Víctor JARA est un compositeur, guitariste et chanteur populaire chilien dont la mort lors du coup d’Etat de Pinochet en 1973 a marqué les esprits. Arrêté par l’armée il est torturé en public. Ses doigts sont symboliquement tranchés à la hache écrasés en public avant que les militaire lui demande ironiquement de "jouer un morceau pour ta p… de mère !". Java aurait alors entonné l'hymne de l'Unité populaire. Les militaires l'auraient alors exécuté de 44 balles, assassinant également la majorité des militants qui avaient repris le chant. A ce titre il est devenu un symbole de l’écrasement du gouvernement de Salvadore Allende par Pinochet.

De très nombreux artiste lui ont rendu hommage au travers de chansons. C’est notamment le cas de U2 au travers de leur morceau "One Tree Hill" (The Joshua Tree, 1987). Mais également de Bernard LAVILLIERS dans "La Samba" (Le Stéphanois, 1975), des CLASH avec "Washington Bullets" (¡Sandinista!, 1980), de Gilles SERVAT avec "Gwerz Victor C'hara", (L'Hirondelle, 1974), ou bien de SKA-P avec "Juan Sin Tierra" (Eurosis, 1998). On peut également citer Michel BUHLER, Serge UTGE-ROYO, CALEXICO, Jean FERRAT…

Dans leur album Second tour (2012) les toulousains de ZEBDA évoquent Victor JARA dans leur chanson "Le talent", avec ces paroles "Faut que je change d'univers, Sous peine de finir un guitariste chilien".
L’année suivante ils décident de lui rendre hommage au travers d’un EP quatre titres, dont trois reprises de certaines de ses chansons, qui lui est dédié. Tout d’abord en reprenant un instrumental du chanteur, "La Partida" qu’ils modernisent en lui donnant un rythme bien plus entrainant et vivant. Et sur lequel ils intègrent, Poussières de juillet un poème de Kateb YACINE, l’écrivain journaliste Algérien, et accessoirement le père d’Amazigh KATEB, le chanteur de GNAWA DIFFUSION. Un mariage très réussi, qui laisse derrière lui des saveurs de mélancolie et de joie désuète.

Le traitement est le même avec la reprise de "Las Casitas del Barrio Alto", dont la version originale, sobre et austère se voit transformée en un morceau guilleret et irrévérencieux dans lequel la bourgeoisie de Santiago, réfugiée sur les hauteurs de la ville est raillée. L’ajout de nombreux instruments enrichit ce titre en l’amenant à un autre niveau. La reprise de "Ni Chicha, Ni Limona", pour réussit qu’elle soit, est moins surprenante car l’originale possède déjà ce côté entrainant et festif qui correspond bien à l’univers de ZEBDA.

Aux côtés de ces trois reprises, la présence de "El Pueblo Unido, Jamas Sera Vencido" du groupe chilien QUILAPAYUN pourrait paraitre un peu incongrue. Mais il faut savoir que Victor JAVA fut le Directeur artistique de leurs quatre premiers albums, dont un réalisé conjointement (Canciones folclóricas de América, 1967)
De plus, ce titre, et son refrain ("Le peuple uni ne sera jamais vaincu") est un classique des chants révolutionnaires qui opère une sorte de pont avec le projet MOTIVES ! initié par les trois chanteurs de ZEBDA (Magyd Cherfi, Hakim et Mustapha Amokrane) et dans lequel il aurait facilement pu s’intégrer.

Au final, ce court EP représente un hommage joyeux et lumineux pour celui qui représentait pour les frères Amokrane, comme pour beaucoup d’autres, "l’image de l’engagement ultime". Un bel intermèdes pour ZEBDA qui s’apprête à sortir, l’année suivante, le fantastique Comme des Cherokees.