Véritable articulation scènique d'une ampleur conséquente, "Bible of dreams" est l'album qui à partir de cette année 1997 scindera la scène Trance psychédélique en 2. Le délire est le même, faire planer de par une musique électronique, grâce à des lignes mélodiques cycliques donnant l'impression de tourni, mais Bible of dreams explore de nouveaux horizons.

JUNO REACTOR abandonne le tout électronique : on retrouvera très difficilement ici les racines d'une scène alternant entre les acidités gastriques hippie-hindoue de la scène Goa ou les épopées cybernétiques hypnotisantes de la scène Psytrance. Enfin si, quelque part sur la fin de "Kaguya Hime" et sur "Children of the night", et c'est à peu près tout, le reste n'est que chimère.

Pourtant JUNO REACTOR venait déjà d'ailleurs, pas de racines Indus, encore moins de sensibilité Synth-pop chez eux, Ben Watkins est plutot de l'école Ambient, voir New Age. On avait remarqué une passion certaine pour le Japon sur le titre "Samurai", et quelques tendances à flairer à droite à gauche, pour piocher ailleurs que dans l'électro. Sur Bible of dreams, on retrouve tout celà, Juno Reactor fait du speed-Ambient dans un étui World-music, aussi oxymoresque que celà puisse paraître. Et pourtant, il s'agit bien de Trance.

Certains connaissent déjà sans doute, le fameux "Conga Fury", apparu dans Animatrix (et ailleurs, mais on évitera de raviver de mauvais souvenirs à ceux qui auraient vu l'autre "film") titre qui explorait un côté rythmique expérimental grâce aux congas, changeant de la rythmique binaire habituelle. Les autres titres vont également tous piocher dans un registre spécifique (chose assez rare en Trance pour être souligné) ce qui confère forcément à cet album quelques atouts. "Swamp thing" ressortira les congas pour l'occasion, version aquatique et tout aussi tribale, de façon très appréciable. Dans un style proche mais différent "God is god" révèlera le coté mystique du groupe pour une séance moyen-orientale réussie. Dans sa globalité, l'album revêt un apparat plus "naturel" qu'à l'accoutumée dans ce style, ce qui lui donne un côté de suite plus accessible, que le disque lambda de Trance psychédélique bombardé de rotors électriques et de fluides gastriques.

Malheureusement, Bible of dreams n'est pas forcément l'album qui plaira à tout le monde, la faute à des mélodies peu mémorables. On plane un peu, on regarde les poissons (le subaquatique "Shark") croiser les geishas pressées ("Jardin de cécile" et son côté traditionnel japonais) au dessus de nos têtes, c'est joliment fait, rarement ennuyeux (je souligne une nouvelle fois le coté "Ambient", pourtant), mais l'investissement personnel se fait rare ("Komit" s'en sort mieux que les autres à ce sujet). Notons également que la version limitée se dote d'un atout supplémentaire en la présence d'un remix du très réussi de "High Energy Protons" (le hit qui manquait sans doute à cet album).

En somme, Bible of dreams est une visite agréable, remettant au passage le compteur de la Trance à zéro, se posant donc comme une référence incontournable du genre. Le disque peine pourtant à fédérer : pas de gros hit qui cartonne (pas de "Conquistador", "Master of the universe", "Mona Lisa Overdrive" ou "Pistolero" en vue ici) pas plus que de bides. L'album aura donc su trouver son public, et le public quelques instants musicaux précieux, mais pour résumer : on ne plane pas assez.