Un an après le premier album, AEROSMITH remet le couvert avec un nouveau producteur qui sera celui des 3 suivants. Get Your Wings accroche davantage le Billboard américain, sans toutefois atteindre des scores à se relever la nuit. Et pour cause : la marmite étant la même, et les ingrédients itou, pas de raison que la soupe se vende beaucoup plus. Sur les trois 45-tours sortis par la maison de disques, un seul se classe dans les charts ("Same Old Song and Dance").

La soupe, pourtant, est bonne : 5 mecs qui veulent en découdre avec un rock plutôt rageur et un talent indéniable pour balancer du riff, avec à leur tête ce lynx des bas-quartiers qui miaule et harangue comme pas deux, armé de son grain et de son vibrato bien à lui. Mais il leur manque encore un atout indispensable pour devenir grands : l’écriture. La plupart des morceaux de Get Your Wings ne sont pas horribles, mais peinent à accrocher l’oreille faute de refrain bien trouvé, d’équilibre, de rythme. Tyler n’est plus le seul à composer, Perry ou Kramer s’y mettent aussi mais ils plafonnent. La preuve en est : le meilleur morceau de l’album est une reprise ("Train Kept a Rollin").

Ce "Train Kept a Rollin" explose joliment la version des YARDBIRDS. Plus de puissance, de force brute, plus de burnes, quoi ! Et une accélération en deuxième partie qui laisse les doutes cloués au sol. Ce groupe sait emballer une affaire ! Sans compter les progrès de Joe Perry qui déroule des parties rapides et précises, un régal. Ce morceau deviendra leur signature de fin de concert jusqu’à leur fin de carrière. Un autre titre mérite louanges : "Lord of the Thighs". Bon riff monocorde qui ancre l’auditeur dans une ambiance ténébreuse, refrain pour casser le rythme, et ça repart dans d’inquiétants et nerveux assauts de guitares. Probablement un de leurs meilleurs titres, également fantastique dans le live bootleg de 1978. Si seulement tout cet album était de ce calibre !

Après avoir ajouté l’inaugurale "The Same Old Song and Dance" à notre shopping list (assez banale au premier abord, elle reste imprimée dans le crâne et s’avère franchement entraînante), on se retrouve sans rien à se mettre sous la dent. La ballade "Seasons of Wither" est faible, "Woman of the World" est quelconque, "S.O.S (Too Bad)" recycle des motifs éculés.

Les 3 morceaux cités plus haut en font un album indispensable pour tout amateur du genre, mais la faiblesse du reste fait que cette cuvée 74 laisse sur sa faim. Beaucoup moins puissant que LED ZEP, moins doué que DEEP PURPLE, moins sombre que BLACK SABBATH, moins électrisant et radical qu’AC/DC, AEROSMITH est coincé au milieu de la route, et va devoir acquérir un savoir-faire dans l’écriture s’il veut passer dans la Champions League des groupes !

Ce sera le cas au prochain album.