Moins d’un an après BB/Ang3l, TINASHE marque son retour en cet été 2024 avec son septième album studio Quantum Baby. Ce disque - comme le dernier - s’inscrit dans la lignée des projets indépendants de la chanteuse qui, depuis sa séparation d’avec RCA Records, explore de plus en plus librement sa créativité. En mode Mad Max sur la pochette, TINASHE se la joue sensuelle sous le soleil rude du désert, un décor surprenant mais qui fonctionne plutôt bien avec ce R&B sensuel qu’elle nous rabâche, il faut bien l’avouer, depuis le début de sa carrière.

Danseuse accomplie, il faut la voir secouer son popotin comme une furie dans le clip du single "Nasty", un titre qui reste viral depuis sa sortie en avril grâce à ses paroles évocatrices (I got stamina, they say I’m an athlete/Is somebody gonna match my freak?/Need somebody with a good technique/Is somebody gonna match my nasty?/Pillow talking got my throat raspy). Les synthés discrets se mêlent au rythme trap lent et hypnotique pour mettre en valeur la voix douce et sensuelle de la chanteuse dans un ensemble bien commercial.

Elle nous rebat peut-être les oreilles avec cette volupté à tout-va, cela incarne pourtant son essence, et celle du R&B moderne. Loin de l’introspection des premières chansons de TINASHE, les titres de Quantum Baby portent le plus souvent sur l’amour physique et le désir charnel.

La chanteuse de 31 ans l’exprime de manière plus ou moins subtile, par exemple assez discrètement sur le beat énergique du single aux accent électroniques "Getting No Sleep" (I look better all-natural/Early mornings so casual/We ain’t getting no sleep, no, no) ou d’une voix susurrée sur l’ambiance onirique de "When I Get You Alone" (Tell me when you’re ready/Imma lay you down, take it nice and slow/Fuck with you heavy/But now we’re finally falling in love). Par contre, on nage dans une tentation sans équivoque sur "Thirsty" (Damn, daddy, don’t play, don’t hurt me/Don’t I make you so thirsty?/‘Bout to waste my time, heart’s not in it, but the dick all mine). Et oui, tout le monde le sait, il fait chaud dans le désert !

Elle calme un peu le jeu sur le titre "Cross That Line" pour parler de ses envies long-terme parce qu’elle est tout de même une romantique dans l’âme (Can’t you see the signs?/You see me right here/Standing right in front of your eyes/I could be the love of your life/I’m ready to cross that line), ou encore tout en harmonies sur "No Stimulation" (These days, I wanna feel it/No stimulation, it’s gotta be true/I’m looking for truth/Love is truth). TINASHE explore les relations toxiques et expérimente un peu sur l’instru toute atmosphérique de "Red Flags" (When I see your face, you remind me of my mistakes/I don’t wanna stay, don’t wanna go).

Au-delà du potentiel buzz qu’une chanson comme la pop de "No Broke Boys" détient, ce n’est pas juste un titre sur l’attirance, c’est aussi l’hymne d’une femme assurée qui ne s’excuse de rien (Ex on the line, just as I suspected/No one really gets over me), surtout pas d’exprimer ce qu’elle veut. Jamais effrayée d’aborder des thèmes souvent considérés comme tabous, TINASHE continue de renverser le script de l’amoureuse passive pour exprimer avec franchise cette sensualité qui est aujourd’hui une de ses marques de fabrique.

Comme l’an dernier, TINASHE nous livre moins de dix chansons (8 pour être exacte) et on ne peut s’empêcher de remarquer la vitesse à laquelle elles défilent. En réduisant de moitié le nombre de titres par rapport à ses premiers projets, TINASHE s’adapte peut-être à l’économie du streaming ou pour être facilement partagée sur les réseaux sociaux avec des morceaux plus concis, mais ce format court lui permet aussi indéniablement d’expérimenter davantage et de renforcer sa pertinence sur un marché de plus en plus concurrentiel. Alors non, il n’y a rien de vraiment surprenant sur Quantum Baby, il faut dire que 22 minutes, ça passe vite et ça s’écoute les doigts dans le nez, même sous le cagnard du désert.