Il arrive parfois que quelques mois suffisent à un groupe pour s'installer durablement dans le paysage musical. C'est assurément ce qui est arrivé au duo américain dans la sphère gothique. En effet, FAITH AND THE MUSE se sont retrouvés directement catapultés comme valeur sûre après leur superbe premier album Elyria. Ils en furent les premiers surpris ! Après une tournée commune pour conforter ce statut naissant avec DAS ICH, CASSANDRA COMPLEX et les p'tits Français de CORPUS DELICTI qui a traversé les Etats-Unis en 1994, Richards et Faith se sont rapidement remis au travail, sans qu'il s'agisse de battre le fer tant qu'il est chaud (pour moi, il y aurait comme une notion peu reluisante d'opportunisme), ce qui n'est vraiment pas le cas ici. Le duo était simplement productif. Les Américains ont à peine mis deux ans pour sortir cette nouvelle galette et quelle galette !

Avec Annwyn, Beneath The Waves, le duo creuse encore un peu plus profondément ce monde fait de mystère et de beauté. A l'image de la pochette qui s'inspire des travaux de KLIMT (si si, même si ça ne saute pas aux yeux), cet album est une invitation à un imaginaire foisonnant. Certains y trouvent sans doute un petit côté kitsch façon convention Cosplay-Elfique, mais l'essentiel n'est encore une fois pas là. Il est dans cette faculté que les Américains ont d'alterner moments féeriques et tensions électriques. Nourrie au meilleur de la mythologie, des rites païens et autres effluves celtiques, la discographie des Américains est définitivement atypique.

Cet album gourmand en morceaux présente donc de nouveau une face incandescente marquée, naturellement incarnée par les riffs tranchants de guitares insufflés par William Faith tout au long de morceaux qui baignent dans les eaux moites et troublées des mondes gothiques et death-rock. Sa patte est d'emblée identifiable sur le pesant morceau-titre ou le non moins excellent "The Hand Of Man", de pures pièces de musique sombre. Le duo se fend même avec "Apparition" d'un titre particulièrement anxiogène qui n'est pas sans rappeler les notes abrasives de leurs potes californiens de MEPHISTO WALZ. Le duo dans ce style noir est terriblement efficace. Que ce soit avec Faith ou Richards au micro, le dynamisme des morceaux emporte tout dans un décapant tourbillon mélodique. Du grand art, comme souvent avec les Américains.

Ombre et lumière en alternance. Cette clarté toute relative se retrouve dans des morceaux moins enlevés qui se nourrissent d'incantations païennes et de pulsations tribales. C'est ici que Monica Richards montre l'étendue de ses possibilités vocales qui fait vraiment des merveilles. Les doux et atmosphériques "The Birds of Rhiannon" ou "Fade And Remain" vous enveloppent tranquillement de leur discrète mélancolie. L'Américaine ne craint pas de s'ouvrir à des influences éloignées de son death-rock d'origine. Elle nous emmène dans une danse frénétique ("The Silver Circle") ou nous invite à un angoissant sabbat (le superbe "Cantus"). On ferme les yeux et on se retrouve sur des terres celtes avec pour compagnons les ombres de DEAD CAN DANCE comme le soulignent avec réussite "Branwen Slayne" ou "Hob Y Derri Dando". Les plus sceptiques pensent à des ambiances Nature et Découvertes avec thé aux sept arômes pour accompagnement. Les autres y voient plutôt le lieu de rendez-vous de petits lutins malicieux. L'éventail des émotions présenté par ce duo s'avère encore une fois un véritable puits sans fond.

Avec Annwyn, Beneath The Waves, FAITH AND THE MUSE frappe de nouveau très fort. C'est un album varié qui se joue des codes et demeure près de vingt cinq ans après sa sortie terriblement envoûtant.

Note réelle: 4,5/5