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The TEMPTATIONS - Puzzle People (1969)
Par LE KINGBEE le 18 Novembre 2022          Consultée 550 fois

Nous sommes en 1969, tout va bien aux States. En janvier, Nixon devient Président, succédant à Lyndon Johnson; un forage explose sur la côte californienne, provoquant une immense marée noire; Greenwich Village est le terrain des émeutes de Stonewall en faveur de mouvements LGBT; en avril, le contingent de soldats embarqués dans la guerre du Vietnam n’a jamais été aussi important, tandis que des Black Panthers sont incarcérés à New-York.
A part ça, tout va bien : en avril, le film britannique Oliver Twist rafle cinq Oscars; en juin, Neil Armstrong galope sur la lune; en août, durant trois jours, le Festival de Woodstock rassemble un wagon d’artistes devant plusieurs centaines de milliers de hippie et teenagers tandis qu’en octobre plus de deux millions d’Américains manifestent contre la guerre au Vietnam.

Musicalement, le monde de la Soul est en effervescence avec l’irruption fulgurante de SLY & THE FAMILY STONE. Les Fifth Dimension cartonnent avec "Let The Sunshine Inn", tandis que Candi STATON permet de mettre le label FAME et Muscle Shoals sur l’épicentre de la carte géographique de la Soul Music, alors que James BROWN lance une série de titres dédiés au Popcorn, nouvelle danse à la mode.

De leurs côtés, The TEMPTATIONS placés sous la houlette de Norman Whitfield connaissent une riche période, les best-sellers se succèdent à un rythme incroyable. L’ampleur de ces différents succès a cependant des incidences sur la formation. David Ruffin prend le melon et, victime de son addiction à la cocaïne, est congédié après moult écarts de conduite. Son remplacement par Dennis Edwards, ancien membre des Contours, coïncide avec un changement de tendances. Whitfield a senti le vent tourner, aussi bien au niveau des textes qui deviennent moins policés et plus militants que de la Soul qui s’imprègne de fragrances Psyché, parfum jusqu’alors réservé au Rock. Ce changement de tendances était déjà largement perfectible avec l’album Cloud Nine qui décroche un Grammy au passage. Cette nouvelle orientation persiste avec Puzzle People.

Si la pochette fait référence à un puzzle avec ses fines démarcations, ce sont surtout les fringues des cinq Tempts qui sautent aux yeux. Les costards bon chic-bon genre, style 'premier de la classe' et les costumes à paillettes sont remplacés par des tenues plus branchées, changement vestimentaire souligné par les nouvelles coupes afro. Norman Whitfield demeure toujours un important pourvoyeur en matière d’écriture ; le producteur a composé un titre et en a co-écrit sept avec Barrett Strong, son fidèle complice, auteur du hit "Money (That’s What I Want)".

Trois reprises agrémentent la galette, comme si celle-ci manquait de farine ou d’un ingrédient lui permettant de se différencier ou de décrocher le jackpot. Enorme succès des BEATLES, "Hey Jude" a fait le bonheur d’une kyrielle de groupes. Rien qu'en l’An de Grâce 1969, le titre tombe dans l’escarcelle de la Soul une dizaine de fois (de PICKETT à Dionne Warwick en passant par Diana ROSS et Smokey Robinson). Si les harmonies vocales sont ici supérieures à de nombreuses interprétations, l’intérêt d’une telle reprise semble des plus limités.
Titre hyper dansant des ISLEY BROTHERS, "It’s Your Thing" se situe un ton au-dessous de l’original, Whitfield ayant privilégié une ambiance Psyché au détriment du groove. Cette version souffre de la comparaison avec celles de l’originale et d’Ann PEEBLES.
Troisième cover avec "Little Green Apples" empruntée au countryman Bobby Russell. Cette ballade reposant sur les bienfaits de la famille a été reprise à toutes les sauces (de Dionne Warwick à Patti Page jusqu’à SINATRA, Tony Joe WHITE et les FOUR TOPS) dans des tambouilles souvent bien fades et proches d’un dogme bien-pensant. Après une intro de guitare d’une cinquantaine de secondes, Paul Williams nous offre une agréable litanie qui bizarrement ne reprend pas les huit premières strophes de la chanson comme si on avait voulu éviter les préliminaires. Chez nous, Sacha Distel reprend le titre en anglais et en français avec l’adaptation "Si ce n’est pas de l’amour". Claude FRANçOIS transpose le titre avec "Les petites souris", remplaçant les petites pommes vertes par des souris grises. Une adaptation ridicule qui mérite de figurer au premier rang de la tapette à souris ou de tout autre piège.

