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Kate BUSH - The Dreaming (1982)
Par MARCO STIVELL le 21 Septembre 2010          Consultée 7374 fois

Il y a certains albums dans le milieu de la chanson dite 'populaire' (vaste terme dans lequel j'englobe principalement pop, rock et folk), qu'elle soit francophone, anglophone ou autre, qui troublent et à la fois ne trompent pas. Je vais finir par devenir célèbre avec mes contresens à la noix. Pourtant, c'est la stricte vérité, il n'y a qu'à piocher parmi les meilleurs exemples et pas toujours les plus connus. Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band du groupe THE BEATLES, celui-ci pas de problème, il est suffisamment connu. Dans le genre titre à rallonge et toujours dans la même catégorie de disque, il y a une décennie plus tard dans le paysage musical de l'hexagone, L'Extraordinaire Tour de France d'Adélard Rousseau, dit Nivernais la Clef des Coeurs, Compagnon Charpentier du Devoir (à dire sans reprendre son souffle) de MALICORNE, le plus beau fleuron du mouvement folk français des années 70. Nettement moins connu que le disque mythique des Fab Four, cet autre album 'concept' n'en garde pas moins la même ligne directrice, celle de proposer une musique quelque peu exigeante (du moins on va dire plus que le reste de l'oeuvre) avec une profusion de sons et d'arrangements originaux qui la rend plus riche que les autres albums de musique contemporaine.

The Dreaming fait partie de ces albums-là et, contrairement à Sgt Pepper's, il sera incompris, oublié, boudé, sauf par une poignée d'irréductibles fans qui voient en lui la plus belle représentation de ce génie féminin qu'est Kate BUSH. A même pas vingt-cinq ans, la jeune femme publie en effet l'un des disques les plus fouillés des années 80 qui, malgré la présence de sons et d'instruments contemporains, se révèle bien peu compatible avec l'urgence de la new-wave à produire des oeuvres que l'on qualifie souvent de 'commerciales'. Ah ça, il est clair que ça ne le concerne pas... C'est en cela qu'il se révèle encore plus attachant.

Les rentrées d'argent grâce à Never For Ever (1980) et notamment le bien connu single "Babooshka" ont permis à la belle Kate d'acquérir un instrument qui en ce début d'années 80 allait voir sa cote de popularité grimper en flèche, en particulier grâce à des albums comme The Dreaming (ou le Security de... Peter GABRIEL !) : le Fairlight CMI. N'ayant été jusqu'alors que sous-jacent dans la musique de la jeune femme - seuls deux titres du précédent album en portaient la marque - et bien que celle-ci comprenait beaucoup de synthétiseurs, ce clavier-ordinateur joue ici un rôle déterminant avec des sons et échantillons bruitistes de toutes sortes, qui rendent l'écoute de The Dreaming encore plus éprouvante... ou passionnante. Dans mon cas, il y a eu les deux. Non pas que j'aie été déçu par cet album, mais entre 'éprouvante' et 'passionnante', il convient d'ajouter le mot 'déroutante'.

Toujours est-il que, s'il est vrai que les premières écoutes peuvent s'avérer difficiles, The Dreaming révèle progressivement ses petits trésors qui ne figurent pas parmi les moindres de la carrière de Kate BUSH. On finit même par l'adorer, cet album. La belle joue sur une diversité musicale qui rompt avec l'unité de ses deux premiers albums The Kick Inside et Lionheart, mais qui du coup donne nettement moins l'impression de linéarité. L'excellent "There Goes a Tenner" en est une belle preuve, partagé entre ses couplets sautillants délicieusement mâtinés de cuivres et ses petits passages plus doux et rêveurs. Il y a ici comme dans le reste un fourmillement de détails au niveau des arrangements qui se laissent savourer, aussi bien en ce qui concerne la voix et les choeurs - Kate allant jusqu'à hurler de manière déchirante sur les "Get Out of My House" et "Pull Out the Pin" - que les instruments, avec notamment des jeux de cordes trafiqués comme sur "Suspended in Gaffa", les effets tribaux du morceau-titre, la contrebasse tout en nuance de "Pull Out the Pin", une rythmique puissante sur une bonne majorité des titres (ah cette entrée de la batterie sur "Leave it Open" !), pour ne citer qu'eux. On loupe complètement au premier abord des passages musicaux d'une importance capitale comme les développements de "All the Love" et "Houdini", tout simplement sublimes.

The Dreaming est aussi l'occasion pour la jeune femme de faire un travail inédit centré sur des thèmes bien ciblés comme une dénonciation de la guerre du Vietnam ("Pull Out the Pin") ou les revendications des Aborigènes en Australie sur la chanson-titre, d'où le choix logique du didgeridoo et celui moins aisément compréhensible mais tout aussi bienvenu de la cornemuse irlandaise de Liam O'FLYNN lors du final. Cette dernière essaye à ce propos de se faire une petite place dans cette musique qui, de manière globale pour cet album, se fait plutôt torturée, essentiellement basée sur des traitements vocaux et synthétiques, ce qui n'arrange pas la facilité d'écoute ni d'appréciation pour l'amateur de pop ou de variété, même moderne.

En revanche, encore une fois, il y a une écoute qui finit bien par débloquer le tout, et lorsqu'on y est, on ne lâche plus prise. Certains titres font un effet monstre, avec des mélodies, des ambiances, des arrangements d'une qualité colossale, aussi bien sur les titres les plus exigeants ("Houdini" - évidemment dédié au magicien anglais -, "The Dreaming"...) que sur les plus introspectifs et faussement plus accessibles ("Night of the Swallow" en priorité), ou encore sur les rares tubes potentiels plutôt placés en début de disque.
Vraiment un excellent album qui va encore plus loin que le précédent sur le chemin de l'expérimentation, mais aussi de la qualité. Paru en même temps que le non moins génial quatrième album de Peter GABRIEL. Encore un petit effort et la belle ira plus loin encore sur le chemin du succès.

Note réelle : 4,5

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   MARCO STIVELL

 
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- Kate Bush (chant, piano, synthétiseurs, fairlight cmi)
- Alan Murphy (guitares)
- Del Palmer (basses)
- Esmail Sheikh (batteries)
- Richard Thornton (chant, choeurs)
- Bill Whelan (arrangements des cordes & cuivres)
- Danny Thompson (contrebasse)
- Rolf Harris (didgeridoo)
- Stewart Arnold (choeurs)
- Jimmy Bain (basse)
- Ian Bairnson (guitares, choeurs)
- Brian Bath (guitare électrique)
- Paddy Bush (choeurs, cordes, harmonica, mandoline, percussions)
- Geoffrey Downes (trompette, arrangements des trompettes)
- Percy Edwards (choeurs)
- Stuart Elliott (batterie, percussions)
- Gordon Farrell (batterie, choeurs)
- David Gilmour (choeurs)
- Paul Hardiman (choeurs)
- Preston Hayman (batterie, percussions)
- Gary Hurst (choeurs)
- Dave Lawson (synthétiseurs, synclavier, arrangements des cordes)
- Eberhard Weber (basse)
- Donal Lunny (bouzouki)
- Sean Keane (violon irlandais)
- Liam O'flynn (cornemuse & flûte irlandaises)


1. Sat In Your Lap
2. There Goes A Tenner
3. Pull Out The Pin
4. Suspended In Gaffa
5. Leave It Open
6. The Dreaming
7. Night Of The Swallow
8. All The Love
9. Houdini
10. Get Out Of My House



             



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