Alors, cette cuvée 2023 de THE FLOWER KINGS ? On pourrait d’ailleurs presque parler de millésime tant le combo suédois nous donne RDV presque chaque année pour sa traditionnelle offrande. Ce nouvel opus Look At You Know, joliment intitulé et illustré, nous arrive en effet à peine plus d’un an après By Royal Decree, double-album qui avait modérément convaincu, mais faisait suite à deux autres mastodontes très réussis.
On sait qu’en plus de son groupe fétiche, le fondateur et leader Roine Stolt a participé entre temps au formidable dernier album de TRANSATLANTIC et à une tournée triomphale immortalisée par un dernier concert et un DVD Live à l’OIympia. Mais à l’instar de son complice Neal Morse, notre blond guitariste n’est pas du genre à se tourner les pouces. La surprise de cette nouvelle offrande concerne donc plutôt sa durée : 13 titres assez courts pour 69 minutes de musique (quand même), c’est plutôt une bonne surprise car nos Scandinaves ont souvent frôlé l’excès et la démesure quant à la quantité de musique qu’ils proposent. On pouvait même imaginer que cet effort de concision allait leur permettre de se concentrer sur des titres réellement marquants et éviter de trop délayer leur rock progressif.
Sur le plan musical, pas de grande surprise, les ingrédients développés dans l’opus restent globalement identiques à ceux des précédents : une tonalité globale proche des grands inspirateurs des 70’s (YES et GENESIS en tête) pour une musique assez libre et ambitieuse, dans une ambiance sereine et optimiste. Le chant est toujours partagé entre Stolt et Fröberg, le reste de l’équipe ne bougeant pas ; les claviers (omniprésents dans l’opus) sont tenus alternativement par les membres du combo et les compos s’articulent essentiellement autour de ces éléments classiques sans renouveler les incursions Jazz de certains des opus antérieurs (dommage).

Si aucun titre n’est mauvais ou désagréable, force est de reconnaître que rien ne sort véritablement du lot. "Beginner’s Eye" est une entrée en matière certes sympathique et enjouée, mais tellement exempte d’aspérité que l'impression est que le titre se termine avant d’avoir réellement commencé.
Plus intéressant, "Hollow Man" me fait immanquablement penser à la musique du Parrain de Nino ROTA, en particulier la scène de la procession, du coup le titre devient intéressant. J’aime bien aussi "Mother Earth" à l'intro 100% QUEEN (voix et sons de guitare), avant que le titre développe une belle ambiance sur un tempo un peu plus vif qu’ailleurs.
"The Queen" (décidément) est un instrumental lancé par une belle intro à la guitare classique dans un style renaissance sympa (on pense beaucoup à Steve HACKETT), avant le développement d’une belle ambiance méditative ornée de mellotron et l’entrée d’une guitare incisive qui dote le morceau de jolies lignes de lead. Rien de révolutionnaire, mais un chouette titre.
Mon préféré est néanmoins "Strongehold" (6’46 au compteur) : une intro épique avec une batterie martiale nous porte vers de jolies harmonies légèrement orientales bien soutenues par la guitare, alors que la voix de conteur de Stolt installe une ambiance assez mystérieuse. Le titre est également gorgé de belles parties de claviers et du meilleur solo de guitare de l‘album, bien musical et gilmourien, aux antipodes de toute démarche de Shreddeur.

Parmi les autres titres, "Look At You Know" s’impose par sa durée (11’49) et sa dimension progressive par les alternances de tempos et d’ambiances, même si les surprises y sont finalement plutôt rares. C’est une pièce agréable et sans aspérités, mais à laquelle il manque des moments réellement marquants, même si les parties de batterie notamment sont intéressantes et certains passages de guitare sur rythmes latins évoquent un peu Carlos SANTANA.
Le chant de "Day For Peace" est partagé avec Marjana Semkina, chanteuse du groupe pop IAMTHEMORNING, sur un rythme de boléro assez réussi. "The Dream" me fait un peu penser à un titre taillé pour l’Eurovision, dont la Suède est grande spécialiste, pas folichon donc.
Le reste des morceaux est un peu du même tonneau, rien ne heurte l’oreille mais rien ne la flatte réellement non plus.

C’est un bilan en demi-teinte que nous pouvons tirer de ce nouvel album ; le passage au format 'simple' ne s’accompagne pas réellement d’un regain d’inspiration, malgré de beaux moments, et cet opus ne restera pas comme un classique ou un incontournable des Suédois. Ne vous privez pas néanmoins d’y jeter une oreille si vous êtes amateurs, vous y trouverez probablement de quoi vous y sustenter, pas un grand cru mais un honnête travail de professionnels aguerris qui fait son effet dans la durée et mérite un bon 3.