Le carton de + (2011) et des singles qui en sont issus ont permis au jeune Ed SHEERAN d'entrer dans la caste très fermée des artistes avec qui "il faut travailler" à l'heure où j'écris ces lignes. Ainsi, les ONE DIRECTION et TAYLOR SWIFT peuvent-ils se targuer d'avoir sur leur dernier disque des compositions de la dernière sensation folk/pop du moment. La consécration planétaire est même venue lorsqu'Ed s'est vu inviter à chanter à la cérémonie de clôture des J.O. de Londres accompagné par Mike Rutherford et Nick Mason, puis demander de composer un titre pour le blockbuster "Le Hobbit : la désolation de Smaug". Autant dire qu'à l'heure d'écrire et d'enregistrer son deuxième album, les portes sont large ouvertes pour le jeune artiste, qui peut désormais compter sur le soutien de grands professionnels pour l'épauler. Jugez plutôt : en plus du fidèle Jake Gosling qui avait produit et co-écrit la quasi-totalité de +, Rick Rubin et Pharell WILLIAMS sont de la partie ! Rien de moins qu'une légende de la production et l'auteur/compositeur/interprète du tube mondial de l'année 2014... Dès lors, le titre de l'album s'explique aisément : au-delà de sa fidélité aux symboles mathématiques, Ed SHEERAN a voulu montrer qu'il entendait étendre sa palette et tenter des choses différentes. Il faut dire que les critiques n'ont pas toujours été tendres lors de la sortie de + : nombreux sont ceux qui lui ont reproché de se cantonner à un registre folk/pop, alors que la flexibilité de sa voix lui permettrait sans problème de briller par-delà sa zone de confort.

Les deux premiers titres du disque n'ont pourtant rien de déroutants pour les amateurs du premier album. Le très calme "One" et le plus énervé "I'm a Mess" conservent une orchestration sobre. Mais la première grosse claque survient à l'écoute de l'imparable "Sing" : intro et phrasé pop, rythmique RnB, break chanté en falsetto, refrain on ne peut plus direct, puis scansion rappée parfaitement maîtrisée. Pas de doute, l'apport de PHARELL WILLIAMS permet au rouquin de surprendre son monde et de signer le premier carton de l'album. Le refrain risque à la longue de taper sur le système, mais il est difficile de faire plus fédérateur dès la première écoute. En revanche, "Runaway", l'autre titre co-écrit et produit par le chanteur de "Happy", déçoit par son côté banal. Les autres chansons affirmant ce virage RnB ne sont pas forcément inoubliables non plus : le single "Don't" est dépourvu de profondeur, alors que "The Man" décroche tout juste la moyenne. Néanmoins, la ligne de piano très sympa de "Nina" associée au joli flow d'Ed prouvent que cet artiste n'a pas son pareil pour mêler pop et RnB... lorsque les compositions sont au niveau.

Le reste de l'album nous ramène en des eaux plus familières avec des titres classiques, mais très réussis. La chanson soul "Thinking Out Loud" passe comme une lettre à la poste. Le dernier titre, "Afire Love", que SHEERAN dédie à son grand-père qu'il a toujours connu atteint de la maladie d'Alzheimer, est un vibrant hommage et une magnifique conclusion à l'album. Enfin, les autres chansons co-écrites avec Johnny McDaid (membre des SNOW PATROL) témoignent d'une incontestable maîtrise mélodique : difficile de résister à la beauté fragile et aux harmonies vocales à la SIMON & GARFUNKEL de "Tenerife Sea", à la magnifique ballade pop qu'est "Photograph" et à l'entêtant "Bloodstream" (qui raconte l'expérience de son auteur après avoir pris de l'ecstasy).

Au final, X se révèle être un album plus varié que son prédécesseur, ainsi qu'une éclatante confirmation du talent de son interprète. Très bien entouré, Ed SHEERAN réussit le tour de force de condenser en 50 minutes les grandes tendances du moment (Folk, Pop et RnB). Il est donc tout à fait logique que ce disque se vende comme des petits pains. On pourra juste lui reprocher une trop grande hétérogénéité des titres de RnB et parfois, des morceaux qui se terminent de façon trop abrupte une fois les 4 minutes atteintes.


N. B. : outre l'édition standard chroniquée ci-dessus, cet album existe en version Deluxe et en version Collector 2 CD. Aucune des deux n'est vraiment indispensable (sauf pour les fans absolus, naturellement) :
___ La version Deluxe comprend 4 titres studio bonus : "Take It Back" (un titre catastrophique au chant rappé), "Shirtsleeves", "Even My Dad does Sometimes" et "I See Fire" (3 titres agréables, mais inférieurs aux perles de l'édition standard).
___ Contrairement à ce que prétendent certains sites marchands, le premier CD de la version Collector ne contient pas les 16 titres de l'édition Deluxe, mais seulement les 12 de l'édition standard... Le deuxième CD comprend 2 inédits en studio convenables ("Everything You Are", "Friends"), 2 titres live tirés de X ("Sing" et "I'm a Mess") et un remix inutile de "Don't" (avec le rappeur RICK ROSS comme invité).

Liens en rapport avec l'album :
___ Ecoute de l'album en entier en version Deluxe :
https://www.youtube.com/watch?v=ZbngTwKtIuw
___ Clip de "Sing" :
https://www.youtube.com/watch?v=tlYcUqEPN58
___ Clip de "Thinking Out Loud" :
https://www.youtube.com/watch?v=lp-EO5I60KA
___ Clip de "Don't" :
https://www.youtube.com/watch?v=iD2rhdFRehU
___ Clip de "One" :
https://www.youtube.com/watch?v=Ix9NXVIbm2A