Lorsque BLACKIELD nous revient fin 2020 avec un nouvel album, For The Music, on se demande un peu pourquoi Steven Wilson, en dehors de son amitié pour Aviv Geffen, continue à participer à une aventure qui ne mènera jamais ses deux protagonistes aux sommets qu’ils avaient un temps espérés. En effet, si Aviv, star en Israel, peut toujours espérer profiter de la notoriété internationale lentement mais sûrement croissante de Steven, ce dernier est plus que jamais à l’époque résolument tourné vers sa carrière solo et la sortie prochaine de son nouvel opus, The Future Bites.

Les règles restent ainsi les mêmes que celles des dernières œuvres du duo : Aviv se charge de l’essentiel du travail, de composition et de production, Steven n’apportant son aide qu’en temps qu’interprète sur 3 titres, en jouant de la guitare et en chantant sur quelques autres, plus bien entendu le mixage final dont il est désormais un maître reconnu. Cette fois cependant, très peu d’invités sont conviés, le duo se recentrant sur lui-même ; pas d’Alan Parsons ni de concept global reliant les titres, mais un retour à une forme de pureté artisanale et à l’essence du duo.
Celle-ci se manifeste de nouveau par des titres simples et courts, pas plus d’une ou deux idées par morceau, une atmosphère gentiment mélancolique mais sans excès, et une orientation générale plutôt pop avec des orchestrations simples souvent agrémentées de cordes qui donnent de la texture et de l’ampleur au son du duo.

L’album très court (30’) se déploie de façon simplissime : 4 titres chantés par Aviv, puis 3 par Steven, et les deux derniers de nouveau par l’Israélien.
Les titres interprétés par le Britannique me semblent cette fois les meilleurs, la voix de Steven aidant, mais aussi parce qu’ils sont plus fidèles à l’essence pop rock du duo : "Over & Over" est une compo très simple portée par un arpège élégant et un couplet gracieux, avant le joli développement instrumental du refrain et une pointe de nostalgie élégante. "Falling" n’est pas mal non plus mais souffre un peu de rythmes électroniques manquant de finesse. La dimension atmosphérique est en revanche réussie et le refrain plus que correct. "White Nights" enfin déploie une fort jolie mélodie, et ses développements plus rock en font probablement le meilleur titre de l’opus (belle partie de guitare lead de Steven au passage).

Les titres interprétés par Aviv sont nettement inégaux. "For The Music", "Under My Skin" et "Summer’s Gone" sont ouvertement pop et tournés vers les ondes et les pistes de danse. Si le premier passe à peu près malgré ses répétitions, le troisième, pourtant choisi comme single, est très fade et artificiel, alors que le second lorgne allègrement vers ABBA et le disco pour un résultat acceptable sans plus. "After All" est un titre plus classique pour BLACKFIELD, la voix de Aviv s’y montrant à la fois émouvante et imparfaite, trop pour emmener le titre vers de réels sommets. Même constat en plus sévère pour "It’s So hard". Le tempérament d’écorché vif de Aviv nous touche, mais sa musique ne prend pas l’ampleur ni la dimension espérées. Il nous reste "Garden Of Sin", jolie ballade où le chant de Aviv est soutenu par la guitare de Steven pour un résultat pur et plaisant.

L’album, malgré de jolis moments, me semble finalement un peu vain et sans réel intérêt : il ne retrouve pas la qualité de composition des opus précédents et échoue à renouveler le registre du duo qui en aurait pourtant bien besoin. Son absence de réelle ambition et sa durée vraiment trop courte finissent de me convaincre qu’il mérite cette fois une note légèrement sévère, même si objectivement le 3 n’était pas si loin.