Gros changement de cap avec ce troisième album. Evidemment, ça n’a pas manqué, la chanteuse s’est vite fait laminer par une partie de son public et des critiques, l’accusant entre autres d’avoir voulu monter par effraction dans le train de l’électro-pop à la mode, tendance CHRISTINE AND THE QUEENS. Un procès que je ne ferai pas, car je pense que la vérité est plus simple et, probablement, plus grave : elle a changé. Comme cette pote avec qui on avait bien accroché, avec qui on s’était bu des litres de bière jusqu'à la fermeture de nombreux bars et qui, parce que la vie est parfois ainsi faite, est partie dans une direction différente. S’est embourgeoisée. On est content de la revoir de temps en temps, une partie de la magie opère toujours. Mais on ne partage plus grand-chose. Là où ça devient difficile à supporter, c’est quand cette amie se met à fréquenter la bande de lascars que vous vous faisiez ensemble un plaisir de souverainement mépriser jusque-là. On sait bien qu’au fond on a tort et que c’est elle qui a raison, mais il est des limites difficiles à franchir.

Ainsi, j’ai entendu IZIA dire de LESCOP qu’elle trouvait ça naze, mais qu’elle avait revu son jugement après avoir travaillé avec lui (sur les textes) et son producteur (sur la musique) à l’occasion de cet album. Pour avoir vu Lescop en concert, je la suis entièrement. Le qualificatif de « naze » colle parfaitement avec ce que j’ai vu et entendu. Mais, malheureusement, ce n’est pas cet album qui me fera changer d’avis. Je ne vais pas critiquer les paroles, car je préfère par principe quelqu'un qui prend le risque de se faire comprendre en français plutôt que quelqu'un qui se planque en anglais. Musicalement, c’est peut-être très bien. Mais ça ne me concerne pas. Cette monotonie, ces effets ressassés jusqu'à plus soif, les jeux de voix qui se répètent (« ouh ouh ouh», « ah ah ah » à tous les refrains), j’ai beau faire l’effort de m’ouvrir, ça me laisse froid. Cet univers chicos, à l’image du clip ridicule qui accompagnait la chanson titre, je m’en br…alance. C’est peut-être bête, mais je suis heureux comme ça. Alors bon.

Certes, tout n’est pas à jeter. Elle a toujours une voix géniale, une certaine énergie, un côté sympathique. L’album a un aspect hypnotisant (pour peu qu’on l’écoute avec de bonnes basses, sinon il n’a définitivement aucun intérêt), possède quelques chansons intéressantes (j’aime bien « Les ennuis » par exemple et surtout « Tomber ») et de bonnes idées par moments. Mais, puisque ce disque s’appelle la vague, je vais te dire exactement à quoi me font penser ces bons moments. A Palavas-les-Flots. Si. Joli port de pêche, assez sympathique une fois passés les clichés. La plage des Montpelliérains est le royaume des kite-surfeurs. Pas de vagues pour glisser, le vent pour te tirer. Mais, quelquefois, la houle crée des petits rouleaux qui dépassent au moins largement le mètre. On voit alors débarquer tous les frustrés de la planche à Palawaï, comme ils l’appellent, le body sous le bras, pour se contenter des merles faute de grives. A l’écoute de cet album, je suis ce surfeur qui a eu l’habitude des sites landais (les deux premiers disques) et qui se retrouve coincé dans l’Hérault. Prêt à profiter des petites vagues que la Méditerranée peut offrir, mais rêvant évidemment de revenir à ce qui le fait vraiment kiffer. Bref, autant dire que, niveau vagues, je me réfère toujours à Dick DALE plutôt qu’à cet album !

Cela dit, revenir n’est pas forcément le bon mot. Bien sûr, j’adorerais un nouveau disque de la trempe de ses deux premiers. Mais, ce que j’aimerais encore plus, c’est voir se vérifier à l’avenir mon impression des premiers temps. A savoir qu’au moment où tout le monde présentait IZIA comme une nouvelle Janis, je la sentais en nouvelle P.J. Vu l’œuvre de la grande Anglaise et les chemins tortueux qu’elle a empruntés, rattrapant après coup un album déroutant par un autre éclairant la route, je me plais à imaginer que sa consœur ne nous a pas encore tout dit avec cette vague. Sans aller chercher aussi loin que P.J, l’œuvre de la famille dans laquelle la chanteuse baigne depuis toujours montre une propension à faire varier les tentatives d’albums et à redresser la barre après les quelques sorties de route. Si, pour l’instant, elle préfère s’exprimer au cinéma, je n’oublie pas qu’elle reste au début de son œuvre ni que le mot de la fin est loin d’avoir été dit. Cette vague ne m’a pas submergé. Je reste plein d’espoir.