Vous n'allez pas en croire vos petits yeux de biche, mais il existe une connexion entre Julie ZENATTI et MARILLION ! On retrouve en effet dans ce troisième album la guitare volubile de Robin Boult, l'un des deux six-cordistes de FISH. Oh, cet invité surprise n'est pas pour se la péter gratuitement, car il y a bien d'autres grands noms sur ce Comme Vous : Axel BAUER, Rick Allison (qui sort alors d'une relation tumultueuse mais fructueuse avec Lara FABIAN), Geoff Dugmore, Arnaud Dunoyer De Segonzac... Mais ce n'est pas l'unique point commun entre la douce Parisienne et le quintet d'Aylesbury : ils ont aussi cette propension pendant toutes les années 2000 à sortir des albums qui ne m'émeuvent pas, tout en étant irréprochables sur le papier. Comme Vous est un album tout à fait charmant, très mélodique, extrêmement soigné. Mais qui n'a que peu d'impact sur votre serviteur.

Côté prod, rien à redire. Outre le fait que la dame a de plus en plus confiance en son chant, on a des arrangements qui vont de l'honorable au très soigné, une certaine variété de sons (certaine, pas totale), des orchestrations plus denses et plus volontaires qu'avant, et même un titre détonnant, "Dans ces villes" qui va allègrement jeter quelques cailloux dans le jardin du rock indus, synthés stridents et grosses guitares froides inclus. C'est du côté des chansons que ça ne va pas, ou plus exactement, car l'album est très agréable, que ça va un petit peu trop bien. En gros, vous avez les tubes et les autres. Ca s'appelle de la discrimination positive.

Les tubes, ils marchent. On ne va pas se mentir : "Je voudrais que tu me consoles" est aussi calibré qu'honorable, "A quoi ça sert" aussi, très bien composé, "Rendez-moi le silence" itou (bien que la transition avec "Dans ces villes" ne marche pas, on passe en gros de RAMMSTEIN à Gilbert BECAUD !). Les autres titres subissent le sort de transparence : expellus materiae ! (NDLR : Oh, tu cites très bien le Seigneur des Anneaux !). Des "On efface", "L'amour s'en fout", "Le sort du monde" et ses cordes rigolardes, sont autant de chansons qui ne sont pas mauvaises, mais passent sans s'arrêter. Il y a peu de vrais déchets : "L'âge que j'ai", un peu superficielle, et la très décevante "Prends soin de moi". C'est juste que le soin immense apporté à la production n'est pas toujours à la hauteur des sentiments exprimés, ou vice-versa, puisqu'à grands pouvoirs, grandes responsabilités (NDLR : Wouah, quelle connaissance encyclopédique de Rocky IV !).

Du coup, l'album est à la fois meilleur que les deux précédents, et moins bon car trop étalé. Jusqu'à un spoken text caché un peu maladroit. Ca manque de deux ou trois chansons dynamiques et volontaristes comme la chanson-titre qui devient très vite irrésistible, ou le refrain exaltant de "Des nouvelles", typique du titre pas original mais qui rentre dans la tête. Du côté des voix, elle donne, elle monte, elle tue bien comme il faut. Et le disque est plutôt sympathique. On est juste frustrés de ne pas en avoir un peu plus ; qu'elle ne se lâche pas totalement sur les styles et les émotions. En l'état, à savoir album de chanson française des années 2000, c'est vers le haut du panier. Mais Julie a peut-être plus dans son sac.