On peut difficilement faire plus incongru, mais l’interlude ne dépasse pas les 72 secondes.
Commander Cody nous surprend avec deux inusités : « Stranger in a Strange Land »⃰, une bizarrerie de Leon RUSSEL, mais on se demande pourquoi avoir incorporé une intro d’une quarantaine de secondes constituées de bruits de pas, de murmures sonores et de fanfare ? Seconde surprise avec « Take the Fifth Amendment », un inusité de Joe Tex. Si certains soulmen se sont nourris de Country, l’inverse se produisait également. A l’heure où les abus gouvernementaux ne cessent d’augmenter sur le territoire américain, et alors que de nombreux countrymen se sont positionnés en faveur du Président Trump et de la NRA, cette chanson peut paraître réconfortante.

Plombé par une production qui semble éviter toute pondération, des arrangements bourrins bien représentatifs de l’époque et par des titres qui s’oublient rapidement, comme victimes d’incontinence, « Flying Dreams », malgré sa pochette et le nom de Commander Cody, ne fait planer qu’en de trop rares occasions. Un disque qui ne vaut guère plus de 1,5 et qui sera ramené à 2 par largesse d’esprit.

⃰ Ce titre connaît plusieurs homonymes via le duo Barbara Streisand/Barry Gibb, U2 et IRON MAIDEN.