Le repos occasionné par GENESIS s’allonge et Mike RUTHERFORD trouve le temps de faire paraître un deuxième album avec les MECHANICS, entre Invisible Touch et We Can't Dance. Le succès de l’album et de la tournée The Living Years ont dû renforcer son plaisir à créer, puisque Word of Mouth, qui se traduit en français par "bouche à oreille", et là où son prédécesseur pouvait paraître mélancolique par moments, est un album marquant un retour (partiel du moins) à la bonne humeur et un sens de l'efficacité plus aiguisé en matière de compositions accessibles. En témoignent ne seraient-ce que les trois grands tubes : "Get Up", "Word of Mouth" et "Everybody Gets a Second Chance".

Une plus grande efficacité, cela signifie précisément "une plus grande efficacité pop", et il faut dire que les chansons de Word of Mouth, même si elles ne sont pas toujours menées sur le même train que celles de The Living Years, obtiendront à peu près la même considération, quasi-nulle en dehors des tubes. C'est bien le problème de MIKE & THE MECHANICS. Leur renommée est mondiale, ils font de super tubes, mais c'est un peu comme si ils ne faisaient que ça (ce qui est déjà pas mal). En Amérique, vous posez la question toute simple. "Mike & The Mechanics ?" On vous répond "Oh yes, I like "Silent Running", "The Living Years" and "All I Need is a Miracle" !" Faites la même chose en France et c'est encore pire, on vous sort pas un nom de chanson. Pas un. Si vous faites écouter "Over My Shoulder", l'unique véritable tube de l'album suivant, à la rigueur la personne se souviendra de la chanson parce qu'il l'avait entendue à la radio, mais bon c'est tout... C'est un peu malheureux car des albums pop FM comme Mike & The Mechanics, The Living Years et donc Word of Mouth sont d'une très grande qualité.

Ce dernier est comme je l'ai dit plus facilement assimilable pour l'amateur de pop moyen que le précédent. La chanson-titre est un très bon morceau rock, enregistré live, avec une ambiance public du moins et interprété avec ferveur - un peu comme toujours - par Paul YOUNG. Le refrain est à l'image du groupe, très simpliste et communicatif, tant dans le texte que dans la musique. Les deux autres tubes sont chantés par Paul CARRACK et sont plutôt joyeux, chacun à leur manière : "Everybody Gets a Second Chance" étonne par son côté très gentille pop sixties, tandis que "Get Up" met du baume au coeur, faisant même bouger la tête avec son tempo enlevé et ses parties de claviers (piano et orgue) absolument réjouissantes. Une convivialité qui a su toucher le public là par contre, de la manière la plus juste, en espérant qu'il s'en souvient.

En revanche, le reste de l’album est pour ainsi dire "un peu" tombé dans l’oubli, et c’est une fois encore fort dommage. Les ballades comme "A Time And Place" et "Stop Baby" sont fort jolies, à placer parmi les meilleures que le groupe ait composé. La seconde est, il est vrai, moins évidente, c’est plus une chanson à ambiance : cela vient des claviers, il y a d’ailleurs un très beau jeu de fausses flûtes à la fin. Il est amusant que ce soit plutôt le style de chanson sur laquelle on s’attend à entendre Paul CARRACK (comme sur "A time and place"), mais ici c’est YOUNG, il s’en sort très bien, et comme ça le groupe a respecté sa directive de ne pas mettre plus de deux titres consécutifs chantés par le même interprète. Ben oui si vous regardez, le groupe marche comme ça et il n'a jamais transgressé cette règle, du moins (forcément) quand Paul YOUNG était en vie.

Dans le style moins évident, on peut aussi citer "Yesterday, Today, Tomorrow", un peu le "Hanging By a Thread" de l’album (à la même place en plus), en un peu plus répétitif et moins fouillé cependant, mais tout aussi bon. Dans le genre bijoux trop méconnus, je citerais volontiers "The Way You Look at Me" qui rejoint les hits de l’album sur le plan de la bonne humeur et les deux morceaux de fin d’album : "My Crime of Passion" (dont il a existé une version acoustique en single), très réussie et "Let’s Pretend It Didn’t Happen". Cette dernière, limite épique, atteint des sommets en grande partie encore une fois grâce à Paul YOUNG. L’album se termine de manière dense avec un esprit gospel, un chœur de voix rejoignant celle de CARRACK, le tout formant ainsi un lien avec le style de musique que ce dernier aime bien faire en solo. Le morceau tire un peu en longueur mais reste sympathique, notamment pour son crescendo.

Parmi les autres intervenants, on remarque la présence de ce cher Pino, devenu habitué des sessions GENESIS (à la même époque il aura été chez Tony, chez Phil et donc chez Mike), de Tim RENWICK, second guitariste de PINK FLOYD en live à cette même époque, ainsi que celle de Phil TODD, saxophoniste assez réputé et très bon, bien que je n’aime pas l’esprit "agressif" de sa seule intervention sur "Everybody Gets a Second Chance". De toute manière je n'aime pas du tout la chanson alors...

Le bouche à oreille, choisi pour titre, n’aura que plus ou moins vraiment porté chance à l’ensemble une fois de plus. Cet album souffre aussi de n’avoir pas été suivi d’une tournée, le retour à GENESIS ayant sonné pour Mike aussitôt après sa finition. A redécouvrir.