L’album s’ouvre sur un faux Live avec "I Can’t Get Next To You", titre aux parfums Funky et Psy bien dans l’ère du temps. La voix d’Eddie Kendricks constitue le parfait complément à celle de Dennis Edwards, nos chanteurs étant au comble du bonheur, disposant de tout ce qu’un homme peut désirer sauf de l’amour d’une femme. Le titre est l’objet de plusieurs reprises (Annie LENNOX, TOTO, The Osmonds) mais Al GREEN est celui qui en a délivré une cover plus goûteuse selon nous.
"Don't Let The Joneses Get You Down" s’avère encore plus rythmé, la voix de baryton de Melvin Franklin apporte une touche humoristique. The Truthettes en font une version Gospel plus sérieuse éditée par le label Malaco.
Si le tempo baisse de deux crans avec son intro de petits pizzicati de gratte, "Message From A Black Man" se révèle tout aussi intense, un appel à l’égalité à une époque où l’Oncle Sam envoyait au Vietnam de nombreux soldats noirs en guise de chair à canon.
Whitfield tente une habile refourgue avec "You Don't Love Me No More", une compo préalablement gravée par Gladys Knight & The Pips. Si la chanson sent moins la barbe à papa que l’originale, elle s’inscrit néanmoins dans le futur style des JACKSON FIVE. Procédé identique avec la ballade "Since I’ve Lost You", enregistrée par Jimmy Ruffin, Clay Hunt, Gladys Knight & The Pips. Le résultat ne paraît guère plus probant avec le retour à une Soul sucrée comme la Motown et Berry Gordy aimaient en sortir à la pelle. La version de The UNDISPUTED TRUTH nous paraît aujourd’hui encore plus intéressante.
Autre refourgue encore plus grossière avec "That’s The Way Love Is" *, titre que la Motown a usé jusqu’à la corde. Cette version manquant cruellement d’entrain, à l’image des reprises de Gladys Knight et de Marvin GAYE, a bien du mal à faire le poids face à l’originale des ISLEY BROTHERS.
"Slave"●, une œuvre nettement plus militante et consistante, achève l'opus. Débutant sur une grosse ligne de basse bien groovy, le titre s’ancre au fil des secondes dans un univers Soul Psy avec guitare wah-wah et distorsions et un texte coup de poing dénonçant les méfaits de l’esclavage : Hear that sound - Men from all works of life - Are living here in chain - Now, they're known by numbers. Une chanson que de nombreux Américains devraient réécouter au moment où les élections mi-mandat risquent de secouer le pays.

Alors que les TEMPTATIONS (il ne reste qu’Otis Williams de la line up d’origine) se sont produits à l’Olympia en octobre, Puzzle People figure avec Cloud Nine comme l’un des meilleurs disques de leur période Soul Psyché qui allait durer pendant quatre ans sous la férule de Norman Whitfield. Si tout n’est pas bon, l’album propose toutefois quelques morceaux forts à l’image de "Slave", "I Can’t Get Next To You" ou "Message From A Black Man". Si le répertoire s’annonce inégal, les passages de guitare wah-wah, l’apport d’une flûte restent d’excellents atouts, mais la carte maitresse des Tempts se situe au niveau des harmonies vocales pleines de richesse.

Note réelle 2,5.

PS: Faute de documentation et d'archive, la line-up n'est que suggestive.


*Titre homonyme à ceux de Bobby Bland et Del Shannon.
●Titre homonyme à celui des Rolling Stones.

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- Otis Williams (chant)
- Dennis Edwards (chant)
- Eddie Kendricks (chant)
- Paul Williams (chant)
- Melvin Franklin (chant)
- Robert White (guitare)
- Melvin Ragin (guitare)
- James Jamerson (basse)
- Uriel Jones (batterie)
- Earl Van Dyke (claviers)
- Jack Ashford (vibraphone)
- Eddie Brown (percussions)
- Dayna Hartwick (flûte)
- Eugene Moore (saxophone)
- Paul Riser (trombone)
- Herbie Williams (trompette)


1. I Can't Get Next To You
2. Hey Jude
3. Don't Let The Joneses Get You Down
4. Message From A Black Man
5. It's Your Thing
6. Little Green Apples
7. You Don't Love Me No More
8. Since I've Lost You
9. Running Away (ain't Gonna Help You)
10. That's The Way Love Is
11. Slave



             



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