Il est bien complexe d’aborder le sixième opus de la carrière de SEAL. Après un System d’excellente facture, voilà que le grand black nous balance ce qui est à ce jour son plus grand succès à peine un an après, à l’encontre de ses habitudes. Or, il s’agit d’un album de reprises. Constat d’échec ? Contournement des critiques ? Foutage de gueule ? Difficile à dire, le personnage est sympa comme tout, son talent indéniable, mais visiblement, les professionnels de la musique attendent de lui plus qu’une quinzaine de millions d’albums vendus de par le monde.

Et nous voila avec ce Soul entre les mains. Le premier constat, évident, c’est que le risque est absent dans le choix des chansons qui composent le disque. Car nous avons ici, « I Can’t Stand the Rain », « It’s a Man’s World » ou « A Change Is Gonna Come » qui sortiront toutes les trois en single. Choix judicieux, facile et finalement efficace. La voix de SEAL fait sienne les standards de James BROWN, de Sam COOKE, ou même le chef d’œuvre de Ann PEEBLES « I Can’t Stand the Rain ». Pas compliqué de faire du superbe avec du sublime. Et les compos s’égrènent, Otis REDDING et Al GREEN traversent le paysage avec beaucoup d’à propos. Et la voix du géant jamais ne s’enraye. C’est donc une très belle performance à mettre a son actif.

Cependant, ne soyons pas dupes. Il s’agit ici de calibrage avant tout. L’élément qui m’attriste le plus est sans doute le manque de jugeote d’un public privé de bon sens et du moindre esprit critique. System s’est mal vendu, Soul est un franc succès… Les compositions de SEAL sont pourtant excellentes et tiennent la dragée haute aux grands classiques de la pop. Tachons d’admettre qu’il voulait rendre hommage aux parrains de la soul, une portion de ses grandes influences. Certaines reprises sont étonnantes. C’est le cas de « Here I am » d’Al GREENE. « Knock on Wood » est dansante comme il se doit, en revanche, la version de « Stand by me » est beaucoup trop rapide à mon goût ; SEAL s’y perd en circonvolutions inutiles qui n’honorent nullement Ben KING. Même le néophyte le plus innocent ne pourra pas ne pas reconnaître la quasi-totalité des tubes présents ici. « It’s all right », « If you Don’t Know me by Now », dont nous avions déjà eu la reprise par le groupe SIMPLY RED. On sent en outre nettement l’influence d’un morceau comme « Free » sur les compo personnelles de SEAL. Il y a tout de même une part de lui-même dans ce skeud.

Dois-je l’absoudre pour autant ? Ce qui me chagrine, c’est que tout grand chanteur aimant la soul est susceptible de sortir un tel album sans trop se casser le nanard. Une production à la hauteur, des arrangements de qualité et voila un disque qui se vendra a plusieurs millions d’exemplaires… J’avoue préférer la démarche d’un Georges MICHAEL avec son « Song of the Last Century », il y a quelques années. L’ex-chanteur de WHAM était en pleine bourre ; son disque était réellement un hommage. Je ne suis pas convaincu par l’éthique de cet opus. Voila tout mon problème. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Le business de la zique n’est pas philanthropique, mais trop de facilité tue le talent dans l’œuf. Je suis donc partagé entre la qualité de l’album, indéniable car SEAL est à la hauteur de tous ces classiques, et une volonté mercantile qui me fait penser au fond de la cuve à whisky d’une distillerie… On fourgue la came parce qu’on n’a rien d’autre. Le procédé ne me plaît guère.

Donc 4/5 en termes de musique
Mais 1/5 en termes d’honnêteté.
A vous de faire votre choix.