Ah cette damnée année 1983 ! J’en parle tant et tant vous ne serez pas surpris d’apprendre que c’est celle où le groupe NIGHTRANGER va sortir de la masse. Il faut de la chance et du talent pour parvenir à un tel résultat à cette époque, et le concours de MTV n’est évidemment pas étranger à la réussite de tel ou tel. Le combo de San Francisco n’échappe pas à cette règle, évidemment. Au contraire, le look flashy et les permanentes ne sont pas là pour rien, tout est bon pour faire la nique aux autres à une époque où MOTLEY CRUE et QUIET RIOT font les beaux jours de la zique américaine, vous pensez bien ! Le premier opus a fonctionné, MCA sent poindre la poule aux œufs d’or et presse ses poulains de retourner au studio ajouter un deuxième album dans les bacs !

Trois singles sont lancés pour faire du ranger de la nuit un balèze de l’AOR : La video de "Rock In America" est bien débile, dans l’air du temps d’alors et toute de superficialité vêtue ! Jack Blades occupe d'emblée le micro avec sa fougue coutumière et les deux gratteux en ajoutent dans tous les sens, chacun dans son style si particulier, Fitzgerald enrobant le titre dans des synthés chatoyants. La bonne humeur est là, je trouve la chanson moyenne mais sympa, 51ème du billboard, plutôt bien donc. Mais c’est "Sister Christian" qui explose les compteurs et fait du groupe une star, pointant à la 5ème place du billboard US mais dominant au Canada. Le titre de Phil Keagy est un mid-slow aux intonations supra pop, avec un petit piano d’opérette, propice aux oeillades amoureuses des ados d’alors, ce qu’il fallait pour grimper au sommet. "When You Close Your Eyes" enfonce le clou en terme de slow sirupeux réussi, pour une belle 14ème place.

Le règne de l’AOR, je vous dis, Blades à la compo, voyez donc ce ton poppy sur le beat de "Rumours In The Air", refrain efficace proche de BON JOVI, choeurs aériens et riff de synthés. On apprécie les sonorités VAN HALENienne de "Why Does Love Have To Change", au joli refrain bien péchu, et le travail toujours excellentissime des deux gratteux, une des raisons majeures, il faut l’admettre d’aimer le combo. Riff bien gargantuesque sur "Touch Of Madness" et refrain à l’avenant, tout ce qu’il faut pour plaire ! Je suis moins fan de "Passion Play" qui a un poil vieilli et sonne vraiment très eighties, mais le savoir-faire reste évident. Le mix de riff et de synthés encore sur "Chippin’ Away" dispense une efficacité toute sidérurgique matinée de pop, et pas un instant de faiblesse. On en termine avec "Let Him Run", ses chouettes arpèges de gratte et son atmosphère presque southern rock par moment, sans doute ma préférée de l’album, vrai petit bonbon sucré mais velouté.

Bien sur, l’album a fait un flambard, avec plus d’un million d’exemplaire aux US, les singles ont marché. Bien sûr, les voix de Jack et de Phil sont toujours justes et bien placés, bonnes pour le rock et les slows. Bien sûr, les deux guitaristes sont pour moi la raison majeure de toujours aimer NIGHTRANGER après toutes ces années et Alan Fitzgerald fait un très joli travail aux claviers. J’aime toujours cet opus quarante ans plus tard mais comment vous dire, mes collègues hard rockeurs vont râler, mais je ne peux non plus pas lui mettre un quatre, il manque de puissance et de morceaux supérieurs. J’assume donc un trois que beaucoup vont me reprocher, il faut avoir conscience de nos faiblesses !