La vie de rock star, vous connaissez ? Pour nos amis de REO SPEEDWAGON, elle reste assez sobre si l’on en juge par cette pochette évidemment signée Hypgnosis : un téléphone décroché, une bouteille de champagne sur le sol, une chaussure de dame peu farouche. On remarque d’ailleurs que l’extincteur est toujours rangé derrière le chariot de cette brave femme de ménage qui a peur de ce qui semble l’attendre dans cette chambre d’hôtel. Bref, après les 10 millions d’exemplaires de High Infidelity écoulés dans le monde, les gars de l’Illinois ont décidé de se la jouer facile. Il s’agit de leur dixième opus et la page des années huitante s’est tournée, et avec elle les évolutions musicales et adaptations nécessaires à un monde désormais dominé par l’électronique. Le REO doit y trouver sa place.

Cette fois, il n’y a plus le moindre doute, les trois singles proviennent de la plume de Kevin Cronin. "Keep The Fire Burnin" est une petite bluette AOR où sur un ton monocorde Kevin Cronin tache de surfer sur le succès des précédents singles. La piano est omniprésent et la gratte de Gary Richrath plus discrète à mon sens. Ce titre n’est pas ridicule, mais je lui trouve une ambiance gnangnan assez désastreuse. Il devient numéro 7 du billboard, ce qui n’est pas si mal. De la chialante nous avons ! "Sweet Time" propose quelques grattes twin et une vibe taillée pour le top des eighties. Bien que ça ait super mal vieilli, il atteint la 26ème place. "The Key", le dernier single de cet opus, chasse sur les terres du premier. Je ne peux m’empêcher de trouver toujours un aspect kitsch aux compositions de Kevin, ce titre ne va même pas charter.

Kevin a aussi composé "Good Trouble" qui nous ramène à des données hard rock d’extraction plus agressive, ce qui n’est pas si difficile, vu le reste de l’opus. Le bassiste Bruce Hall se pointe cette fois avec deux titres : même si les "Hey Hey" me tapent un peu sur le système, "Girl With A Heart Of Gold" me touche davantage. La mélodie se laisse bien apprivoiser et on à envie de chanter avec lui. "Let’s Be Bop" réveille un peu l’auditeur en train de sommeiller, le titre est en effet un brin plus trépidant et donne un peu de lustre à cet album qui au final mérite sa pochette et n’attire pas les passions.

Gary Richrath s’est gardé une bonne partie des faces de ce 33-tours, malgré l’évidente prise de pouvoir de son chanteur. Cela nous donne "Every Now And Then", aux accents pop et au ton un brin molasson. On s’étonne de trouver le piano si véloce de "I’ll Follow You" qui semble copier la voie choisie par Kevin et ses singles à succès. Ce genre de titres a fait le buzz dans les eighties. Il faut admettre que tout ceci passe mal la rampe des années. Rien de désagréable mais comme un coup d’épée dans l’eau. Les intonations de "Back In My Heart Again" me tapent aussi sur le système. Dieu merci, Gary s’est gardé quelques solis limpides pour la bonne cause. "Stillness Of The Night" propose enfin un peu de tranchant avec son rythme bien enlevé et un solo de synthé de notre camarade discret Neal Doughty.

Vous avez aisément remarqué que pas un seul titre de cette galette ne me semble digne d’une quelconque postérité. Il n’y a pas de filler, juste des titres d’une platitude et d’une mollesse redoutables, notamment les compositions de Cronin, pourtant habitué aux jolies places du billboard. Un faux pas évident après l’incroyable succès du précédent album. Pour moi, rien à retenir, je reste donc sur un deux très modeste.