L’heure est à la reconnaissance : les DOGS apparaissent à la télé dans la spéciale Rouen des « Enfants du rock », sont plébiscités par les magazines spécialisés, ont su fidéliser une fan base fidèle, et enregistrent désormais dans des conditions excellentes. Il faut concrétiser… Chose qui pour un groupe de garage rock, n’est pas une évidence. Le choix se porte sur les studios Rockenfield de Dave EDMUNDS au pays de Galles, là ou les STRAY CATS ont pondu leurs plus grands albums. Hélas le budget alloué convient à peine à un 45 tours. Mais les chiens vont faire le tour de force d’enregistrer avec ce budget tout un album. Cependant, admettons que le choix des morceaux et le look de la pochette ne m’avaient guère emballé à l’époque après le superbe « Legendary lovers », et c’était avec une légère appréhension que j’avais posé le saphir sur le microsillon de ce cinquième album en 85.

Alors certes, il n’y a pas dans ce shout la flamboyance des deux précédents opus, et c’est vraiment là que pêche ce skeud. Néanmoins il est gorgé jusqu’à la gueule de titres en béton armé, taillés pour la scène et autres tueries en règle.

« Pah pah ooh pah ooh » qui ouvre l’opus situe bien le précarré de l’action : « on est toujours un garage band et on s’éclate » ! Alors, oui c’est super, mais peut-être eut-il mieux valu une vraie composition, un truc qui prend aux tripes comme « Too much class » ou « Never come back ». Dom en a voulu autrement.
Du coup, nous évoluons dans des standards propres aux sixties, entre les KINKS et les ANIMALS dont la reprise « When I was young » est une petite merveille d’efficacité. La musique est superbe, mais en aucun cas taillée pour les superficielles eighties. Le « Shop around » des MIRACLES est passé à la moulinette rouannaise, et ça donne ! Je n’ai jamais été un gros fan de « Hey Belinda » mais le morceau dépote grave, c’est sur. Le « Shout » des ISLEY bros passe bien à nouveau, on ressort de la naphtaline « Down at lulu’s » de THE OHIO EXPRESS

Et puis il y a les compositions originales... « Good morning do you love me » porte l’empreinte de Dominique, avec ses licks de guitare, sa science des transitions et un joli solo. On peut faire la même analyse de « I wanna be with the boys ». L’auto reprise en roue libre de « A différent me » est plus rapide que l’originale, le procédé me laisse plutôt dubitatif, et je n’en vois guère l’intérêt si ce n’est de présenter à nouveau leur premier grand classique. Ensuite, il faut laisser parler le talent : sur « Somebody », Dominique se paye la tête du King ELVIS en singeant quelque peu « Fever » avec une maestria monstre, ça force le respect ! Enfin, un autre titre en français est sur les bonus de la réédition CD, il s’agit du 45 tours « Mon cœur bat encore ». C’est marrant de constater combien l’utilisation de sa langue maternelle rend Dominique sans doute moins efficace, mais plus poétique.

Au final, ce cinquième opus ne fera pas franchir au groupe le palier supplémentaire qu’il lui aurait fallu pour acquérir la reconnaissance à laquelle il avait pourtant droit. Le choix de positionner pas mal de reprises, ainsi que le manque de moyens ont sans doute joué dans les choix opérés par Dominique Laboubée. On ne refera pas l’histoire, mais il me semble, en tant que fan, que c’est à cet instant que s’est joué le destin des DOGS. Il n’empêche que l’album est excellent de bout en bout, un véritable tour de force. Un 3,5 et des brouettes que j’arrondis à la supérieure car on parle du meilleur groupe de rock français les gars !