Certains d’entre vous se sont peut-être intéressés à l’EP d’AURA SHRED que nous avions chroniqué dès 2015. Un effort que nous saluons encore aujourd'hui haut la main. Problème, cet EP n’existe plus. Plus précisément, il a été remplacé par une seconde édition sortie en 2016. 4 longues années d’indécision, un album et quelques remix d’anthologie nous prouvent qu’AURA SHRED est parti pour durer. Autant de plaisirs coupables qui nous incitent à revenir sur cette deuxième version d'Hellface, officiellement nommée "Deluxe", et qui mérite bien sa propre chronique.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, précisons qu’Amazon Music permet encore aujourd'hui aux rares opportunistes qui l’ont acheté en 2015 donc, d’écouter l’EP en version originale dans son intégralité. Ceci, bien que seule la seconde soit disponible à l’achat aujourd'hui. Inconvénient mineur, la seconde version est donc considérée comme un produit différent. On avoue que bien qu’atteint de FOMO (1), nous ne sommes pas (encore) repassés à la caisse. On devrait.

Si "Unseen White" n’était pas un chef d’œuvre, essentiellement du fait de son manque de progression et cohésion avec le reste de l’EP, elle témoignait néanmoins d’un panel d’influences initiales bien plus large que l’EP dans sa version finale ne laisse transparaître. Notre jugement lapidaire a peut-être d’ailleurs été à l’origine de cette disparition, voire d’une orientation plus focalisée pour la suite de l’aventure ? On espère très modestement que non.

"Bad Draft" et "The Darkest Part of Yourself" se chargent donc de parfaire l’EP pour une sortie de piste bien plus cohérente avec les 3 premiers titres originaux, restés intacts. Le premier, "Bad Draft", au rythme puissant et rapide, renoue avec la vigueur primale et sans concession de l’excellent "Flash". Saturations, sons acides, beat froid et écrasant, surproduction, voix électronique désincarnée, on se fait copieusement ramoner les conduits auditifs. Si l'EP s’était arrêté là, on aurait retrouvé l'enchaînement vif-lent-dansant-vif de la période classique que nous réclamions dans notre première chronique.

"The Darkest Part of Yourself" répond cependant par la négative. Le final d'Hellface seconde version n’est pas plus explosif que celui de "Unseen White". Le style est cependant radicalement différent. D'apocalyptique, nous sommes passés à post-apocalyptique. Ambiant, introspectif mais néanmoins corrosif, "The Darkest Part of Yourself" maintient une porte ouverte vers le néant. L'EP original était digne de la guerre futuriste et nocturne de Terminator, décimant ses troupes au fur et à mesure sans apporter de conclusion satisfaisante. Cette seconde version, plus dans l’esprit de Planète Hurlante, apporte donc la réponse à une question que l’on n’aurait jamais dû poser. Hellface deuxième version se conclue par une amertume désespérante, au bout de laquelle une voix robotique et rocailleuse semble entonner de manière cyclique et infinie à une hiérarchie inexistante que sa mission est accomplie.

Faut-il alors vous préciser qu'Hellface seconde version est, avec V Empire de CRADLE OF FILTH, le seul EP parfait que l’on n’ait jamais écouté?

(1) Fear Of Missing Out, ou "peur de manquer". Un syndrome que l’industrie marketing exploite à coup d’édition "limitées" et autres "contenus exclusifs".